Le titre peut paraître paradoxal. Après tout, la science est sans frontières. Elle communique mondialement, elle se le doit pour innover, provoquer une avance en se basant sur tous les faits scientifiques antérieurement acquis. Pourtant, c’est une réalité. En dépit des offres alléchantes parvenues des grandes universités et laboratoires de renommée internationale, le Pr Houda-Imane Faraoun, directrice générale de l’Agence thématique de recherche en sciences et technologie (ATRST), a préféré, par devoir national, rester en Algérie pour se consacrer à la recherche scientifique.
Issue d’une famille modeste dont le père et la mère enseignants de leur  état, elle a suivie une scolarité à l’école primaire de Hassi dahou (ex:Boutin), après avoir obtenu son bac en sciences exactes, en 1995 au lycée Si El Haouès de Sidi Bel Abbès, alors qu’elle n’avait que 17 ans, Houda-Imane Faraoun, c’est d’elle qu’il s’agit, s’est tracé une feuille de route qui devait l’emmener au sommet de ses aspirations. En effet, une fois son bac en poche, elle s’inscrit à l’université Djilali-Liabes de Sidi Bel Abbes où elle décroche un DES en physique du solide en 1999. Ce premier diplôme universitaire l’incite à poursuivre ses études dans le même domaine. C’est ainsi qu’elle soutient en 2001 son magistère, toujours en physique de l’état solide, avec la mention très honorable. Fidèle à son université et à sa spécialité, elle s’inscrit en doctorat, pour développer un travail théorique sur les méthodes de simulation des métaux et leurs alliages. En même temps, elle tente sa chance en postulant pour une thèse industrielle en sciences de l’ingénieur à Belfort (France). Elle décroche une bourse de la région de Franche-Comté, dans le cadre d’un projet de développement impliquant un consortium de plusieurs partenaires européens dont Rolls-Roys, pour ne citer que le géant des moteurs d’avion. Le sujet était à l’opposé de celui, théorique, qu’elle a entamé à Sidi Bel Abbès, mais elle préfère poursuivre sur les deux options, en consacrant ses soirées et week-ends à sa thèse algérienne. Pour elle, la recherche théorique est aussi nécessaire, il ne faut pas s’en détacher trop tôt dans la carrière d’un chercheur. Couronnement, en 2005, elle décroche les deux titres universitaires à la satisfaction de ses proches. Toute auréolée des deux diplômes qu’elle vient de décrocher, Houda-Imane Faraoun retrouve son pays et ses proches à Sidi Bel Abbes pour revenir à la vocation d’enseignant chercheur, tant désirée, en rejoignant en 2006 l’Université de Tlemcen. C’est là où elle obtient son habilitation en 2008 et, en 2013, accède, à trente-quatre ans seulement, au grade de professeur. Après cinq années passées dans la capitale des Zianides, elle a la chance et l’honneur, comme elle le souligne, de diriger l’Agence de recherche. Connue par le passé sous l’appellation de l’Agence nationale pour le développement de la recherche universitaire (Andru), l’Agence est transformée en Agence thématique de recherche en sciences et technologie (ATRST) en 2012 à la suite d’une réforme qui a touché le secteur de la recherche scientifique. D’ailleurs, les pouvoirs publics ont décidé de mettre en place des agences sectorielles à l’instar d’autres structures de liaisons avec le monde socio-économique. Quatre autres agences thématiques ont été mises en place, notamment :
de biotechnologie et sciences agroalimentaires,
des sciences de la nature et de la vie,
des sciences humaines et sociales.
des sciences de la santé.
