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Les Lundis de l’Histoire: En 1859 : Les Juifs et les Noirs plus nombreux que les Béni-Ameurs à Sidi-Bel-Abbès!

ByKarim OULDENNEBIA

Sep 29, 2014

L’histoire démographique de la ville de Sidi-Bel-Abbès demeure source d’interrogation, sur des points essentiels : Quel était le nombre de la population autochtone lors de la construction de la ville ? Quelle a été la conséquence de la guerre de razzia de l’armée d’Afrique et la politique du cantonnement sur toutes les sections de tribus ? Combien d’indigènes de la région de la Mekerra ont-ils émigré au Maroc ? Quelle a été l’ampleur des grandes épidémies ? Quel était l’impact de la catastrophe démographique des années 1860-1869 sur la région ? Ce lundi, du moins cette «année là » on va s’intéresser à «la démographie historique », qui étudie les comportements et les structures des populations du passé. Surtout ne pas confondre avec l’Histoire des Populations qui est plutôt du domaine de la géographie. L’Histoire et les chiffres, du coup l’attention du lecteur se porte sur les premiers habitants de la ville. Notre mémoire étant habituée à ce que les Noirs et les juifs ont toujours constitué une minorité. Pourtant, il semblerait, que ce n’est pas le cas ici ! Je demanderai donc aux lecteurs (trices) avant tout de « relever » : Le titre, les mots clés, la période et la date, l’unité de mesure et bien entendu la source.

I – Les Stats comme documents de l’Histoire.
Les recensements existent depuis l’antiquité mais ce n’est qu’avec l’avènement de l’État -Nation qu’il deviennet un des objectifs fondamentaux de la planification notamment coloniale comme la conscription militaire, l’impôt, les questions économiques et la richesse de la population toute confondue. En 1859, la ville de Sidi-Bel-Abbès, était de fondation récente. C’est-à-dire depuis 1849. A peine, une dizaine d’année déjà ! La cité imaginaire de part ses remparts en construction (rappelons nous des quatre portes 1854-1855) était une véritable ville multiethnique selon le dénombrement de cette année (pour ne pas dire le recensement). A forte domination espagnole, cela tout le monde peut le comprendre ; Mais, ce qui n’est pas intelligible sont incontestablement mais aussi paradoxalement les chiffres des minorités notamment : Juifs, Arabes et Noirs ! Ce qu’il nous faudrait pour ce lundi. C’est d’abord « Calculer » et « Observer » les évolutions en pourcentage et en valeur absolue. Il s’agit ici du pourcentage. Le taux d’accroissement (pourcentage d’augmentation ça sera pour une autre fois) .Il se calcule en appliquant la formule suivante: [(x2 – x1) : x1] x 100. Ensuite « Comparer » et extraire l’idée générale et les faits importants et puis extraire les idées secondaires et enfin « expliquer » les faits. Jusqu’au XIXe siècle, on peut affirmer que les chroniqueurs, diplomates, médecins, voyageurs, explorateurs, géographes….. Mais aussi des maires ,  ont souvent proposé des estimations de population relativement sérieuses, utiles et intéressantes. Mais, ils n’indiquaient pratiquement jamais les méthodes et les justifications de leurs évaluations. C’est le cas de notre ville. Les autochtones ici ignoraient le recensement.

Les seuls « documents historiques sources» au sujet du mouvement de la population dans toute l’Algérie avant l’ère de la DEMOGRAPHIE sont de nature fiscale. L’Algérie, qui a une longue tradition de recensements, héritée de la colonisation : Et cela depuis 1856 (Avec 21 dénombrements un record dans les monde Arabe et en Afrique).

Peu de recherches, les historiens le disent, ont été menées sur ce passé statistique. La reconstitution de l’évolution historique de la population de la région de Sidi Bel Abbès souffre du caractère extrêmement déficient des données démographiques dans cette région. En règle générale, avant l’instauration du » recensement colonial », c’est-à-dire au mieux vers la fin du XIXe siècle, les chiffres de population sont rares, et on manque totalement d’indices précis et fiables qui permettraient d’en apprécier la qualité. Si le Colonel Churchill, nous évoque le chiffre de 2400 cavaliers des Beni-Ameurs dans l’armée de l’Émir, l’éminent chercheur Jacques BERQUE, lui nous livre sa méthode qui consiste à multiplier le nombre de cavaliers par 30 pour parvenir au total approximatif d’une tribu d’Afrique du nord à cette époque (Un cavalier pour trente habitants).

