Un mort c’est un drame. Dix morts c’est un drame. Cent morts c’est des statistiques.
La légende attribue ce constat terrifiant au leader soviétique Lénine, le théoricien initiateur de la révolution bolchevique. Cette révolution qui a fait des millions de morts. Tellement de morts que la mort a perdu son sens. Que les sens sont devenus insensibles à la vue d’un cadavre, fut-il décapité, fut-il déchiqueté, fut-il celui d’un enfant mort jeté sur la dépouille de sa mère.
Cette arithmétique de la mort nous aussi nous l’avons vécue. Nous aussi nous avons commencé par un premier, puis par des dizaines, puis par des centaines et nous avons fini par deux cent mille morts. Nous aussi nous avons pleuré les premiers décédés, puis nous avons apprivoisé la mort, puis nous nous sommes acclimatés au sang qui coule, puis à faire le décompte macabre de nos cadavres.
Nous aussi nous avons connu notre cycle monstrueux ; notre printemps berbère et notre hiver arabe. Nous avons eu l’horreur d’ouvrir le bal des danses funèbres. Les premiers chrysanthèmes sont plantés sur nos tombes. Les premiers ateliers de bombes artisanales et des apprentis terroristes. Le premier feu d’artifice dévastateur de l’aéroport Houari Boumediene inaugura une liste infinie d’attentats faiseurs de morts, de veuves, d’orphelins et d’estropiés.
Nous aussi nous avons nos Cabu, Wolinski, Charb, Tignous, Honoré et Maris. En plus sérieux, en plus désintéressé, en plus sincères. Lyabes, Djaout, Alloula, Flici, Boukhoubza, Fethallah, Mekbel, Medjoubi… et la liste est trop longue. Belles âmes et courageuses plumes qui ont pris des balles dans la tête et nous dans le cœur. Qui ont crié « no passaran », à Alger à Oran et partout en Algérie et ils en sont morts, victimes d’une solution finale, à plus grande échelle, avec comme objectif de leurs assassins « d’éradiquer toute l’intelligentsia d’un pays, comme s’il s’agissait d’une mauvaise herbe ou d’une maladie » et avec le projet de « décerveler un pays ». C’est en ces termes que s’est adressé Rachid Mimouni à l’opinion publique française (Le Monde du 18 mai 1994). Sans émouvoir grand nombre. Sans provoquer des larmes. Sans réunir quelques grands, ou petits, de ce monde, dans une place quelconque, pour faire barrage au terrorisme et sauver la liberté d’expression, la liberté de la presse, la liberté du culte, les droits de la femme le droit des chats et des chiens et toutes les libertés que peut contenir une charte internationale. Comme si les 17 morts de Paris valent plus que toute cette racaille de milliers de morts d’Algérie, de Syrie, d’Irak, d’Égypte, de Tunisie et de Libye. Comme si la parole libre ne doit être sauvegardée que dans l’autre rive, alors que le meilleur hymne c’est Djaout qui le lui a composé, subissant l’acte assassin après l’écrit audacieux : «si tu parles, tu meurs, si tu te tais, tu meurs, alors écris et meurs ».
Nous fumes seuls à vivre notre drame, à enterrer nos morts, à les tirer, les mains nues et le cœur ensanglanté, de sous les décombres. Alors que nous étions innocents, le monde, en spectateur, manipulait et regardait le laboratoire à ciel ouvert qu’était l’Algérie pour voir si la « régression peut être féconde », et si de la géhenne la vie peut renaitre.
Et le monde occidental ne cesse de manipuler un monde arabo-musulman, riche d’une richesse maudite, qu’il a construit à sa guise et qu’il déconstruit en fonction de ses intérêts. Un découpage géographique à la tronçonneuse qui fait couler beaucoup de pétrole de nos veines pour remplir les poches à carburant de cet occident, pour ses moments de crise et ses cas d’urgence. C’est vrai que le sang libyen, irakien, ou algérien n’a pas la pureté du Brent ni une cotation boursière dans les marchés de l’occident.
La France, pays colonisateur, pays manipulateur, agonise. ERIC ZEMMOUR pleure son « suicide et les 40 années qui l’ont défait ». Sa puissance économique s’affaiblit, son influence politique et militaire s’amoindrit, son rayonnement culturel- sa nano-logique-, se noie dans un monde technologique et pragmatique ; américain, chinois et allemand. Alors par instinct de survie la Françafrique devient plus agressive en Syrie, au Mali et en Libye.
