ROBBA et les 12 Archéologues. (3ème Partie et Fin) Par K. AL-MECHERFI

               Pour comprendre la rose certains utilisent le papillon, d’autres les épines. Mais, d’autres encore utilisent les chansons de Julia Boutros depuis quelle était âgée de douze ans (Voir Photo – Biographie). Le chiffre douze (12) archéologues dans cette saga de Robba est un avertisseur sonore et explicite. C’est une mesure mathématique normalement assez efficace. Il symbolise ce qui est « achevé », il est généralement interprété comme la fin d’un cycle puisque, nos systèmes horaire et duodécimal reposent sur douze heures et douze mois. Ce nombre est fondateur dans les trois grandes religions. Évoquons notamment les douze apôtres qui accompagnaient le christ. Il est donc un symbole très fort dans toutes les cultures.

D’ailleurs, l’archéologue et le personnage imaginaire à la barbe de trois jours « Indiana Jones », l’avait déjà utilisée au royaume des cranes de cristal. Mais, il avait échoué même si Steven Spielberg, nous avait pourtant habitués à mieux. On le sait, avec les années la filmographie ainsi que la bibliographie doivent absolument être actualisées. Sinon, elles deviendront divertissantes sans plus. D’autant plus que les archéologues n’ont plus le monopole du discours sur le patrimoine. Ainsi, avec cette troisième partie, j’avais le spectre qu’elle allait mal finir. Il me semble que nous avions gaspillé énormément de temps à tourner en rond. Je me disais qu’il faudrait peut-être bien arrêter cette aventure « très Française » nous dit-on.

ROBBA, est un prénom qui a traversé les siècles. En effet, certains disent qu’il est d’origine locale et donc Berbère. D’autres pourtant disent qu’il est d’origine latine, puisque le masculin signifie « Robert », qui veut dire collines (comme colline Robba). D’ailleurs deux empereurs de Byzance (Constantinople) ont parait-il porter ce prénom. Robin des bois est un diminutif de robert. Pourtant, en français médiéval Robin voulait dire mouton ! Autrement dit, revenons à nos moutons ! Même, s’il s’agit là, de revenir à Robba la donatiste.

Le prénom de Robba est attesté depuis l’antiquité dans l’ouest de l’Algérie. Il est célèbre surtout pour avoir été porté par une femme, une religieuse donatiste du cinquième siècle. Ce prénom est peut-être redevable aussi aux puniques (Carthaginois), pourquoi pas ! La racine RB se retrouve dans toutes les autres langues sémitiques. Le féminin rabba, désignait, chez les Arabes païens, la déesse al-Lât.  À Sfisef (Sidi-Bel-Abbès) , ce prénom de Robba est encore employé dans la région. On le savait déjà, la colline qui porte ce nom l’atteste aussi. L’appellation Robba s’est donc perpétuée dans l’onomastique algérienne contemporaine. Paradoxalement, d’un autre coté, dans le très célèbre dictionnaire des noms de Jean Tosti. Ce prénom de Robba est Italien. Rien d’étonnant puisque tout le bassin méditerranéen est le berceau de l’empire romain.

En poursuivant, les traces des douze archéologues que j’avais choisi délibérément parmi d’autres. Le neuvième archéologue, fut un grand spécialiste des histoires liées aux martyrs Donatistes de l’Oranie. En évoquant, ce concept de « Martyres Chrétiens». L’Historien doit absolument se référer aux sources latines comme Tacite sénateur et historien du premier siècle. Il existe aussi des ouvrages conçus par des spécialistes qui ont consacrés leurs vies à ces types de recherches. Quand, on arrive au dixième archéologue à avoir étudié la saga de Robba. C’est pratiquement à « l’antiquité tardive » qu’on à faire. Une période de transition, il faut bien le préciser. Cependant, elle est surtout cruciale pour l’étude de l’histoire des juifs mais aussi celle de la christianisation du bassin méditerranéen et l’avènement de l’Islam en Afrique du nord. C’est-à-dire la période qui nous intéresse le plus dans cette saga de Robba entre la fin du IIIème siècle et VIIème siècle. Cependant, à moins d’une éternelle contestation, retenons bien ces « repères ». Cet archéologue de l’université de Marseille-Aix-en-Provence avait consacré beaucoup de ses travaux à la nécropole et les cérémonies funéraires en Mauritanie et Numidie. Son étude est très intéressante. J’ai oublié de dire qu’il était un ancien enseignant de la faculté d’Alger. Un archéologue « maison ». C’est lui, qui nous a aidé à saisir le sens ecclésial du martyre et son culte durant la période de l’Afrique Byzantine « ou » disons tout simplement, le contexte culturel et la communication religieuse de l’époque.