II- Les Habitants de la ville de Sidi-Bel-Abbès en 1859.
Les chercheurs en démographie ont prit conscience qu’il fallait prendre du recul et revenir au « passé ». Ainsi,  est née cette discipline. Il faut préciser que si la démographie appartient de plein droit à la géographie, la démographie historique est à la base, à l’Histoire. D’ailleurs, géographes, sociologues et mêmes juristes s’intéressent aujourd’hui de près à la démographie historique. Lire un tableau « historique » , c’est donc faire sans cesse un aller et retour entre présent et passé, chacun éclairant l’autre et réciproquement. La compréhension que nous avons de notre présent guide la façon que nous avons de nous intéresser aux événements passés. Les Statistiques sont donc aussi des documents de l’Histoire. Même si ce passé est envisagé sous l’angle de la question qui lui a été posée au présent. Pour les dénigreurs professionnels des statistiques, on peut leurs affirmer que cette démographie Historique dépasse largement le cadre de l’analyse statistique puisqu’elle nous permet d’étudier les phénomènes affectant les populations dans une perspective globale.

A – Observons les deux Tableaux suivants concernant la ville – Année 1859. Tab 1

Tab 2
B – Explication en résumé (Les chiffres de l’année 1859).
1- La Problématique principale concerne bien entendu l’année 1859. Vous trouverez une étude plus détaillée que j’ai publié en 2005 –Histoire SBA tome2. (Les enjeux politico-démographiques dans la région de Sidi-Bel-Abbès à l’époque coloniale 1830-1962)  notamment parce que la région est un exemple type de la colonisation de peuplement.

2- La terminologie en juxtaposition avec d’autres termes prend en considération les sources documentaires telles quelles notamment : Les mots Arabe, Nègre et en particulier le mot « Israélite » plutôt que juif.

3- Les origines de la population on les trouvent dans le langage local Bel-Abbésien. On peut facilement remarquer la diversité et l’apport de plusieurs langues à coté de l’amazigh, l’arabe, le turc (Khorda,Zerda,Zaouali…)et …(L’espagnol = Ch’kara,Mariyou,Likhiya (javel)….L’Allemend =Akh, c’est-à-dire Attention. L’Italien =K’medja,Trolley…..Le Russe = Taïga (grande) L’Hébreu (Hay-Haya,Hayloula)!!! Il est évident que ces mots sont nés ici vu les circonstances historiques.

4- Il me semble que le mot noir soit devenu moins tabou. En 1859, alors que les théories raciales étaient très répandues, le terme « nègre » était associé à la notion de race noire, le plus souvent originaire d’Afrique. Notons aussi, que même au XX° siècle, la notion de Noir a été utilisée dans les théories raciales et dans les lois des États basés sur la distinction entre races. Les études scientifiques, fondées sur la génétique, ont montré que le concept de « race » n’est pas approprié pour caractériser les différentes populations de l’espèce humaine. On comprend pourquoi certains Historiens préfèrent le mot anglais « Black ». Donc, le nombre de noirs à Sba en 1859, était très élevé en comparaison du moins avec celui des «maures ». Quelle explication ? C’est vrai que le quartier « Gambetta » aujourd’hui Larbi Ben M’hidi abrite un nombre important de noirs. Sans doute issus de la confrérie Aissaoua (par les disciples de Sidi Mohamed Ben Aissa) venus du Sud ou les « G’naouas » une génération de Subsahariens musulmans installés au Maghreb.

5- Le nombre d’Arabes qui était de 102 habitants est étonnamment très insuffisant. Pourtant les Béni-Ameurs et autres sections de tribus comme les Hasasnas et Djaafra et Hamiyannes étaient très nombreux ! Alors, comment peut-on expliquer cette baisse très nette ? Assurément parce que la politique du cantonnement à l’époque du second empire avait obligé les Béni-Ameurs à rester loin de la ville ; Sincèrement ; je ne vois pas d’autres explications ! Un ami que je respecte énormément (et que je salue) m’avait déjà orienté vers cette optique. Il avait donc raison.

