Il n’y a pas longtemps, un milliardaire américain connu pour se donner bonne conscience en contribuant à des œuvres caritatives faisait ce constant édifiant:
La lutte des classes existe et c’est nous les riches qui sommes en train de l’emporter. Le triomphe de Trump n’est que la dernière des illustrations de cette contre-révolution dans laquelle des oligarques mondialistes ont agi en coulisse pour tuer l’espoir en la politique, et en détruisant la croyance populaire dans les changements issus de la mobilisation populaire.
La classe ouvrière a d’abord été laminée psychologiquement car elle refusait de s’identifier à sa condition d’exploitée pour se raccrocher au rêve distillé par les euphémismes de langage et les modèles de réussite . La classe laborieuse s’auto-dénigrait et se rêvait moyenne. Elle achetait le rêve de réussite individuelle qui lui été raconté. Conte pour enfants crédules ou adultes lobotomisés par la communication ‘politique’, les événements qui ont vu Trump occuper le bureau ovale déroulent un fil qui commença en Angleterre en 1975 avec l’élection de la Dame de fer, Margaret Thatcher à la tête du parti conservateur.Dans les années qui suivirent elle appliquera le programme conservateur néo-libéral le plus extrême qui affirmait l’absence de société organisée et solidaire, et sa disparition au profit de l’individu, dont les mérites seuls lui permettraient de s’élever dans l’échelle sociale.
La bible de la Dame de fer s’appelait ‘ La Constitution de la Liberté’ , livre écrit en 1960 par son gourou Frédérik Hayek qui préparera également l’arrivée de Donald Reagan qui vivra deux mandats triomphants au bureau ovale.Hayek recyclera les théories du darwinisme social en soulignant que seul l’individu le plus adapté se devait de réussir et d’influencer le sort de millions de ses concitoyens.
Le ticket Reagan-Tatcher enleva toutes les barrières et régulations,démantela l’État providence hérité de l’après guerre et décrétera le Marché comme seul Dieu dont les mains invisibles seraient présentes pour apporter des correctifs à la marge. Cette dérégulation sauvage a provoqué la crise systémique grave dans laquelle se débat le Monde.La hiérarchie des winners et celle des losers telle que définie allait devenir le cadre de référence de l’action politique de deux pays majeurs du monde occidental et de leurs satellites.
La répartition et la redistribution des richesses, notamment par les politiques sociales de solidarité et l’impôt devenaient tabous et archaïsme aux yeux des néo-libéraux, maîtres incontestés du Monde.La recherche du bonheur, « The pursuit of Happiness » ne fixait plus comme horizon que la quête effrénée pour les richesses.
En Chine, Den Xa Ping, lancera le slogan « Devenez riches » qui sera le linceul du maoisme et le réveil du capitalisme dirigiste chinois.
Avant de « rouiller », la Dame de fer allait laisser une empreinte durable sur le programme politique libéral.
Par exemple, Tatcher imposera la Poll Tax, impôt forfaitaire par tête sans tenir compte du revenu, ce qui favorisera les gagnants du système qui échappaient aux impositions vécues comme confiscatoires.Elle fermera les universités qui n’avaient pas de collaboration avec l’Entreprise , voyant dans ce seul critère leur inadéquation ou adéquation au marché. Le marché devenait Dieu Unique du Néo-libéralisme.
À titre personnel, j’ai connu ces années de la dernière décennie des années 80 et vu de nombreux universitaires et chercheurs de grand niveau plier bagage, pris dans un grand mercato qui fit les beaux jours des universités américaines et canadiennes, saoudiennes notamment.
Le Prof Nigel Grant, grande sommité intellectuelle, et à un je rends hommage (ayant appris tardivement son décès) fera les beaux jours d’une université de Singapour. Cet érudit, fidèle à la classe populaire dont il était issu, et qui parlait 18 langues avait une détestation profonde pour Tatcher qu’il appelait toujours la parvenue (ses parents étaient boutiquiers). Beaucoup d’autres, moins prestigieux seront débarqués, réduits au chômage ou devenant publicitaires pour mettre de l’huile dans les rouages de la consommation. Rien ne se crée, tout se transforme disait déjà Lavoisier!
La révolution néo-conservatrice avait ses bataillons de lobbyistes,de Think Tanks royalement financés par les milliardaires pour écrire une narration, type doxa qui devenait coutumière aux oreilles et inventait l’hégémonie démocratique’ qui ne laisse aucun espoir à la politique.