Pays cosmopolite, la France, seule en Europe, peine à marier les couleurs :
Bleu-blanc-rouge? Ou bleu-blanc-beur? Ou blanc-noir?
Dieudonné la veut en noir et blanc. Ce camaïeu l’excommunie. Ses milliers de fans, afro-centriques déclarés ou non, français descendants d’esclaves comme il aime à le répéter, se sentent, du coup, discriminés.
Marine la bretonne, ayant connu l’Amoco Cadiz étant jeune, a horreur des marées noires. Alors, pour la bonne cause, elle pactise avec Zemmour, Filkenkraut et l’autre Houellebecq, pour d’une France originelle ; blanc-blanc et blanc. Une France pure, purgée par la « déportation » de cinq millions de musulmans, dixit Zemmour.
Tout sauf le vert. Michel Houellebecq ouvre grand son bec en criant dans sa « Soumission » que « la laïcité et morte, la république et morte ». Et, épouvantant la populace, il déclare que bientôt le président de France sera musulman. L’horreur pour une France qui a peur d’être Amérique.
Faut-il, dans ces conditions s’étonner de voir la France focaliser sur elle toutes les frustrations, toutes les rancunes et toutes les haines de ceux qui s’estiment être les victimes des sa politique étrangère, ceux de ses enfants adoptifs, qui se rebellent contre elle, parce que abandonnés par elle.
Le tort de Charlie Hebdo c’est d’avoir exacerbé, par quelques caricatures stupides, tous les ressentiments à l’égard de la France. Il s’est fait hara-kiri, quand il a pris le relais du journal danois Jyllands-posten pour insulter notre prophète MOHAMED « salla ALLAH alyhi wa sallam ». C’était inutilement offensant pour la deuxième religion de l’Europe et pour un milliard d’individus à travers le monde. Chose que même Jyllands-posten, le premier provocateur, n’a pas voulu réitérer, en refusant de reprendre les caricatures de Charlie Hebdo, se désolidarisant ainsi avec lui, mesurant, dix ans après, l’absurdité de la chose.
Il est donc naturel que l’on ne soit pas forcement Charlie, même si on est pour la liberté d’expression et la liberté de la presse. On peut aimer la liberté sans passion pour Charlie. On peut haïr le terrorisme sans forcement aimer Charlie.
MEKIDECHE.A
Dans le journal le Monde du 10.12.2010
« Charlie Hebdo » condamné pour le licenciement abusif du dessinateur Siné
La société éditrice de Charlie Hebdo a été condamnée par le tribunal de grande instance de Paris pour avoir rompu abusivement le contrat de collaboration qui la liait depuis seize ans avec le caricaturiste Siné, selon un jugement consulté par l’AFP. Les éditions Rotatives devront verser 40 000 euros de dommages et intérêts à Maurice Sinet, dit « Siné », et publier la condamnation dans Charlie Hebdo.
Siné avait été licencié après une chronique publiée le 2 juillet par Charlie Hebdo, dans laquelle IL IRONISAIT SUR UNE ÉVENTUELLE CONVERSION AU JUDAISME DE Jean Sarkozy : « Il vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée, juive, et héritière des fondateurs de Darty. Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! »
C’est dans les pages de l’hebdomadaire que le caricaturiste apprenait le 16 juillet son renvoi. Le directeur de la publication, Philippe Val, justifiait alors la fin de la collaboration en arguant que les propos de Siné « pouvaient être interprétés comme faisant le lien entre la conversion au judaïsme et la réussite sociale, et ce n’était ni acceptable ni défendable devant un tribunal ».
Ce même journal est défendu aujourd’hui pour la liberté d’expression !!!! deux poids deux mesures !!! afham yale faham …………
Très bonne soirée
En France on ne sanctionne pas un journaliste qui blesse gravement et consciemment la sensibilité de millions de citoyens de confession musulmane. Cela, nous dit-on, n’est pas considéré comme une injure mais fait bien partie de la liberté d’expression. Mais si on adopte cette optique par naïveté et qu’on évalue l’expression de ce même journaliste (ses caricatures par exemple) en disant qu’elles sont immorales et plutôt lâches, alors là on est taxé de terroriste et on risque même d’être arrêté. Parce que ça, nous-dit-on encore, ce n’est pas de la liberté d’expression. Où commence et où finit alors cette fameuse «liberté d’expression»? On ne pourra pas nous le dire parce que justement, la flèche est variable. Mais qu’est-ce que c’est donc que ce monde ambigu?
prière de lire « pasaran » et non « pasdaran » comme ça a été corrigé.