Hirak en Algérie : Le vrai peuple contre l’élite qui a trahi.
*Professeur Karim Ouldennebia- Historien – Université UDL – Sidi-Bel-Abbès.
Dans la déclaration d’indépendance des États-Unis d’Amérique, le 4 juillet 1776, il est intéressent de lire dès la première page cette fameuse clause de citoyenneté : « Tous les hommes sont créés égaux ; ils sont doués par le créateur de certains droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur ». Notant que cette traduction que je garde jalousement dans ma bibliothèque depuis que j’étais encore étudiant est celle de Thomas Jefferson lui-même, lequel se flattait d’écrire un excellent français. Ce document de la constitution américaine avec ses 26 amendements (Aujourd’hui 27) constitue il vrai, la loi suprême de ce pays. Son système de type républicain est fondé sur la souveraineté du peuple. Cependant, les pères fondateurs de ce système qui sont représentés au Mount Rushmore par des sculptures monumentales en granite dans l’état du Dakota Sud ce sont rendu compte après, que leur vision de vertu public était utopique. En effet, les hommes « aiment le pouvoir ». Rien à dire là-dessus. Il n’y a qu’à lire l’histoire.
En psychologie des sciences humaines, cette constante tient parait-il au rapport que ces hommes ont avec le pouvoir : ils l’identifient à la vie. Selon Jean-Pierre Friedman, auteur de (Du pouvoir et des hommes-2011). Il leur apparaît comme un gage d’éternité, nous dit-il. C’est pour cela qu’ils veulent le garder à tout prix : « ils ne peuvent accepter l’idée de leur mort ni que le monde peut leur survivre ». Selon cette étude, ces hommes agissent un peu comme des enfants qui sont persuadés que le monde leur obéit.
Il a fallut donc, réunir une « convention » le 25 mai 1787. Dans le préambule de cette constitution on trouve que les mots les plus importants sont les premiers. « Nous le peuple- We, the People ». On découvre ainsi, dès le début de cette citation la bonne réponse à la question posé dans le titre : Que ce que le peuple ? Il est clair que cette constitution s’est fondée sur le peuple et non sur les États. C’est ainsi que les premières idées de John Locke et J.J Rousseau vont émerger en cérémonie luxueuse dans ce nouveau
continent.
Il me semble que les historiens sont bien placés pour savoir que ces notions politiques mais aussi philosophiques n’étaient pas au départ démocratique au sens propre du mot. Il est évident que ce qu’on appelle maintenant le peuple n’avait pas le même sens qu’il a aujourd’hui. D’ailleurs, les femmes, les pauvres, les noirs, les Amérindiens et les esclaves ne votaient pas. Pour dire que durant la révolution américaine en 1776 et la révolution Française en 1789, les libéraux des 13 états indépendants d’un coté et les aristocrates bourgeois de l’autre parlaient au nom du peuple. La souveraineté populaire aujourd’hui repose sur le peuple, qui est l’ensemble des citoyens actuels d’un pays.
On savait déjà que le mot peuple était une notion politique très forte. Cependant, ce même mot aligne uniformément une charge symbolique avec des particularités qu’on peut associer à d’autres notions. Ce mot correspond dès lors, assez bien à l’aphorisme. On se demande d’ailleurs comment se fait- il qu’un seul mot suffit pour dire plusieurs choses à la fois. Nos hommes politiques doivent aujourd’hui, empaqueter le mot « peuple » Algérien et le mot « Nation» en un seul mot. Il faudrait aujourd’hui, insister sur la volonté du « vivre ensemble ». Même si le mot Nation vient du latin «natio » qui veut dire (naitre), dans son texte référence (1882) E. Renan avait raison de dire que ce qui constitue une nation, ce n’est pas de parler la même langue, ni d’appartenir à un groupe ethnographique commun. Mais, c’est plutôt d’avoir fait de grandes choses ensemble et vouloir en faire encore et encore dans l’avenir. Cette vision est la « notre » si l’on observe bien la proclamation du premier novembre 1954. En effet, personne en Algérie, ne peut dire : « L’état, c’est moi ». Mais, tout le monde peut dire que: « Le peuple seul est souverain ». Pourquoi ? Tout simplement, parce qu’il y a une constitution qui est la base intangible des institutions. Cette idée d’état de droit que je qualifierai d’américaine est à la base même de la crise Algérienne aujourd’hui.
Le moment est venu pour le peuple Algérien de reprendre en main les affaires du pays et mettre ainsi fin à la prévarication coupable des «élites politiques et surtout économiques» qui font la pluie et le beau temps à Alger. Rappelons-nous Donald Trump, disait la même chose dans sa campagne électorale. Absolument, seul contre tous, la presse, le congrès américain et quelque lobbys finalement, ne peuvent à eux seuls contrecarrer la volonté du peuple. Et si l’on croit ce président que certains présentent comme fou ! Dorénavant, le peuple avec son président vont refaire l’histoire.
Curieusement, c’est le contraire qui est entrain de se passer en France avec la crise des gilets jaunes. J’ai lu un article sur RT le 23 mars dernier, m’informant que Bernard-Henri Lévy proposait à E. Macron de ne pas tenir compte des votes qui ne lui plaisent pas (Comprendre du peuple). N’est ce pas paradoxal ! Cela m’a fait réagir à écrire cet article. Il me semble que D. Trump n’est pas fou. Tout au contraire, il défend le « vrai peuple américain», autrement dit la rue. On se rappelle tous comment la Suisse avait réglé le problème de construction des minarets par un référendum le 29 novembre 2009. La puissante chaine Qatarie d’Al- Jazeera et l’O.C.I ont sont restés bouche bée devant ce retour au peuple. Voilà un bon exemple de ce que j’appellerai un état de droit.
Les Algériens ont compris depuis 1962, ou du moins une partie de leur élite que beaucoup de choses restaient à compléter ou disons à achever. Parmi ces questions, la « souveraineté nationale » et la « souveraineté populaire ». Le partage entre les deux est bien évidemment compliqué.
L’article 102 de la constitution pose justement ce difficile problème. On sait que la nation est une construction historique du sentiment d’appartenance d’un peuple à une identité commune. Mais, pour ne pas sombrer tout de suite dans la polémique de que ce qu’un état ? Et que ce qu’une nation ? Contentons-nous pour l’instant de citer quelques titres comme exemples ; la Belgique, Canada, Grande Bretagne, l’Espagne pour dire qu’on ne peut comparés ces pays à l’Algérie.
Par le Professeur Karim Ouldennebia- Historien – Université UDL – Sidi-Bel-Abbès.