Maintenant veillons au grain.

Vaille que vaille les élections présidentielles ont eu lieu. La fumée blanche est sortie de la cheminée de la maison Chorfi. Un président est élu. Habemus papam.

Mal élu, puisque, d’évidence, il ne représente qu’une partie minoritaire des algériens. Avec un taux de participation au vote n’excédant pas les 40% du corps électoral le président n’a pas toute la liberté de manœuvre que nécessite la gestion d’une crise multidimensionnelle majeure. Et c’est moins la faiblesse du taux de participation au vote que le refus catégorique de l’élection elle-même par 60 % du corps électoral qui délégitime cette élection, et par conséquent, rend difficile ce nouveau mandat présidentiel.

Le taux de participation aux élections présidentielles, à supposer qu’il soit sincère, est celui que connaissent tous les pays « normaux » et même les plus démocratiques, Chorfi ne cesse de le clamer, et il a raison. Sauf que sur 24 OOO OOO de potentiels votants, il n’a la faveur que de 4 000 000 de personnes, et, plus grave encore, la « rue », qui constitue désormais l’opposition majoritaire !!!! lui est, à priori, très hostile.

Comment, dans ces conditions, parvenir à respecter les promesses électorales et les 54 propositions faites. Surtout qu’à ces difficultés politiques s’ajoute une conjoncture économique des plus défavorables : 90% des entreprises économiques présenteront un bilan négatif à la fin de l’année, 60% des entreprises exerçant dans le BTP ont cessé leur activité pour cause de faillite, des secteurs entiers de l’économie sont à l’arrêt, les plus grands capitaines de l’industrie sont poursuivis et même lourdement condamnés pour certains d’entre eux, la confiance des partenaires étrangers perdue, une des dernières places pour le climat des affaires (157 sur 190), des réserves de change réduites comme une peau de chagrin, le prix du baril à 60 dollars, et, pour boucler le tout, une société habituée à l’assistanat qui réclame toujours plus et qui tient le politique à la gorge.

La tache qui attend le nouveau président Teboune est immense. Il a, à proprement parler, à nettoyer les écuries d’Augias. A-t-il pour cela la force d’Hercule ?

Cette force nécessaire, il ne pourra l’avoir tant qu’il reste isolé. Dans son premier discours de président fraîchement élu, il a fait des promesses de réconciliation et a ouvert très large ses bras. C’est l’euphorie naturelle qui vient du succès. Pourvu qu’elle dure cinq ans.

Mais puisqu’il est installé aux commandes et qu’il n’est plus facile de le déloger sans que le pays ne sombre dans l’inconnu, il appartient à tous de lui accorder une présomption de bonne foi et de le tenir à l’œil par les voies que la démocratie offre.

En tout état de cause, désormais le peuple qui est sorti de la caverne, qui a vu la lumière, qui ne se laisse plus dupé par les ombres des marionnettistes, veille au grain.