Le Onzième archéologue, dont le nom sera lui aussi masqué intentionnellement dans cette saga.  Fut d’abord un homme de l’église. Il avait lui aussi pioché dans cette archéologie du caveau de Robba. Il avait surtout beaucoup écrit sur la supposée basilique d’Ala Miliaria. Il était historien, archéologue et épigraphiste. Les connaisseurs et autres passionnés du  Donatisme le reconnaitront surement. Il était professeur émérite d’Archéologie à la Sorbonne. C’est aussi le seul archéologue ayant eu le mérite de recevoir les médailles d’or de tout à la fois de honoris causa, mérite des sociétés savantes de l’archéologie chrétienne et aussi celle des Académies d’Architecture. C’est un savant au sens propre du mot. Et enfin le douzième et dernier archéologue de notre saga fut un archéologue des camps romain et notamment leur architecture militaire. Alors que l’intérêt pour l’armée romaine ne s’est jamais démenti depuis le Moyen Âge, ce douzième et dernier archéologue du XXe siècle a pu mettre au jour, grâce au recours à l’archéologie aérienne, un nombre considérable de sites militaires renouvelant profondément la lecture des sources anciennes dans leur confrontation avec les témoignages de terrain. Ainsi, il avait fait une étude comparative d’Ala-Miliaria (Bénian). C’est lui, qui va nous informer des lacunes  et déficiences laissés par Stéphane Gsell and Co.

Après avoir étudié les données théoriques sur la castramétation fournie par les auteurs anciens, en particulier Polybe et autres, ainsi que ceux fournies par les archéologues du XIXème et XXème siècle, l’auteur dresse un inventaire des camps permanents bien documentés par l’archéologie, de toute l’Afrique du nord dont celui d’Ala-Miliaria. Le corpus ainsi constitué comprend un nombre déterminé d’établissements. Son étude est typologique. Elle distingue six classes principales de camps et citadelles romaines et propose pour chacune d’elles une période d’utilisation. Le lecteur retrouvera ainsi toute l’évolution des fortifications. Le camp est avant tout le symbole du pouvoir nous dit-il. Cette garnison d’Ala-Miliaria avant d’être  un sanctuaire donatiste était d’abord un camp militaire. Il n’y’a aucun doute à ce sujet. Nous dit-il. Le sanctuaire d’Ala miliaria, est donc loin d’être construit ex novo. On avait réutilisé les pierres du site pour implanter  (et non « construire ») une supposée église au début du cinquième siècle avec beaucoup d’imprécisions et d’irrégularités. Apparemment, elle ne se situait pas dans le même axe que le tombeau de Robba. La nécropole dans cet endroit débute en 422 à la mort de Julia, soit avant la mort de Robba. Le tombeau de Julia Geliola, sœur de l’évêque Nemessanus se trouvait au nord de celui de Robba. Celle-ci avait aussi vécue cinquante années et morte le 22 décembre 422. Notons aussi que l’évêque Nemessanus, le frère de Julia devait être l’évêque d’Ala-Miliaria, mort le 7 octobre 422,  quelques semaines après sa sœur. Donc, cette nécropole n’était pas réservée spécialement pour les martyrs (C’est très important de le signaler). C’était pour honorer la martyre, objet d’un véritable culte, que l’on aurait décidé de l’implantation de l’édifice, à côté et non pas au-dessus de la tombe.

À partir du milieu du vieme siècle, l’empire Byzantin désormais christianisé, la martyre se répand dans la piété populaire. Et ainsi apparaissent les légendes martyres qui ont traversés les siècles. Pour mieux comprendre les schismes qu’a connus l’Eglise. Il faudrait voir large autour du bassin méditerranéen et au delà de l’antagonisme Catholique et Donatisme et surtout revenir en arrière de cette mystérieuse antiquité tardive. Autrement dit, le milieu du Vème siècle. Exactement, le 8 Octobre de l’année 451, ou l’Orient se divisa aussi. Le concile réunit 343 évêques (Ce fut un record) dont quatre seulement  viennent d’Occident. C’est durant ce concile qu’est redéfinie la notion de personne (hypostase). L’évêque de Rome « Léon le grand », refusa d’accepter le 21canon du concile qui avait donné le titre de nouvelle Rome à Constantinople. Donc, c’est là qui faudrait piocher pour saisir les autres chiismes et pas seulement du Donatisme. Ainsi, émerge d’autres Eglises de rite syrien et notamment Libanaise (Maronite de Saint-Maron) et celle d’Alexandrie, d’Arménie, d’Ethiopie et d’Irak …et autres. Les enjeux politiques de ces chiismes, il faudra les chercher dans la « manipulation de l’Histoire ». Un questionnement s’impose. Pourquoi n’y a t-il pas une journée sainte-Robba dans les différents calendriers chrétiens ? Est-ce parce qu’elle était donatiste ? Pourtant, cette même donatiste était une martyre !  Je sais qu’il existe la sainte Robbe, Roberta sainte Julia et autres. Cette question de martyre nous rappelle l’histoire complexe des cultes  des Saints en Islam sous l’effet du soufisme. Même, s’il faut faire ici très attention à la terminologie puisque le terme « saint » est en effet un concept chrétien. Ce concept de martyre il faudrait aussi le collationner avec le concept de la « résistance ». Ainsi, on comprendra l’origine lointaine de la division de l’Eglise autour de la méditerranée. L’histoire de la Sainte-Julia a au moins un sens !

