La mise en place de la « carte grise biométrique » est, en soi, antinomique. Elle démontre une confusion (inquiétante) entre le concept de l’électronique et du biométrique. En effet, tour à tour, l’agence officielle APS, le quotidien étatique El Moudjahid reprennent cette terminologie officielle. Ceci fait suite à l’approbation du Conseil du gouvernement de « l’exposé par le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Bedoui, sur les projets du permis de conduire et de la carte grise biométriques ».
« Le Conseil du gouvernement a approuvé hier l’exposé présenté par le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Bedoui, sur les projets du permis de conduire et de la carte grise biométriques », écrivait El Moudjahid du 11 mai.
Des voitures… vivantes ?
Soyons précis : la définition de « biométrie » se rapporte aux êtres vivants. En effet, la racine même du mot est la combinaison de « bio », soit le vivant, et « métrie », qui se rapporte à la mesure. En somme, il s’agit de la « mesure du vivant ».
Dans le domaine administratif, ceci se rapporte le plus souvent à la réalisation de documents officiels, comportant les informations physiques et biologiques de son détenteur, comme les empreintes digitales, la taille, les données physiques, voire un scan rétinien (œil) ou le groupe sanguin. C’est le cas des passeports et, bientôt, des permis de conduire.
Cela dit, l’annonce d’une carte grise biométrique n’a pas de sens : une voiture étant un objet inanimé (sauf peut-être celle de la série télévisée K-2000), la carte grise ne peut donc être « biométrique ». Elle peut, en revanche, être électronique.
Pour Khaoula Taleb Ibrahimi, linguiste de renom, il s’agit d’un « abus de langage » : « Le biométrique est relatif à une personne et permet d’avoir des informations dites bio. Pour la carte grise, l’on devrait parler d’informations numérisées ou électroniques, mais dire biométrique est un abus de langage », insiste-t-elle
Tewfik Abdelbari