Littérature: Monique Rivet franchit le glacis

 

Il faut dire que cela datait un peu et que Monique Rivet ne se fait pas une gloire d’avoir été publiée par deux éditeurs pourtant prestigieux (Flammarion et Gallimard) à une époque où cela faisait encore sens – je ne me suis pas gêné pour l’interroger à ce sujet à notre rencontre suivante.

C’est à cette époque, il y a plus de cinquante ans, qu’elle a écrit le Glacis, dont Flammarion, l’éditeur de son premier roman, n’a pas voulu – je serais tenté de dire, à cause du contexte politique – et que, dans une insouciance éditoriale peu courante chez les écrivains, elle a laissé dans un tiroir durant tout ce temps.

Le Glacis, c’est donc le roman d’une toute jeune femme – et le récit d’une toute jeune femme, double fictif de l’auteur, envoyé par l’Education Nationale à Sidi Bel Abbès (El-Djond dans le roman), sidérée par l’apartheid sans nom qui y règne et auquel le titre du roman en donne un, « le Glacis », du nom de l’avenue qui divise les deux parties de la ville. Sa maladresse l’amène progressivement dans une situation de plus en plus intenable, une maladresse qui n’est pas tant, à mes yeux, l’effet de sa naïveté de jeune métropolitaine, comme j’ai cru l’avoir lu quelque part, mais plutôt l’expression d’une intégrité, d’une entièreté ai-je envie de dire, qui se refuse à composer alors que c’est la seule manière de survivre dans ce monde en décomposition. Le récit, souvent elliptique, joue des temps, passe du passé au présent comme à un gros plan sur un visage, puis le point de vue prend du champ, on apprend ce qui se passe en même temps et que Laure, la narratrice, sur le moment ignore, apprendra ou comprendra plus tard ; c’est une conscience qui se construit devant nous, prise dans une guerre innommée – on dit « les événements » –, où le hasard se trouve exacerbé jusqu’à son point le plus cruel.

Le Glacis est un beau roman, dont je recommande la lecture ; il touchera aussi bien les lecteurs qui ont des souvenirs de cette époque que ceux qui ont aujourd’hui l’âge de l’héroïne – et même ceux qui se situent quelque part entre les deux, comme moi. C’est un beau roman et, comme dit la chanson, c’est aussi une belle histoire que celle de cette publication – je vous renvoie à l’article très riche de Philippe Lançon dans Libération pour plus de détails. Et c’est une chance car, ayant déjà tenté moi-même en vain de convaincre Monique Rivet de renouer avec l’édition, je sais qu’il a fallu à cette publication un concours de circonstances particulièrement favorable : c’est une chance aussi pour Anne-Marie Métailié que des personnes bien inspirées ait poussé Monique Rivet à déposer son manuscrit à ses bureaux. Une chance et une belle rencontre, comme on a pu en juger jeudi dernier à la librairie Labyrinthes de Rambouillet où l’auteur et son éditrice étaient invitées.

On l’aura compris, j’ai à la fois beaucoup de sympathie et d’estime pour Monique Rivet et son regard clair, au propre comme au figuré. C’est aussi que j’avais déjà eu la chance de lire d’elle un autre texte, encore inédit – une chance que j’aimerais bien partager avec d’autres.

Blog : Hublots

13 thoughts on “Littérature: Monique Rivet franchit le glacis

  1. Bonsoir à toutes et à tous,
    Oui ! Certainement que vous avez raison. En relisant, je crois que je me suis laissé emportée par l’enthousiasme de plaider en faveur d’une bel-abbesiene de première heure. Je retire mes mots. Je suis désolé !

    Il faudrait peut être aussi insister sur le fait que Monique RIVET est différente de ceux qui ont écrit sur SBA comme les nostalgiques revanchards surtout et les( PINGUINS selon mme le Cygne),les pro-colonialistes comme le général Historien Yves Salkin et louis Abadie…… ainsi que le chantre du colonialisme Paul Belat qui a rebaptisé le bd GLACIS du nom de son ami « avenue Charles MAURRAS » et accueilli à bras ouverts dans ce même bd le ministre de l’intérieur de vichy . Pour vous dire que M.RIVET n’aime pas du tout l’ex Maire de la ville Paul BELAT.
    Enfin ! Sidi Bel Abbés est une ville coloniale elle a donc aussi une histoire coloniale. Bcp d’européens à sba ont refusé le système coloniale. Monique RIVET a écrit un roman très spécial !!!