Dans ce même vieme siècle, les Byzantins reconquirent en partie les provinces d’Afrique, mais l’historien Procope de Césarée ne mentionne pas les donatistes dans son œuvre « la Guerre contre les Vandales ». Il semble bien que les Byzantins ont effectivement abandonnés cette partie d’Afrique du nord. Le lecteur comprendra que « la photo aérienne » (qui ne date pas d’hier), avait donnée des ailes aux nouvelles méthodes archéologiques. L’utilisation d’images satellitaires via internet, gestion des données ont bouleversés les recherches. Aujourd’hui plusieurs sites internet-Live Search Maps, Nasa World Wind, Google Earth, Géoportail et autres se font avec  des consultations gratuites même si elles sont très inégales.

Pour conclure. On savait déjà que nos ancêtres n’ont pas toujours été nos ancêtres. Vaincus, ils étaient toujours décrits par des couleurs peu recommandables. Aujourd’hui encore, il me semble que les détournements de l’archéologie et l’histoire ont eu plutôt tendance à se répandre et à s’amplifier. Juste que le vocabulaire a changé. Je ne vous cache pas que je m’inquiète du glissement du vocabulaire dans mon pays.

 

AL-MECHERFI.

3 thoughts on “ROBBA et les 12 Archéologues. (3ème Partie et Fin) Par K. AL-MECHERFI

  1. Bonjour mon ami Karim.

    Je salue l’ami et l’historien que je respecte.Tout au début, le titre de votre contribution me semblait intéressant du fait que vous citez douze archéologues liés au nom de Robba la donatiste.Il était attirant au même titre qu’un film long métrage de cinéma. A titre d’exemple, les douze salopards, film réalisé par Robert Aldrich avec Lee Marvin, Ernest Borgnine…Les douze travaux d’Hercule,les douze coups de minuit, les douze coups de Noël, etc…Malheureusement et contrairement aux longs métrages aucun nom de ces douze archéologues n’est cité ainsi que leurs travaux qui se rapportent semble-t-il à Robba. Je préfère m’arrêter tout en vous souhaitant bonne chance dans vos prochains travaux et contributions.Seulement, je vous signale que c’est une élévation (Djebel) qui porte le nom de Robba à M’cid et non une colline, ce qui veut dire tout simplement. que vous ne connaissez pas l’endroit, j’ajoute les deux sites, Benian aussi.Je vous conseille amicalement de revoir vos lectures sur le donatisme, et plus particulièrement la citadelle donatiste d’Ala Miliaria.Je vous informe en parallèle que le professeur B.Moukraenta(archéologue) de l’université de Mascara a déposé une convention pour entamer ses travaux sur les deux sites de Sfisef. Merci pour la photo de Julia Boutros. Amicalement.

    1. Bonsoir mon ami et frère Driss..
      Merci énormément mon cher Driss de cette perspicacité très lucide. J’ai toujours dis, écris et défendu l’idée que l’histoire n’appartient pas aux historiens. Nous sommes tous les deux sur la même ligne. Cela étant dit. Il faut bien passer à autre chose. L’Histoire et l’Archéologie sont l’une et l’autre des « connaissances » du passé humain. Ce que l’on sait le mieux, c’est ce que l’on n’a jamais appris. Il faut continuer et ne jamais prendre les documents et autres lundis de l’histoire pour de l’argent comptant et même si c’est des d’archéologues connus et reconnus et au nombre de deux ou cent mille !

      Question de style, le mieux est bien évidemment l’ennemi du bien. Antoine Prost, n’a t-il pas dit dans son livre 12 leçons d’Histoire que : « L’histoire, c’est également une mise en intrigue ».(Prost,1998, p 105).

      Au fait, pour l’information, c’est vraiment une excellente nouvelle. Dr. Moukraenta Bakhta de l’Université de Mascara (Que je salue au passage).Connait très bien le terrain. C’est une opportunité pour le sujet. D’autant plus quelle est l’auteure d’une remarquable thèse sur l’Algérie antique à travers les sources arabes du moyen âge. Sa compétence dans le domaine de l’archéologie est plus que souhaitée. D’ailleurs, il est temps que le département d’archéologie de Mascara et même celui de Tlemcen fassent quelque chose. C’est mon rêve à moi qui se réalise. Bravo Driss et l’association ESPACE. Il n’y a pas une minute à perdre pour commencer à réaliser nos objectifs à toutes et à tous. C’est-à-dire ressourcer le patrimoine historique et archéologique de la région.

      Merci encore une fois mon frère Driss. Tu es vraiment un passionné de l’histoire et de l’Archéologie. Ta contribution depuis plus d’une dizaine d’année a éveillée l’attention des responsables et susciter l’intérêt de l’opinion public. Continuez et continuons tous pour l’estimation de ce site historique.

      1. Bonjour Karim.

        Encore une fois, mes remerciements au département d’histoire de l’UDL de Sidi Bel Abbès, et aux doctorants de votre laboratoire. On apprend beaucoup à travers le débat. Merci mon ami et historien et surtout au journal électronique Bel-abbès.info pour sa disponibilité.

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