Comment ne pas reconnaître que la Pensée d’Ibn Khaldoun dépasse le cadre d’une production conceptuelle diachronique et événementielle pour les historiens, d’une chronique spatio-temporelle pour les férus de littérature « médiévale », enfin de « Prolégomènes » pour les sociologues… ?

Avons-nous su préserver dans notre patrimoine l’héritage académique et opératoire de ce voyageur, cavalier, chroniqueur qui sillonna l’Andalousie et le monde arabo-musulman (1332-1406) et nous livra à travers la Mouqqadima ses enseignements et analyses sur cette Aççabiya (Esprit de clan) que les unités de recherche de certaines universités étrangères ont pérennisée dans leur laboratoire ?

Comment ne pas être culpabilisé devant la diligence du monde anglo-saxon dans cette traduction de la Mouqqadima par Franz Rosenthal en 1958 sous le titre « An introduction to history » où ce dernier qualifie Ibn Khaldoun de génie… ? Huntington n’a pas été un mauvais élève même si il ne sera jamais un orientaliste qui se respecte pour la postérité. Il a seulement alimenté ce scientisme positif US où la recherche tant dans les sciences sociales qu’exactes est sponsorisée par les trusts et groupements bancaires,où l’espistémologie (Philosophie des sciences) est reléguée en l’état de bibliothèque pour enfants…par la haute finance judéo-chrétienne !

La finalité de cet article ne se veut pas une promotion de cette icône de notre patrimoine sociohistorique et de l’universalité que le traducteur français Vincent Mansour Monteil titre en 1967 « Discours sur l’histoire universelle » en ajoutant : « Ibn Khaldoun est fort en avance sur son temps.Aucun de ses prédécesseurs ou contemporains n’a conçu ni réalisé une œuvre d’une ampleur comparable… »

Le cas d’école que représente la marionnette libyenne que voudrait bien restructurer le NATO sans Rommel ni Mussolini…en Tripolitaine et Cyrénaïque est plein d’enseignements khaldouniens sur la Aççabiya tribale qui fût en son temps un processus de passage violent et « mécanique » de la vie bédouine (Badawa)et nomade à la cité (Umran) sédentaire augurant le cycle de construction d’un pouvoir(Mulk) puissant et centralisé pour une période trentenaire…Prémonition khaldounienne ou pronostic analytique basé sur des études de causes à effets avec des milliers d’observations d’époque à classer par les unités de recherche en sociologie politique,psychologie sociale et communication, ethnologie et anthropologie, diagnostic des territoires en montage de projet(GCP)…enfin prospective…et stratégie globale !

La déliquescence de cet état libyen qui vu le boom pétrolier lui ravir un royaume ancestral et des traditions séculaires où le héros Omar El Mokhtar sera nationalisé par une révolution très artificielle aux relents du naphte, est d’actualité avec ce risque de métastases à nos frontières.

La régression de ce qui fût une Révolution de pacotille pleine d’euphorie pour ces sirènes qui sillonnaient les rues de Tripoli en treillis serré pour épater les touristes voisins, en est à son stade final….La Jamahiriya a vécu et sa fin fût dantesque…Les tribus ont souffert et participé à la chute de l’unité libyenne puisque l’Etat-Nation ne pouvait se construire sans un travail social synonyme d’expertise où les tâches essentielles de production, maintenance et réparations étaient confiées à des étrangers,…sans échelle des valeurs nationales dans une armée peu
structurée étouffant sous un suréquipement où le mercenariat remplaça l’esclavagisme des harratines…

La Libye cas d’école ? Certainement car l’OTAN en particulier les américains ont déjà fonctionnalisé les recherches de leurs experts des Hight Schools en Irak déjà en créant les postes d’officiers de communication au niveau de leurs unités combattantes avec des profils de chercheurs sociaux allant de l’historien à l’ethnologue en passant par tous les spin doctors en scientologie…La Mouqqadima d’IBN Khaldoun a-t-elle été mise en laboratoire par les experts de la guerre du pétrole et de l’acclimatation printanière comme l’a été la « Bataille d’Alger » ?

Nous a-t-on volé la Mouqqadima ? Ou n’avons-nous pas su l’honorer et la protéger ?

Par:Mr HOUSSINE Mourad Salim, ex-enseignant en sciences sociales à l’INFSCJS (ex CREPS) d’Aïn-El-Turck/Oran.