À propos de l’extrême droite algérienne kabyle à la fête de l’Humanité!

Paris, le 10 octobre 2017
Monsieur Patrick LE HYARIC , Député européen,
Directeur de l’Humanité,

Vous savez certainement que le MAK (mouvement d’extrême droite algérienne kabyle) se vante sur son site d’avoir été invité à la fête de l’Huma. En effet, comment un tel groupe ne tirerait pas une certaine gloire à avoir réussi à se faufiler dans un rassemblement qui s’honore depuis des décennies d’accueillir les représentants des luttes sociales et des peuples victimes d’oppression.

Je ne trouve pas de qualificatif pour exprimer ma totale désapprobation d’une telle initiative, laquelle constitue sans aucun doute, une contradiction avec l’histoire et les engagements anticolonialistes des militants du PCF. Cette initiative, dénoncée d’ailleurs par beaucoup de militants présents à la Fête de l’Humanité, dont le député honoraire du Gard Bernard Deschamps, est en contradiction avec la mémoire des victimes de la répression du métro Charonne, ou des guillotinés pour l’indépendance de l’Algérie. On ne peut pas tourner le dos à la mémoire de Henri Alleg, Maurice Audin, de Jacqueline Guerroudj, d’Eveline Safir Lavalette, Fernand Iveton, Henri Maillot, Frantz Fanon, et tous les autres (qu’ils m’excusent de ne pouvoir toutes et tous les citer) militants attachés à la lutte contre les injustices et l’oppression.

Je n’ai aucun doute sur vos convictions et votre solidarité avec le peuple palestinien, vous les montrez à chaque fois que vous avez l’occasion de les exprimer. C’est la raison pour laquelle je m’interroge sur le fait qu’un tel événement ait pu se produire. Comment un mouvement d’extrême-droite qui revendique, entre autres, par la bouche de son leader Ferhat M’henni, son engagement pour le « droit du sang » a pu même s’installer au sein de la fête de l’Humanité ? Ce sont des questions qui perturbent beaucoup de militants du PCF mais aussi du FDG.

Dans mes engagements publics (associatifs, politiques et syndicaux), comme d’ailleurs lors de la dernière campagne électorale pour les élections Européennes, où j’ai eu l’honneur de défendre les idées de droit et de justice au sein de la liste du FDG que vous avez conduite dans la région d’Ile de France, je n’ai jamais manqué de rappeler le ciment de nos convictions contre le racisme et le colonialisme : « pas de peuples entre les murs, pas de murs entre les peuples ».

Bernard Deschamps, député honoraire du Gard, dans le courrier de protestation qu’il vous a adressé en date du 25 septembre 2017, a eu le courage d’appeler « un chat, un chat » : Oui, Ferhat M’henni et sa mouvance du MAK, sont bien d’extrême-droite, et il n y a aucun doute là-dessus.

Sur la déstabilisation de l’Algérie, que Bernard Deschamps rapporte, c’est Ferhat M’henni lui-même qui le revendique, notamment à travers l’évocation d’une « entreprise à la libyenne » qu’il a exposée au député néoconservateur Eric Raoult.

Dans ce débat, qui est désormais public, je trouve que l’argumentation développée par Rosa Moussaoui, journaliste à l’Humanité.fr, irrecevable, voir même révoltante (voir PJ). Par quel miracle peut-elle dissocier cette « mouvance politique » de l’extrême droite française et israélienne ? Ignore t-elle les liens, que revendique ce groupe, avec « Ripostes Laïques », Robert Ménard, Eric Zemmour, BHL, Eric Raoult, Valérie Boyer, le CRIF, UPJF, Jacques Kupfer, chargé des relations internationales du LIKOUD, Danny Danon, l’un des collaborateurs parmi les plus brutaux de Netanyahou, etc. ???

Dans un article récent, intitulé « Valls poursuit sa dérivé droitière », le journal l’Humanité.fr a dénoncé, à juste titre, le rapprochement de Manuels Valls avec l’extrême droite israélienne. Pour Rosa Moussaoui, qui parait ne pas être à une contradiction près, cette dénonciation semble ne pas devoir s’appliquer à cette mouvance réactionnaire qu’est le MAK.

Je ne veux pas croire, un seul instant que la promotion de cette organisation réactionnaire, qui revendique son soutien au colonialisme israélien, et dont le leader menace impunément en France et publiquement les « Kabyles » qui ne s’alignent pas sous son diktat, relève d’une volonté politique délibérée. Comment peut-on accueillir à la fête de l’Humanité, celui qui traite les pays africains de déchet ?

Je refuse l’assignation identitaire (d’ici comme d’ailleurs), dans laquelle ce groupe extrémiste et ses promoteurs, tentent de nous enfermer. Cette manipulation politico-religieuse relève de la stratégie coloniale, comme le décrivent, entre autre, Vincent Geisser et Aziz Zemouri dans leur excellent article « la renaissance du mythe Kabyle » publié le 20 mars 2007.

Par avance, merci pour tout l’intérêt que vous porterez aux interrogations d’un « kabyle », franco-algérien, véhiculant des valeurs internationalistes et qui n’a pas troqué la « lutte des classes au profit de la lutte des races ».

Boualem SNAOUI,

Militant syndical, associatif et politique.

Candidat élection européenne 2014, liste FDG – Ile de France.