Chronique du jeudi : «QUAND L’ENFANT AGRESSE LE PARENT»

Ce fut d’abord les patriotes. Leurs revendications étaient tellement récurrentes, qu’elles tombaient dans l’usité, le routinier. Ils manifestaient, organisaient des marches pacifiques, cela finissait par faire partie du décor. Mais, lorsque ce fut le tour de la police, cela entame l’inquiétude du Pouvoir. La, il y a quelque chose qui ne va pas. Alors pas du tout. La police dans un Pays géré comme le notre, est un outil essentiel qui épouse la logique du pouvoir. Elle est censée protéger ses actions, ses interdits et ses désirs. Elle n’est pas en situation de « revendiquer » de considérer le Pouvoir comme un antagoniste, mais comme un allié naturel. Alors, quand la Police manifeste, il y a absolument incohérence dans la stratégie du Système, donc du pouvoir. Mais ce qui est plus grave, c’est de voir les contestataires exiger la tête de leur chef. La réponse du pouvoir est désormais stéréotypée : D’accord pour les augmentations des salaires, d’accord pour l’amélioration des conditions de travail, d’accord pour « ne rien faire », mais les lignes rouges continuent à être soulignées. On ne peut répondre favorablement à ce qui pourrait être dangereux pour les équilibres du Pouvoir, donc pour l’avenir du régime.
La place prépondérante, voire vitale, de l’appareil répressif que représente le corps de la Police dans le maintien du statu quo politique, ne peut d’un coup s’ériger en justement déstabilisateur de ce statu quo. C’est pourquoi, la réponse est venue rapidement : satisfaire aux exigences socioprofessionnelles et rappeler les limites, tout en élargissant aux autres corps susceptibles d’être touchés par la contamination, la protection civile et les douaniers.
Depuis 2011 au moins, le Pouvoir a exaucé toutes les demandes des franges de la population en concédant des augmentations salariales avec effet rétroactif, au détriment de l’équilibre macro-économique, miné par une inflation galopante. La régression des investissements productifs complique davantage cette situation. Tant que le pétrole va, tout va. Mais, le problème, c’est que nous ne sommes pas maitres de la maitrise du prix de l’or noir, qui répond plutôt à des stratégies décidées ailleurs et répondant à d’autres objectifs. C’est probablement cela, qui fait courir le Gouvernement à accélérer l’exploitation du Gaz de Schiste, au mépris de toutes les réserves émises par spécialistes et société civile. Le pouvoir ne veut pas être pris de court ni par la chute du prix du pétrole, ni par son extinction. Son objectif essentiel est de garantir les ressources pour financer la paix sociale. Le tumulte qui règne au seuil des toutes les frontières du Pays n’est pas pour arranger les choses, générant des surcouts astronomiques pour la défense nationale, afin de garantir la sécurité du territoire.
La réaction du corps de la sureté nationale, suivi presque simultanément par la menace de celui de la protection civile, annihilé immédiatement par l’élargissement des mesures prises, n’est certainement pas anodine. S’il est vrai que les conditions de travail sont inacceptables, que la situation socioprofessionnelle mérite d’être réévaluée, ceci n’explique pas pour autant, la revendication du limogeage du chef de la Police. Celle-ci ne peut-être que le fruit d’une manipulation au sommet tendant à éliminer une force qui s’érige en obstacle. Le communiqué des contestataires de la Protection civile a fait de même. Ce qui n’est pas forcément innocent.
Au-delà de tout cela, il faut relever cependant que la déliquescence de l’État a atteint un seuil jamais égalé. C’est comme dans une famille où le fils se retourne et agresse ses parents. On peut se permettre des manifestations au niveau de l’ensemble des corps des travailleurs, ce qui est constitutionnellement leur droit, mais quand la dérive atteint les corps constitués, cela appelle à l’inquiétude. Il est temps que le Pouvoir réagisse et entame des réformes réelles et progressistes. Mais, la solution est d’abord économique. On assiste depuis quinze ans à des investissements dans les équipements sociaux générateurs d’emplois, mais d’aucune production, donc aucune valeur ajoutée. Il est temps de développer et encourager l’investissement productif, seul garant de la stabilité. C’est probablement ce qu’à déjà compris, la Palestine. J’étais fort surpris de me voir remis par un pharmacien un médicament fabriqué à Ramallah en Palestine qui n’est pas encore indépendante, mais qui pense au futur….

djillali@bel-abbes.info