    M.Boualem. Je n’ai pas lu le livre, mais là je parle de la personne qui a écrit le livre ! (Le livre est disponible chez des amis bel-Abbésiens).
    L’ouvrage est basé sur un manuscrit écrit entre 1951-1957(Non publié à l’époque).Ce qui explique que son auteur(e) « cache »certaines dénominations (comme Sidi-Bel-Abbès). Un temps ou régnait la logique coloniale. Un temps ou juste après « personne » n’abusait de parler de « guerre »mais juste « d’événements d’Algérie » ! Donc ! Le roman il faut le mettre dans son contexte chrono.
    Juste un petit détail Mr Boualem ! Le livre a été édité par la même maison d’édition qui a publié les romans d’ASSIA DJEBAR !
    Enfin ! On aura sans doute l’occasion d’en parler (bcp à dire !)dans une autre rubrique.
    Merci à toutes et tous.

    1. MR karim 10 vous vous etes trompé sur toute la ligne je dois vous le dire et votre mémoire vous joue des tours ???? votre enthousiasme aussi donc il faut rendre à césar celui qui lui appartient ? MONIQUE RIVET est une parisienne arrivée à ELDJOND en 1956 . elle avait 25ANS ? elle n’a jamais été à l’école avicenne quartier indigène qu’elle ne fréquentait que rarement accompagnée par une amie arabe sa mère on connait rien d’elle elle vivait à PARIS donc n’était pas directrice de cette école comme vous le dites les deux quartiers étaient séparés les indigènes n’avait pas le droit d’aller au quartier européen monsieur au début elle habitait dans un hotel non fréquentable au centre ville ensuite elle a habité à calle del sol coté rue du soleil qu’elle décrit si bien elle a eu des problèmes liés à la révolution en raison de ses fréquentations son amant était du coté FLN tout ce qu’elle raconte est vrai elle fut expulsé après deux ans passé à SBA qu’elle appelait EL-DJOND ville coloniale et militaire . aujourd’hui elle dépasse les 80 ANS le livre oublié a été imprimé y a pas longtemps par les éditions Métailié à Paris 6eme en 2012 monsieur diffusion par SEUIL en FRANCE bien sur tout ce que je dis a été tiré du livre que j’ai chez moi monsieur quant à cette période je ne l’ai pas connu je suis jeune monsieur une dernière remarque à tous les lecteurs adeptes des mots très souvent utilisés par une lectrice célèbre sur ce site comme PINGOUINS ) ne les utiliser plus ça fait moche et sentent de la HAINE ? à mon avis si je me trompe pas ???? merci

      1. Lectrice célèbre vous dites ! mon œil oui .. ce sont des gens nt3a nidham. De toutes les façons j’en conviens entièrement avec vous my friend sur ce que vous avez dit sur Mme Rivet, elle a passé qu’une année et demi à Sidi Bel Abbes.

  2. J’ai rencontré Monique RIVET dernièrement en France, une femme sympathique. Au tour d’un café long ! On a discuté sur son livre « Le glacis ».Son LIVRE est aussi un document d’Histoire.
    Elle sera triste ! Croyez-moi ! Si elle apprenait que l’école ou elle a passé sa jeunesse tombe en ruine.
    En effet ! Sa mère était la directrice de cette école indigène de la graba je vous laisse deviner son NOM !
    Je ne serais pas étonné si elle décide de taper sur son clavier pour répondre à des commentaires que je trouve un peu pesants ! Parce je lui ai tellement parlé du journal Bel-Abbes Infos. Maintenant je regrette de l’avoir fait !
    Le Glacis, c’était une grande avenue (aujourd’hui du lycée azza….jusqu’à l’école gendarmerie) qui séparait la ville européenne de la ville arabe –El-Graba. Une frontière coloniale ! Ce Bd était une violence disait elle ! Une Rare VIOLENCE ! Oui !

    1. monsieur Karim10
      franchement je ne vois pas d offense ecrit à propos de l ecrivaine et donc je ne comprend pas vos regret

    2. MR karim 10 sans vouloir vous vexer ni quoi que ce soit avez vous lu le livre LE GLACIS ??????? ce qu’elle raconte est différent de ce que vous dites .alors moi je ne comprends rien mr et mon commentaire vous l’avez lu ????

