L’Algérie, par sa diversité naturelle, est une destination de prédilection pour plusieurs espèces d’oiseaux migrateurs. Cependant, ces dernières années, de belles races tardent à rejoindre notre pays qui, habituellement, est leur lieu d’habitat et de nidification.A l’inverse, la prolifération des décharges publiques et «privées» déroute aussi bien nos compagnons terrestres que les ailés. Pour rester à l’est du pays, la décharge publique de Aïn Smara, près de Constantine, en est le parfait exemple. Il faut en convenir, avec l’autre décharge du côté de la nouvelle ville, la seyante Cirta frôle la catastrophe écologique. De même, à Alger, la décharge publique de Ouled Fayet attire toutes sortes d’oiseaux «mastodontes», chassant ainsi les petits rouges-gorges, les tourterelles et les «gentilles» alouettes. Les goélands, plus communément connus sous l’appellation de «Tchou tchou maleh», notamment à Alger, qui ne dépassaient guère les alentours du port d’Alger et ne s’aventuraient que rarement à l’intérieur de la citadelle et des terres, ont, depuis peu, abandonné leur «vital» rivage pour élire domicile du côté de Ben Aknoun et d’El Achour (situés à quelques encablures de cette décharge à vol d’oiseau) gênants ainsi la quiétude des serins et des rossignols de la vaste forêt du parc zoologique et du bois de Boulogne d’Hydra. A Oran, même s’il se fait rare, on retrouvait le goéland du côté de l’île plane (appelée Paloma par les Oranais) ; néanmoins, depuis quelque temps, il s’aventure jusqu’à Es-senia, tandis que d’autres variétés sont balancées entre l’ancienne décharge publique d’El Kerma et la soi-disant nouvelle de Hassi Bounif. Ces dernières, en plus de la Sebkha, détrônent la forêt oranaise de M’sila et les hauteurs de Santa Cruz ; elles seraient responsables de cet inconvenant déplacement. Concernant cette race ainsi que les mouettes, oiseaux familiers des côtes et des ports, d’après certaines constatations, ils seraient de plus en plus nombreux à nidifier à l’arrière des villes portuaires, telles que Mostaganem, Béjaïa et Skikda. Pire encore, passant à l’offensive, ils attaquent même des personnes, comme cela a été rapporté dernièrement par la presse, où un homme a été dangereusement blessé par des goélands en furie. A Jijel, leur témérité les pousse jusqu’à «négocier» certains espaces urbains constituant de ce fait un réel danger pour les enfants. Pour revenir au milieu du pays et à la pollution du «milieu», le dernier cas en date est le cri d’alerte lancé par des citoyens pour demander la fermeture de la décharge sauvage dans la localité de Harbil, près de Médéa, qui ne cesse de s’étendre en superficie, alors que la région était un joli coin «fleuri» où on dénombrait toutes sortes d’oiseaux floricoles. Même l’antique quartier Draâ Smar (ex-Lodi) qui s’est transformé en décharge de proximité, a vu son «boulboul» disparaître. L’insalubrité et la dégradation de ces joviaux lieux de Médéa ont malheureusement appâté plusieurs animaux nuisibles, entre autres les rapaces qu’on rencontrait plutôt entre les falaises et les rochers des gorges de la Chiffa. Comble de ce bouleversement, des canaris et même des perruches auraient été aperçus dans le sud, plus exactement dans les oasis d’Ouled Djellal et de Sidi Khaled, près de Biskra. ironie du sort, le saint patron de la ville de Biskra dont le mausolée s’érige au milieu de l’oued qui partage la ville en deux rives sans être emporté, à travers des siècles, par les crus, d’où son surnom «Kassam El Widane» s’appelle bien «sidi… Zarzour» (l’étourneau) ! Les oiseaux et leurs œufs : entre spiritualité, morale et mythes Ainsi, quand les hommes de l’éléphant «Ahl al fil» s’apprêtaient à détruire la Qaâba, Allah, le tout-puissant, a détourné leur stratagème en envoyant contre eux des bandes d’oiseaux «Tayaran ababila», qui leurs lançaient des pierres d’argile «hidjaratin min sidjil» (Sourate El Fil : «l’éléphant»). Allah les a rendus comme des chaumes mâchés. Sur un autre plan, tandis que les anciennes civilisations ont vénéré l’oiseau, la mythologie et les croyances lui ont donné plus de sens. Le sphinx ainsi que le fabuleux phénix, oiseau qui renaissait de ses cendres et qui depuis s’est vu attribué, par la culture occidentale, le symbole de la renaissance, confirment que cet ordre volant a marqué l’esprit humain de son empreinte. Même leur déjection, tombée du ciel, la «fiente» est considérée comme un porte-bonheur. Pour nos aïeuls, arabisés et de préférence noir, le coq «symbole de la France» les accompagnait lors des visites rituelles (ziyara) à la «qobba» et chez l’autre taleb (non pas celui de la médersa), pour y être sacrifié. On le sacrifiait aussi pour chasser le mauvais œil, lors de l’achat d’un nouveau carrosse et par la suite du véhicule automobile ; le mouton étant sacrifié pour le nouveau gite (El aâtba Jdida). Dans certaines contrées, le sacrifice du coquelet était pour faire honneur aux invités. Quant aux légendes qu’on apprenait autrefois à l’école, elles nous rappellent, à travers la poule aux œufs d’or, l’économie et la consommation véhiculées par la «ponte», mais aussi et surtout la richesse tant convoitée par l’homme. L’œuf, produit liturgique, représente dans les coutumes algériennes, l’offrande, la fertilité de l’homme et de la femme, tandis que les rapports de communion et les visites entre les membres de la société, particulièrement dans nos campagnes et montagnes, ne pouvaient avoir lieu sans le panier d’œufs. Mais, depuis, même dans le milieu champêtre, le panier et par la suite le plateau d’œufs ont été remplacés par la boîte de… pâtisserie ! Notons aussi que plusieurs écrivains et poètes algériens ont rendu hommage à nos amis plumés. Ils font référence, dans les titres de leurs œuvres et par leurs «plumes», à l’espèce comme Les hirondelles de Kaboul de Yasmina Khadra, Les alouettes naïves de Assia Djebar ou encore L’oiseau et le grenadier, un conte de Rabah Belamri. Aussi, plusieurs proverbes prennent l’oiseau comme sujet et malheur à la femme qui sera traitée de «Bécassine», oiseau connu pour sa stupidité et à l’occidentalisée qui se verra, avec l’âge, apparaître une inesthétique patte «d’oie» sur le visage. Toutefois, sans avoir une tête d’oiseau ou être traité par tous les noms d’oiseaux, c’est toujours bien d’être libre comme un oiseau ! Par ailleurs, beaucoup de régions et lieux-dits de l’Algérie, voire même une wilaya, gratifient l’oiseau en portant son nom. On peut citer à titre d’exemple: Naâma, Djebel «Ossfor» à Tlemcen, Oum Tiour à El Oued, Aïn N’ssour à Aïn Defla, Aïn Lahdjel (appelée aussi H’djila) à M’sila. Quant aux quartiers de nos villes, la culture de la chawarma «dinde» à la mayonnaise s’est imposée aux coins de chaque ruelle. L’oiseau et l’enfant Et dire que l’ancienne Hadika Essahira a, jadis, formé et éduqué beaucoup de «poussins» qui sont des femmes et des hommes aujourd’hui (Qui se souvient, aussi, de Mama Nedjoua et de la belle histoire du regretté H’Didwane avec Kebbab Salim |