Chronique du jeudi (Revisitée) : «QUI SUIS-JE ? »

Djillali Cherrid
1951 – 2018

Chronique du jeudi (Revisitée) : «QUI SUIS-JE ? »
Par Djillali C.

BAI a connu récemment, un grand débat sur les origines de cet Algérien que nous sommes. La polémique s’est servie d’Ibn Khaldoun pour les défenseurs de toutes les thèses, mais également des Beni Hillal, des Phénicens, des Byzantins….mais pas des Numidiens.

Ce débat m’a inspiré cette chronique que je dédie à l’ensemble de ceux qui y ont participé.

« Je suis né sur la rive droite de l’Oued Melghir, entre Djebel Zedjine et Djebel Robba, à quelques encablures du hameau du M’Cid, pays de Mehadja et 40 chéchias, que le chantre des Beni Ameur, Mostefa Ben Brahim a immortalisé par le sulfureux (El Goumri) même s’il est natif d’un autre hameau (El Bordj de Boudjebha) » S’adressant au pigeon voyageur depuis le Maroc où il était exilé, Il disait à peu près ceci :

« Longe la rivière et vole doucement.

Au niveau des plaines, tu trouveras des Gens Droits.

Ceux-là, ceux sont les Gens honnêtes, ceux sont les Gens de M’Hadja !

Dis-leur : je suis venu et je vous apporte un message ;

De celui qui espère et médite sa nostalgie ;

SAFA, l’exilé solitaire, organisait des fêtes avec frasques !! »

(Traduction approximative, SAFA désigne Mostefa pour les intimes)

« Mon nom fut changé en 1956, parce que constatant une « fuite harkie » de la liste des Moudjahidines vers l’armée ennemie, l’état civil fut incendié par l’ALN, et de nouveaux documents avec de nouveaux noms furent distribués aux familles par le FLN (le Vrai) en perspective de la réactualisation de l’état civil par le colonisateur. Et c’est le nom que ma famille porte jusqu’à aujourd’hui. »

« Et c’est tout ? Je crois que oui, si j’ajoute que mon père et son père sont également nés dans la même Dechra. Parce que s’il faut remonter plus loin, je vais me mettre à délirer comme le font beaucoup de mes compatriotes qui se confectionnent des « arbres généalogiques » qui, je ne sais par quel miracle, remontent tous systématiquement, au Prophète (QSSSL) ou à un degré moindre Son Cousin et Gendre Ali (karam allahou ouadjhah) »

« L’on sait que la descendance chez les Arabes – machistes – s’établie selon la lignée du père. Or, pour le prophète (QSSSL), chacun de nous sait qu’Il n’a eu aucune descendance directe à partir du moment où il n’a marié aucun garçon. Dieu a du le faire exprès (pour être « 3ibra lila3alamin ») Car nous connaissant, on se serait entretués pour faire partie de la Caste, de manière beaucoup plus virulente qu’ILS le font actuellement pour faire partie de la famille révolutionnaire ! »

« Pour Ali, le commun des mortels sait que ses deux enfants Hassan et Hossein se sont stabilisés et tués précisément dans la Zone Chiite, qui est actuellement l’Irak et l’Iran, et c’est trop loin de la « Berbérie » rendant la probabilité quasi nulle pour prétendre à une quelconque descendance ! Voyez plutôt du côté de Karbala, Qom, Ispahan ou Samarcande ! »

« Si je remontais un peu plus près, je dirais que je suis né de religion Musulmane et de race supposée Arabe. A l’école, j’ai été selon les périodes : Arabe depuis l’invasion des Beni Hillal ; Turc depuis que Barberousse et son frère écumaient la Méditerranée, Berbère depuis que j’ai découvert que Robba et le Roi Syphax l’étaient, et enfin, Descendants des Gaulois ; qui étaient donc mes ancêtres. Au passage, j’ai eu quelques gênes Romains, Grecs et Phéniciens »

« J’ai étudié la langue arabe sans vraiment le faire, me contentant de réciter les Versets appris à coup de flagellation dans les écoles coraniques. J’ai appris sérieusement la Langue française, qui a failli devenir ma langue maternelle ! Ensuite, je fus « re-arabisé » par les ex-Egyptiens importés, où j’ai découvert que leur Arabe n’avait pas de lettre « J » mais la lettre « GU » qui ne figure pas dans l’alphabet arabe, et surtout la manière de prononcer le « D » en « Z » et qui, aujourd’hui, nous traitent de non-arabes ! » Mon institutrice s’appelait « Foukia » et m’a envoyé une carte postale du Caire où elle a du faire escale en rentrant chez elle, au fin fond du Nil.

