« El koursi yedouwwakh» autrement dit « Le pouvoir corrompt.» C’est en ces termes, souriant, que le Président Bouteflika a répliqué à une question de journaliste, lors de sa première conférence de presse internationale, en 1999.
M. Bouteflika n’est pas un cas unique. Il y a eu Nasser, Franco, Saddam, Pinochet, Assad père, Gueddafi, Boumediene…. Il y a toujours Mugabé, Assad fils, Le néo dictateur Nord Coréen, et….
Juste avant la guerre du Golfe, une délégation des services Algériens se serait rendue chez le Président Saddam pour lui demander de se retirer du Koweit, pour éviter une invasion de l’Irak par les GI, action programmée, avec preuves à l’appui. La réponse du leader Mésopotamien aurait été sans fioritures : «Je préfère mourir!» Et il mourut !
Gueddafi a préféré un lynchage dans des conditions des plus humiliantes que de se retirer. Bachar El Assad préfère la disparition entière de son Peuple que celle de son pouvoir.
L’Homme au Pouvoir est ainsi fait. Il doit y demeurer. Ni l’intelligence, ni la raison, ni la sagesse, ni l’intérêt du Pays ne sauraient primer sur la nécessité absolue du Pouvoir.
C’est pourquoi, les « pourquoi » d’un quatrième mandat ne sauraient se justifier. C’est dans la logique de l’exercice d’un certain pouvoir. Quand je lis sur la toile cette question ironique d’un jeune :« Bouteflika sait-il qu’il se représente pour un quatrième mandat ?» je rigole. Je rigole, parce que c’est lui d’abord qui le voulait. La période de suspense qui a prévalu n’était pas destinée à le convaincre par son entourage, mais plutôt le contraire. C’est lui qui devait convaincre son entourage de sa capacité à continuer à exercer ses missions, y compris sa sœur qui n’a rien pu faire pour l’en dissuader.
Bouteflika, au même titre que l’ensemble de ses prédécesseurs sur la planète, est né pour le pouvoir. Ministre à 23 ans, il ne peut que vouloir construire sa carrière pour y finir au sommet du Pouvoir. L’ambition humaine est largement dépassée par les symptômes de la mégalomanie où le leitmotiv devient: « Nul autre que moi, ne conviendrait ». Déjà, à la mort de Boumediene, en 1978, l’échec de prendre la direction de Pays, lui reste au travers de la gorge. Revenir par la grande porte, alors qu’il est sorti par une lucarne, être investi des pouvoirs par celui-là même qui dut le condamner ; quelle belle revanche sur le sort! N’a-t-il pas exigé un score record au scrutin ? Non, une telle «stature» ne saurait se contenter d’un 51, 52%! «Il m’avait avoué qu’il était fasciné par le pouvoir et que nul ne pouvait le lui ravir, si ce n’est la mort» Yacef SAADI n’a surement pas été victime de sa sénilité en attribuant cette phrase au Président.
Ce type d’exercice de pouvoir développe d’innombrables effets pervers. D’abord, il inhibe toute existence d’élite politique de par l’absence de Partis avec assise populaire large, exerçant une mission d’opposition. L’ensemble des partis existant prêtent allégeance au Leader incontesté. De par cette manière de percevoir l’exercice du Pouvoir, aucune élite ne saurait se dégager. L’exercice du Pouvoir se caractérise au niveau des postes électifs par la «cooptation», la «chkara» et autre népotisme. Au niveau des postes de l’exécutif et administration de l’Etat, c’est l’allégeance et l’appartenance qui déterminent les nominations.
Dans ce type d’exercice de pouvoir, on ne trouvera jamais un homme politique qui émerge d’un Parti après avoir gravi l’ensemble des échelons de la base au sommet au bout d’une longue carrière de militantisme. Dans ce type d’exercice du pouvoir, les partis ne sont pas une expression d’une volonté populaire pour tenter d’imposer un projet de société, mais sont généralement «fabriqués» pour apporter un soutien au Pouvoir en place.
Par ailleurs, les seuls possibles « leaders » produits par ce type d’exercice du pouvoir, s’avèrent être des « transfuges » du système. Des personnes reproduites par le système, élevées en son sein et qui soudain, se découvre des desseins d’opposants. Ainsi, naquirent Benflis, Hamrouche, Bahbouh, Ghozali….. Des exceptions, dans des partis authentiques, ont fait leur apparition, mais l’hermétisme imposé par le Système mu par le Pouvoir en place ne leur permet pas, à brève échéance, de pouvoir le concurrencer ; tel est le cas de Said SAADI du RCD et de Louiza HANOUNE de PT.
Ce type d’exercice du pouvoir, à l’aune des évolutions géostratégiques actuelles, ne peut légitimement aboutir qu’au chaos. C’est ce qui s’est produit en Irak, en Libye, en Syrie. La Tunisie et l’Egypte sont en train de peiner pour s’en sortir juste par le fait que les armées de l’OTAN ne se sont pas impliquées directement.
Ce type d’exercice du pouvoir est en train de continuer à prouver sa non efficience à l’exemple du Venezuela et de l’Ukraine.
L’Algérie qui revient encore d’une décennie de guerre, d’une situation économique ayant flirté pendant une longue période avec la cessation de paiement, isolée, a besoin d’un Président disponible, alerte et plein d’allant. Elle a besoin d’un Président qui doit la relancer de par sa présence physique dans les grandes rencontres internationales. D’un Président apte à présenter son bilan et son programme lui-même. Un Président comptable devant son Peuple directement et non par procuration.
Si à aucun moment je ne saurais mettre en doute les capacités intellectuelles de M. Le Président, il est de mon droit élémentaire de ne pas croire ceux qui parlent en son nom. Il est de mon droit élémentaire d’exiger d’écouter le Président me parler directement. Il est de mon droit élémentaire de douter. Enfin, il est de mon devoir de craindre pour l’avenir de mon Pays. Il est de mon devoir d’appréhender le chaos…
djillali@bel-abbes.info.