Chronique du jeudi : LE CHANGEMENT DU CHEF RÉJOUIT LES SOTS (1)

Jamais changement à la tête d’une structure de l’État n’a fait autant de bruit tant au niveau national qu’international, ni fait couler autant d’encre. La nature du système fait qu’il était indéniable qu’une telle décision ne pouvait échapper aux spéculations  ouvrant grandes les portes à des scénarii à l’orée de l’imaginaire.
Chacun y va de son analyse puisant, qui dans ses sources autorisées, qui auprès de retraités du sérail et de la muette devenus soudain experts en analyse.  Ainsi, tout le monde est allé de son commentaire, du  citoyen lambda à  l’averti des arcanes du pouvoir en passant par les   autoproclamés experts et  chefs de parti politique. On aura alors eu droit à toutes les spéculations et évidemment aux scoops qui vont de la désormais rituelle accusation du Frère du Président de squatter le pouvoir jusqu’à la plus grave des dérives, l’accusation de trahison et d’intelligence avec l’ennemi.  On commence par nous assurer  que c’est un limogeage et non une mise à la retraite;  que c’est une revanche sur les procès qui ont touché les hommes du président; que c’est la mainmise du clan de Bouteflika sur l’Algérie; que c’est une conséquence de la lutte entre les Services et la Présidence;  que c’est même  les prémisses du  retour de Chakib Khelil si ce n’est  un complot pour fragiliser le pays. Autant de supputations gratuites!
Et pour faire plus crédible et plus «hard», on mythifie. Si on ne connaissait de Tewfik qu’une photo (plutôt demi-photo) deux autres sont apparues spontanément juste après son départ. Je parierais mon mouton de l’Aïd que beaucoup d’autres vont apparaître bientôt. Après que l’on commence à localiser avec plus de précision son lieu de naissance qui était un secret d’État, autour de Tizi-Ghennif ou Boghni  au lieu de Guenzet ou Boumerdes ; la démythification de l’ex est fortement entamée, alors que la mythification du nouveau ne se fait pas attendre. Les nouveaux biographes ne se mettent déjà pas d’accord sur son lieu de naissance qui est pour les uns à Oum El-Bouaghi, alors que pour d’autres, il est plutôt natif d’El-Eulma. Les moins affirmatifs disent qu’il est originaire de la ville côtière de Jijel.
La mythification délibérée s’accélère avec la diffusion des images de l’installation du remplaçant de BOUSTILA mais pas celles de l’installation de SI EL BACHIR où la télé s’est contentée uniquement de relater les faits.
Certaine presse ne s’est pas sentie ridicule en imputant ce changement à la volonté de SAIDANI qui a le premier commencé à s’attaquer à cette structure de défense du Pays.
Or, dans le fait, il s’agit d’un simple changement de personnes au sein d’une structure de l’État. Cette structure a beau être spécifique, particulière, relever de la défense nationale, imbriquer dans les secrets d’État, cela n’enlève rien à la «normalité» de l’action. Quoi de plus normal en effet, qu’un Président de la République procède au remplacement du Chef de Département du Renseignement et de la Sécurité ? Il a pourtant depuis sa première élection remplacé des centaines de ministres, beaucoup plus de Walis, des Sénateurs du Tiers Présidentiels, des Magistrats, des Généraux et même des Managers d’EPE. Alors quid de la DRS ? Faut-il à ce point qu’il y ait obligatoirement un mobile «personnel» de «règlement de comptes» et/ou de «lutte de clans» ? Les USA changent de Directeurs de CIA presque à chaque élection, sans que personne n’y voit la raison d’une spéculation et encore moins la naissance d’un mythe.
Le prix du pétrole qui périclite, le pouvoir d’achat qui culmine aux sommets, le dinar qui rase les pâquerettes demeurent mon souci. La corruption et l’ampleur qu’elle prend chaque jour a de quoi m’inquiéter. Les agressions quotidiennes, les crimes, le non-respect du code de la route m’empêchent de dormir. Madani MEZRAG l’assassin traité en personnalité politique et qui déclare vouloir créer un nouveau FIS, est un cauchemar pour moi.  Ce qui s’est passé à la tête du DRS, est somme toute, juste  un changement dans la  continuité d’un système, car l’organe a toujours créé la fonction. Et ce n’est pas aujourd’hui que les adeptes du mythe qui vont pouvoir me convaincre de l’inverse qui consiste en ce que ce soit la fonction qui crée l’organe. Mais, le changement des chefs a toujours réjouit les sots (1)
Aid Moubarek, à tous les lecteurs, y compris à Tewfik et Bachir.

djillali@bel-abbes.infos
(1) Proverbe roumain