La liberté absolue d’entreprendre et de devenir astronomiquement riche se devaient de porter au pouvoir des exécutants zélés de cette politique, négatrice du lien solidaire entre les gens.
Le magnat qui réussit, devenait la figure légendaire à émuler sans s’interroger sur les mécanismes de cette richesse et des vies broyées qui en résultaient. L’avatar Trump a appliqué ces recettes à la lettre.
Les riches sont bons communicants et se donnent un image de philanthropes aidant la recherche et les déshérites pour nous montrer le doigt qui escamote la pleine lune qui cherche à nous alerter dans l’obscurité.La rente devenait l’étape qui suivait l’accumulation primitive des capitaux et cette rentabilité ne pouvait qu’être optimisée par le basculement dans la spéculation, la financiarisation de l’économie qui mutadis mutandis se muait en économie mondiale casino.
Ses déboires ne dissuadent personne et Trump , tel un coucou suisse bien réglé, à l’heure néo-libérale se pointe tel….qu’imprévu!
L’argent des riches est protégé par les mercenaires entrepreneurs ou intellectuels prostitués dont la pire engeance se trouve être ce journalisme dévoyé qui rameute le pauvre pour qu’il matraque plus pauvre au profit du toujours plus riche.
Le reaganisme, le Tatcherisme et le Trumpisme ne sont pas des idéologies de plein droit mais des facettes du néo-libéralisme ravageur, fauteur de guerres et de la victoire des réseaux qui ont fait la mondialisation malheureuse.
Clinton et Blair capteront la sensibilité de gauche pour l’enrôler dans ce combat douteux et à la sortie, ils sont récompensés en millions pour blablater dans de pseudo-conférences rémunérés au-delà de tout entendement.
la bête politique a un prix. Il suffit de le connaître.
La troisième n’existe pas; c’est une impasse programmée.
Obama avec son ‘Yes, We Can’ n’était qu’un bonimenteur, trop honteux d’endosser le récit.Le résultat est connu: désaffiliation, perte de foi en la politique traduite par le nombre croissant de gens qui ne déplacent plus pour
voter et les tentatives de Démocratie horizontale dont la seule visibilité est l’occupation de places symboliques et de protestations vocales.
Le journalisme a une mission: éduquer, alerter et informer.
Faillir nous sera reproché!
EL-HANIF
En tout cas l’Amérique est fille de l’Europe et surtout de l’Angleterre en cela elle n’a rien inventé. Et même si ce phénomène historique relève du monde anglo-saxon le divorce quasi complet entre les deux concepts existe bel et bien. Faudrait-il marquer la rupture avec le « libéral » et ne parler que du « néo-libéral » ?
Mais, alors si le néo-libéral n’est plus exactement le libéral et si la charité, n’est plus de charité, en étant remplacé par la philanthropie néolibérale moderne. Normalement, la charité consiste à donner quelque chose à quelqu’un, sans attente de contrepartie. MAIS, ce n’est pas l’avis du bouclier fiscal libéral US. Ainsi tu donne 100 M$ revient à n’en payer que 60M$. Donc, l’inégalité devient une structure légale ! Et le verbe payer (ses impôts) remplace le verbe « donner » (aux pauvres) même s’ils n’ont pas la même terminaison.
Obama à donc failli aux règles du système! Victor Hugo lui, n’avait pas tout à fait tord, puisqu’il voyait la charité comme une assurance-vie. Karl Marx, quant à lui avait tord de se prétendre scientifique.
Mais, au final, ce n’est pas ce qui importe. Voici venu le temps de se mettre en rang. Après le temps des Ford, Rockefeller et consorts. L’histoire continue ….. De ’armée du salut à Davos et Porto Alegre et ses multiples ateliers… De quoi sera fait demain ? Aujourd’hui encore la fondation bill Gates se conduit comme un état. N’a-t-il pas visité l’Elisée le 10 oct. 2012.
L’histoire nous apprend que le néo-libéralisme détruit l’État-providence. Comment expliquer tout ça aux pauvres ! Les journalistes présents deviennent de plus en plus des journalistes invités. Les conséquences désormais seront des phénomènes inévitables qu’il faudrait accepter.
Quelle sorte de piège nous prépare ce néolibéralisme ? Quel sera son nouveau territoire de « chasse » ? L’endettement ? Régulation de l’économie ? L’eau ? Ou alors les services sociaux tels la santé et l’éducation, la sécurité sociale peut être et les activités culturelles ?
Ce néolibéralisme ne peut avoir de projet pour les perdants.
Merci Al-HANIF pour ces articles vraiment super !