6- Enfin, concernant le nombre des juifs à Sidi-Bel-Abbès qui était de 391 habitants. C’est à dire plus que les autres autochtones réunis. Ils seront 427 en 1877 ils seront encore plus lors de la révolte anti-juive à Tlemcen en 1888 .Le nombre sera de 1250 en 1912. La question se pose. Sont-ils venus de Tlemcen ? Probablement. La définition du juif indigène, mise en place en 1871, après la promulgation du décret le 24 Octobre 1870, les englobait en effet au sein des autochtones, puisque nés in situ (sur place). Le recensement de 1872, permit de comptabiliser 34 574 juifs indigènes auxquels il faudrait ajouter 5 238 étrangers, Tunisiens et Marocains dans toute l’Algérie.

7- L’histoire nous révèle qu’on ait pu distinguer trois sous-groupes distincts parmi les Juifs d’Algérie, qui se sont mutuellement influencés et mélangés avec le temps : Les tochavim (en hébreu les indigènes). Les megorachim (les chassés) de culture séfarade, venus de la péninsule ibérique et enfin les juifs de Livourne arrivés au XVIIe siècle .Concentrés dans les grandes villes dont Tlemcen justement et ayant une situation économique aisée.

8- La majorité des juifs de Sidi-Bel-Abbès habitaient déjà les grands centres urbains comme Oran, Alger, Constantine et Tlemcen mais aussi un grand nombre de bourgades d’Algérie. Donc, ce nombre assez élevé n’est tout de même pas une surprise. Toutefois,  la bataille DEMOGRAPHIQUE en 1859, venait juste de commencer ! Quelque trente ans plus tard, les données de l’état civil en Algérie fournissent quelques clés sur l’ampleur du mouvement migratoire et l’exode en direction de cette ville. Sans compter les étrangers devenus français de quelque façon que ce soit : naturalisation, mariages, bénéficiaires du principe du jus soli du 26 juin 1889 qui faisait d’eux, sauf refus de leur part à leur majorité, des citoyens français à part bien sur les « Indigènes musulmans ».

Conclusion : Peut-on se fier à ces statistiques? Statistique Générale de l’Algérie (SGA) puis Annuaire Statistique de l’Algérie (ASA) restent des sources incontournables. De toute façon on n’a pas le choix. Peut-on conclure que les juifs de Sidi-Bel-Abbès ; après avoir changé leurs statut on été derrière l’ouverture de la cinquième porte puisqu’ils étaient en nombre important dans le quartier El-Graba ? Les Statistiques le prouvent ! A mon avis. Non ! Tout simplement parce que l’Histoire n’est pas une science exacte.

AL-MECHERFI.

By Karim OULDENNEBIA

Nom & Prénom : KARIM OULDENNEBIA Nationalité Algérienne - Situation familiale : Marié, père de quatre enfants Adresse professionnelle : Fac- Sciences Humaines et Sociales – BP 89 : Université Djilali Liabes/ 22000 - ALGERIE Domaines de recherches : Sciences Humaines –HISTOIRE. Faculté des Sciences Humaines et Sociales - Djilali Liabes University of Sidi Bel-Abbes, Algeria

One thought on “Les Lundis de l’Histoire: En 1859 : Les Juifs et les Noirs plus nombreux que les Béni-Ameurs à Sidi-Bel-Abbès!”
  1. Autochtones minoritaires en 1959 dites -vous et si cela s’avérerait vrai ,il ne fait que confirmer la règle observée aujourd’hui même si la composante sociologique a changé pour d’autres considérations.
    Compte tenu de l’absence de personnalité du bélabésien ,traduite par la vacance dans la conduite des affaires du bled ,contrairement aux autres régions du pays où l’identité est plus ou moins préservée ,les anciens trouvent des difficultés à se dire des bélabésiens authentiques qui ne signifie,dans le fait , pas grand chose.
    Si un moment,notamment au début de l’indépendance , cette notion de bélabésien pouvait signifier quelque chose,elle s’estompait au fur et à mesure d’une migration incontrôlée voire encouragée car les zazous bélabésiens préféraient poursuivre leurs rêves ailleurs pour affirmer leur émancipation laissant la place vide aux parvenus qui ont encadré la ville en tout point de vue,quelque fois dans un silence assourdissant pour mieux anesthésier les fêtards qui ne leur reste que leurs yeux pour pleurer;le résultat est plus qu’édifiant:alors parler d’autochtones relève de l’absence de lucidité.

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