    3. Quand on fait une bonne action, il ne faut jamais regretter….car on ne pourra jamais connaître tous les tenants et les aboutissants de cet acte…..!
      Des commentaires pesants..dites-vous..??!! ! Je n’en vois aucun, concernant Mme Monique RIVET, bien au contraire….!!! Moi personnellement j’ai dit que je respectais cette dame parce qu’elle se respectait……Une femme que je trouve sincère, honnête et franche (sur la base du glacis)…d’autant plus que ce n’est pas un pingouin noir …..!!!
      Au contraire quand elle va lire la BAI, elle sera très contente de lire ce que les indigènes d’antan ainsi que les générations qui ont suivi, pensent du colonialisme Français…car ils s’expriment à leur façon, comme elle s’est exprimée à sa façon dans son livre sur le ‘village Nègre’……!!! Elle entendra au moins un autre son de cloche….qui n’a rien de pesant…..ou elle l’aime ou elle ne l’aime pas…..sans plus….!
      Ne dit-on pas que de la discussion jaillit la lumière, alors peut être que vous vous trompez sur sa réaction…!

      Fraternellement…Mr Karim10!!!!

    4. M Karim,
      Je suis du même avis que Doctorant dans son commentaire ci-dessous et ne vois aucune chose ou propos inappropriés pour que vous regrettiez votre entrevue avec Mme Rivet. D’autant plus que BAI en a déjà parlé à maintes reprises sur cette dame et n’a rapporté que ce qu’elle a vécu ou vu pendant son séjour en 56/57 à SBA.

  3. Sidi Bel Abbès « berceau de la légion étrangère » est souvent évoquée dans les écrits des pingouins noirs ( comme aime les appeler Mme Le Cygne) Il n’y a pas que Monique Rivet qui en a la nostalgie mais un certain nombre comme ”Jeanne Benguigui ” , Pierre Counillon, …. Paul BELLAT, poète adepte de la colonisation. A la fin de sa vie, exilé, en France, en pleine guerre d’Algérie, il la pleure par ce poème:
    Je ne sais ce que l’avenir
    Me réserve de joie ou de peine
    Mais quoi qu’il puisse m’advenir
    Je veux reposer dans la plaine

    Où les miens vont se réunir
    Où mon enfance fut sereine
    Où la muse fut ma reine
    Où mon cœur a son souvenir

    En quelque lieu que je succombe
    O mes amis creusez ma tombe
    Dans Bel-Abbès où je suis né
    Du pays la terre est légère
    Et dans la glèbe étrangère
    Je dormirais abandonné.

  4. LE GLACIS roman écrit dans les années 50 et non publié à cette époque , il le sera bien plus tard de MONIQUE RIVET agrégée de lettres classiques elle a 25ans quand elle est nommée professeur de lettres dans un lycée d’une petite ville de l’oranais en pleine guerre qu’elle ne comprend pas , la désoriente , puis lui fait horreur . cette petite ville qu’elle appellera EL-DJOND qui en arabe signifie le corps d’armée la légion étrangère . LE GLACIS frontière entre le quartier européen et le village nègre cloturé avec des barbelés une large avenue plantée d’acacias la longueur de sa ligne droite et davantage ce nom LE GLACIS qu’elle devait à un fondateur oublié malgré une rue dédiée à son souvenir elle est coupée d’un terre -plein et bordée coté indigène d’une rangée de boutiques arabes ;en 1843 un capitaine du génie militaire avait dessiné le plan en damier elle parle de la ville ou régnait la violence , les évènements , les attentats, les quartiers séparés , son quartier ou on ne parle que l’espagnol qui était très animé traversé par la RUE du SOLEIL que les habitants appellent CALLE DEL SOL. un texte vibrant sobre et vital témoin de son regard de femme très jeune sur une guerre que personne ne voulait reconnaitre . elle n’a jamais prononcé le nom de sidi-bel-abbes , bizarre ? EL-DJOND pour elle . elle nous parle du maire mr TRABAUD celui qui ouvrit le conservatoire municipal aux indigènes , de son amant un français de fraiche date FELIPE , de quelques familles belabbésiennes dont elle cite les noms et prénoms , de ses amies arabes , etc………………….un livre d’une époque difficile pour les deux communautés , un livre à lire pour les vrais belabbésiens ………il nous rappelle ‘une HISTOIRE vraie , vécue par nos parents allah yarhamhoum . MERCI MONIQUE retraitée actuellement . entre PARIS et les CEVENNES .

