Chronique du jeudi : CES ESCLAVES DE LA FAVEUR D’UNE ÉLECTION

«Il y a des choses qui ne sont pas nouvelles… Ceux qui ambitionnent les charges et un rang distingué, rampent autour de vous, esclaves de la faveur d’une élection. Chacun d’eux, avide du titre de Stratège (“d’être élu”), ne l’est nullement de faire acte de vaillance.» (1) En cette période de renouvellement partiel du Sénat, cette sentence sied à merveille. Cependant, force est de constater que l’évolution du phénomène de la «rampe» et de «l’ilotisme» a fortement évoluée à travers les différentes périodes et espaces dits démocratiques. «Faire acte de vaillance?» Ceci est pourtant révolu depuis longtemps. Peut-être même depuis Démosthène bien avant Jésus Christ! Par contre, se «faire esclave de la faveur d’une élection,» même si cela date du même auteur et de la même période, il ne faut nullement s’offusquer de voir cela se perpétuer, y compris à l’ère contemporaine et dans l’espace qui nous concerne. La seule vaillance qui vaille d’être relevée est certainement cette «bravoure» à vouloir, sous l’alibi d’un machisme exhibitionniste, s’attaquer à la femme ou de lancer des chaises à la figure d’un concurrent au sein de la même classe. Que n’a-t-on vu cela au sein du FLN, un peu moins au sein du RCD, mais jamais au FCE. Il n’est pas nécessaire de se torturer les méninges, le pourquoi se trouve tout simplement dans l’existence de l’argent chez tous les membres du FCE et chez certains seulement des membres de Partis. Comme depuis longtemps, le fric est devenu le nerf de la guerre y compris en politique, il n’est plus illicite d’évaluer en dinars sonnants et trébuchants, les efforts pour accéder à un strapontin d’élu. Payer grassement pour être élu député ou sénateur est devenu un investissement très rentable de par les retombées en termes d’octroi de marchés, de signature de P.V. de réception sans voir et sans s’offusquer des malfaçons préjudiciables et plus graves souvent dangereuses pour la vie humaine.
Je me suis surpris à lire dans la presse électronique récente relayée par les réseaux sociaux, que le Chef de l’exécutif de notre chère Cité, s’est offusqué, l’a clairement dit et publiquement exprimé sur la façon dont sont menés les projets de la ville. Il paraît qu’il s’est mis très en colère contre les «élus qui donnent des marché à leurs épouses ou leurs connaissances et qu’à la fin, ils ne peuvent pas intervenir en cas de retard et/ou de malfaçons!» Enfin s’est dit ! Le but est là. Quand on accuse l’oligarchie de vouloir s’accaparer le Pouvoir, il faut voir cette classe de vautours, pas les Entrepreneurs connus et investisseurs créateurs d’emplois et de richesses. L’oligarchie c’est beaucoup plus cette classe de rentiers qui s’est enrichie sur les deniers publics et en vendant leurs voix aux détenteurs de la Chkara et animateurs de l’économie informelle. Ceux-là même qui ont provoqué des émeutes contre l’utilisation du chèque, qui ont fait la propagande contre la circulaire réglementant la vente des boissons alcoolisées pour mieux la monopoliser à leur profit exclusif, qui ont fait reculer le Gouvernement sur les textes devant régir la fonction de concessionnaires de véhicules, ceux-là mêmes qui ont «liquidé» Amara Benyounès du Commerce et se manifestent en laudateurs de Amar Ghoul!
Un Wali qui s’offusque, qui s’énerve contre un élu constatant un léger écart, cela peut se comprendre, mais quand il s’agit d’agir contre les intérêts de la Commune dans la gestion des projets en cours parce que menés par l’épouse ou des proches, cela est un délit pire que la corruption, cela s’appelle du trafic d’influence, du népotisme, de faux et de dilapidation de deniers publics…. Quand il s’agit de cela, on ne se contente pas de s’énerver, on saisit la justice.
Au moment où l’on relève une mobilisation sans précédent de la Société Civile autour des préoccupations de la Cité, paradoxalement, on constate un vampirisme sans précédent au sein de la classe dirigeante des élus.
Une Société civile qui se mobilise autour de la préservation du patrimoine, d’abord contre les atteintes récurrentes au niveau du Lac de Sidi-M’Hammed Benali qui fut, toute honte bue, offert à des mercenaires de l’argent sale pour en faire un fast-food géant sur un tapis de béton. Et que crève la carpe et que tarisse l’oxygène ! Grâce à cette mobilisation, les dégâts ont été stoppés, mais les effets hélas, consommés.
Ce fut ensuite la Macta 1, 2 et 3.qui n’a pas empêché de passer d’un boulevard qui s’appelait «les Glaciers» allusion au nombre de kiosques de glaces et «créponné» naturellement dessiné par les verdures qui le constituaient, longées par d’interminables et beaux “parking” pour vélos de jeunes filles abonnées aux lieux chaque soir d’été,  à un impersonnel capharnaüm de «dalles de sol» et d’eau aux lumières colorées, mais sans glaces l’été, ni créponé, ni vélos!
Enfin, le jardin public tient actuellement le haut de l’affiche et a déjà fait couler autant d’encre que de salives, mais aussi des larmes. La première profanation fut de le réduire à un bazar pour le commerce d’oiseaux, avant de le jeter en pâtures aux adorateurs du béton.
La société civile a beau se démener pour préserver l’essentiel en son sein et celui de l’ex-école d’Agriculture, en vain. L’élite universitaire censée former pour protéger, contribue à la dégradation, après avoir brillé dans le plagiat et la vente des modules. Mais dans un Pays où on découvre que sur mille élèves en première année, seuls 41 obtiennent leur BAC, cela devient tout à fait normal, Pardieu! Alors blâmer les associations, les contribuables? Pour cela non, mais pour s’être tus devant l’élection de ces gens, oui, ils sont à blâmer! Que n’a-t-on dit que chaque peuple n’a que les gouvernants qu’il mérite?

Il ne reste donc plus que la Société civile se charge directement de faire le travail au lieu et place des responsables et élus. Cela a déjà commencé puisque nous avons déjà relevé des enseignants qui sacrifient leurs vacances pour peindre leur classe; des retraités qui se proposent d’organiser des cafés littéraires au profit des enfants pour leur apprendre à aimer la lecture, des citoyen-contribuables qui se démènent comme des diables pour organiser un marathon pour faire de Sidi-Bel-Abbès, une «ville belle et verte»
De là que vous revient-il, vous Société Civile? Quelques citoyens de par leur élection monnayée, s’élèvent au-dessus de la République; tandis que vous autres, assistez impassibles témoins, à la lapidation et l’abandon de la fortune et des riches ressources de la patrie.
djillali@bel-abbes.info
(1) Démosthène, Discours sur les réformes publiques. IVe siècle av J.C.