« La Journée j’étais assommé par le courage de Vercingétorix, la bravoure de Napoléon, et la puissance de Jules César ; la nuit tombée la légende d’Ali racontée par ma mère devant l’âtre, où ; d’un tour de main, il abat 50 000 Kafer avec son mythique sabre, me rendait ma fierté de Musulman ! »

« Aujourd’hui tout s’emmêle : On revendique l’ARABITE en langue et en appartenance, on revendique l’AFRICANITE en politique et en géographie, on revendique la « MEDITERRANNEITE » en économie. » et la « MAGHREBINITE » par la force des choses !

« Décidément, Le fameux non-alignement des années de gauche, nous collait mieux ! »

« L’Arabe est une race et non une religion. La religion est sacrée, la Race non. Il y a une seule Religion reconnue par Dieu, l’Islam. Il y a par contre, une multitude de Races ! Cette Race a sa langue qui est la langue Arabe. Ce n’est pas le fait d’être la Langue du Saint Coran, qui en fait une langue supérieure aux autres ! La suprématie d’une langue se mesure par son apport à la civilisation, aux sciences et à la technologie ! Les langues sont une arme au même titre que toute autre arme et les maîtriser, confère une suprématie sur le reste. Le Prophète (QSSSL) nous encourage à apprendre les langues par son Hadith qui nous recommande de « chercher la science, y compris en Chine » Et ce n’est certainement pas en langue arabe qu’on va l’y trouver ! »

« J’ai toujours entendu parler de Berbères « arabisés » mais le hic m’a été raconté par quelqu’un qui s’est découvert après de multitudes recherches, un Arabe « berbérisé » Parmi ces ancêtres arabes ayant débarqué en Berbérie, et précisément à Béni Chougrane du côté de Ghriss, il se trouvait un globe-trotter qui a émigré en Kabylie, s’y est définitivement installé et épousé une autochtone. (sic) »

« La non reconnaissance de notre identité nous fait perdre tous les repères, le salut se trouve dans n’importe quel recours pour s’y accrocher. »

« On se focalise sur une zone d’Algérie qui se targue de la légitimité numide, le reste de la population la réduisant à un magma de tribus (Kabyles) qui vient de l’arabe « Kaba’il ». Le fait d’avoir gardé sa langue maternelle, s’explique beaucoup plus par les reliefs géographiques de la région, où il était possible de se terrer dans les montagnes, lors des différentes invasions et vivre en autarcie totale ! »

« Sinon comment expliquer tous ses vestiges berbères à l’Ouest : Comment expliquer les noms d’Ain Temouchent, Relizane, Teghalimet, Tademaït, Tafessour…. Comment expliquer la présence de Syphax à Beni Saf et Robba au M’Cid ? Comment expliquer que « Yannayer » est fêté avec plus de faste et de « religiosité » à l’ouest qu’en « Kabylie » ? »

« Toutes ces Réalités s’entrechoquent dans ma tête ! Il y a comme un problème à résoudre ! »

« Alors, QUI SUIS-JE ?

Originaire de la Numidie, je suis donc Numide ou tout au plus « Arabe Emigré » si mes ancêtres faisaient partie de l’invasion des Beni Hillal ! »

Ce n’est pas une réponse !

Ni Arabe ni Turc, Ni Romain ni Grec , encore moins Gaulois.

QUI SUIS-JE ? Tout simplement ………. ALGÉRIEN !

Par Djillali Cherrid
Chronique publiée 29 juillet 2010
reproduite post mortem Jeudi 19/09/2018