Invité à parler de ses activités en dehors de son travail de gestion, notre interlocutrice, affirme qu’elle est à cheval entre la gestion et la recherche, tout en gardant un pied à l’université en encadrant des doctorants et en participant aux travaux de membre de jury de thèses. On l’appelle Madame la Directrice, bien qu’elle ne soit pas encore mariée et tout en parlant de sa vie personnelle, la Directrice générale de l’ATRST exige de son entourage un certain niveau de déférence en se faisant appeler Madame la Directrice. Quand elle parle de sa famille, dont elle est l’ainée des trois filles et la cadette de la famille Faraoun, Houda-Imane évoque avec une certaine philosophie : « J’ai l’énorme plaisir d’avoir expérimenté environ 10% de la maternité, en contribuant à élever mes deux petites sœurs dont l’une prépare aujourd’hui un master et l’autre une licence d’anglais », dira-t-elle tout en affirmant qu’elle a une famille formidable qui se trouve toujours à Sidi Bel Abbes, avec son frère, professeur en informatique et fierté de la petite famille. D’ailleurs, à l’entendre parler, on comprendra que sa famille et son métier d’enseignant chercheur sont tout pour elle. « En fait, quand j’étais jeune, je pensais que la recherche ne pouvait se concrétiser en Algérie, mais une fois que j’ai été à l’étranger, où j’ai passé quatre ans, j’ai constaté qu’il n’y avait pas une grande différence. Mieux encore, nous avons ce que les autres n’ont pas, c’est-à-dire la matière grise », indique-t-elle. Notre interlocutrice souligne dans ce contexte la jeunesse de l’université algérienne : « Si nous voulons qu’elle prospère, il y a lieu de mettre la main à la pâte. » A ce propos, elle parlera de son travail, pour lequel elle dira avoir constitué une équipe de recherche à Tlemcen avec laquelle elle travaillait, mais elle a dû la quitter en 2011 pour assurer la direction de l’Agence. Parlant des moyens de l’Université algérienne, le Pr. Faraoun, dira qu’en Algérie l’université est jeune, mais la recherche l’est encore plus, car elle n’existe de manière organisée et suivie que depuis 2001, c’est là où est apparue fermement la volonté de l’Etat d’investir dans ce secteur et particulièrement sur les chercheurs universitaires. Donc, il y a encore beaucoup à faire. A propos de moyens, elle dira : « Beaucoup de gens estiment que ce volet fait défaut en Algérie. Là, je regrette de les contredire, car les moyens disponibles sont énormes ». Elle affirme qu’à l’étranger, ce n’est pas facile d’obtenir des subventions pour réaliser un projet de recherche, ce qui n’est pas le cas chez nous, où l’on trouve toutes les facilités, du moment que l’Etat est pourvoyeur des fonds nécessaires, quasiment à volonté. Elle ira même à dire que la recherche exige une certaine volonté, car si au début de la décennie, il n’existait que très peu de laboratoires, aujourd’hui 1306 sont répertoriés et environs 40% d’entre eux sont opérationnels depuis peu. Les jeunes générations commencent à peine à découvrir l’espace de la recherche précise-t-elle.

Plus de 40 publications à son actif
En dépit de son jeune âge, Houda-Imane Faraoun est l’auteur de plus de 40 publications scientifiques de même qu’elle a présenté plusieurs communications au niveau national et à l’étranger. Membre du Comité de formation doctorale « Physique de la matière condensée », elle est également responsable de la spécialité et chef d’équipe de recherche
« Métaux et alliage » relevant de l’unité de recherche rattachée à l’université Abou-Bakr-Belkaid.

Au plan des responsabilités
Directrice générale de l’ANDRU puis de l’ATRST depuis 2011, elle préside la Commission intersectorielle de promotion, de programmation et d’évaluation de la recherche scientifique et technique « Sciences fondamentales » et elle est membre du Comité sectoriel permanent du MERS. Elle préside également le conseil d’administration du Centre de recherche en analyse physico-chimiques CRAPC et la commission des marchés publics du Centre de recherche en économie appliquée CREAD, tout en siégeant dans le conseil d’administration de l’Agence nationale de valorisation des résultats de la recherche et du développement technologique ANVREDET.

 

 

Sources: Ahmed HADJI