  5. MONIQUE RIVET ce qu’on appelle une femme avec un grand F à l’inverse des connasses en surnombre sur la rive sud dont les esprits tortueux ne font que du mal , elles sont droles ,défiltrées et odieuses avec ce livre le glacis nous sommes retournés à la belle époque que nous racontaient les anciens vrais belabbésiens allah yarhamhoum ces hommes humbles , simples ,qui étaient heureux AVANT le début de la révolution vivaient en parfaite harmonie avec les autres c’était la petite FRANCE qu’elle raconte et qu’elle a vécu avec son AMANT , Le Glacis flotte dans les points de vue, mélange les temps narratifs, vit par les maladresses qui font sa vertu, son état de découverte et d’innocence froissée : l’Algérie française s’ouvre et se ferme par les yeux et le cœur d’une jeune femme qui ne comprend les choses qu’à mesure qu’elle les vit, toujours un peu trop tard. Ce naturel dans le décalage, dans la perception d’une société par hoquets, surprises et à corps défendant, rend la petite ville coloniale aussi intime que révoltante. (libération) ( j’ai peur des langues de vipères ) Huttes. Elle est retournée en Algérie en 1963, puis en 1988, à la veille des émeutes de la semoule, invitée par les parents d’une élève non-voyante du lycée de Rambouillet. A Oran, «les entrées des immeubles étaient une ignominie, comme si une horde de Huns était passée par là, mais l’intérieur des appartements était impeccable. Sans doute ont-ils hérité ça des Français». Elle n’est retournée à Sidi Bel Abbès que par son manuscrit oublié. Elle y a retrouvé les nuits du «quartier nègre», sauvages, vides, surveillées, celles qu’Ernst Jünger avait déjà décrites : «Les nombreux feux qui brillaient, le mélange des voix parlant toutes sortes de langues, et les ombres obscures qui se mouvaient dans les huttes d’argile, donnaient à l’endroit un air de méchanceté.» un livre que je vais lire merci mr BELDJILLALI .

  6. Je crois que je respecte vraiment cette femme…!!! On sent qu’elle n’était pas comme les autres, elle était différente,…..même des progressistes à la mode….!!! Une femme « rebelle » malgré ses sympathies communistes à cause de son père…qui lui dit un jour en souriant : «Tu verras…» Elle se souvient : «Le Parti n’était pas favorable à l’Indépendance, car il avait là-bas une clientèle…» La guerre d’Algérie, c’est là mais c’est loin… »( PHILIPPE LANÇON 19/01/ 2012)…. …Avez-vous compris…chers clients….?? A la rigueur, achetez mais ne vendez pas…. !!!?
    D’ailleurs, on n’a même pas voulu édité son livre au début, parce qu’il avait la valeur d’un témoignage qui n’allait pas dans le sens des colonialistes.. !!! Elle qui dit: « Au fond, je me dis que c’est par patriotisme que j’étais anticolonialiste »… !
    « Elle finit par nous émouvoir par sa sincérité et sa générosité: elle qui n’avait pris parti pour rien, s’était intégrée à rien et avait vécu dans un splendide isolement… (Magazine Culture 10/02/2012)

    Comment ne pas respecter une Dame qui se respecte, une femme sincère, intègre et consciente malgré son jeune âge à l’époque…. ! Comment ne pas apprécier des propos francs et justes tels que : « Je suis prisonnière de ce pays qui n’est pas le mien, de cette ville sans âme, de cette guerre sans nom… »……… « Ce pays, je ne lui appartenais pas, je m’y trouvais par hasard. J’y étais de guingois avec tout, choses et gens, frappée d’une frilosité à fleur de peau, incapable d’adhérer à aucun des mouvements qui s’y affrontaient »….

    Une femme qui était blasée de voir : « Deux communautés face à face, les « français », militaires, riches familles terriennes implantées de longue date, les indigènes du commerçant aisé à l’ouvrier, au simple manœuvre, à l’ouvrier agricole tous sont considérés comme quantité négligeable même les plus instruits et les plus cultivés. »

    Une femme qui ne comprenait pas et qui voulait comprendre : « Nous avions vu les logements réservés aux ouvriers ; des barbelés les entouraient et j’avais trouvé étrange qu’on mette derrière des barbelés des hommes supposés libres ; réflexion que j’eus la sottise de formuler tout haut et qui m’attira cette réplique de Saragossa : “ils sont tout à fait libres, libres de retourner dans leurs mechtas pour y crever de faim si ça leur plaît. Les barbelés, ce n’est pas pour les empêcher de partir, c’est pour la protection des bâtiments…. »

    Une femme sagace et franche : « Le temps où j’ai habité la ville était le temps de cette violence. Le temps de ce que le langage officiel déguisait d’un intitulé pudique : les “événements”, quand l’homme de la rue disait : la guerre. La guerre d’Algérie…. »

    Un jour, elle entend une mitraillette. Son ami éclate de rire : «Ma petite idiote chérie… Ce sont les cigognes que tu entends !» Quand on confond cigognes et mitraillettes, il est temps de partir……. Plus tard, Monique Rivet enseignera en Alsace.

    Merci, Madame Monique Rivet

    Avis aux Pingouins noirs qui se prennent pour de vrais Belabbésiens…. !!!!

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