Sidi Bel Abbès : Réhabilitation du vieux bâti : Qui n’est pas occupé à naître est occupé à mourir.

Comment faire l’impasse et se taire quand des informations de première importance vous parviennent sans que votre interlocuteur fonctionnaire zélé à l’accoutumée, voit dans son message une occasion pour sa ville de toujours faire un saut qualitatif dans la prise en charge du vieux bâti ? En effet et après s’être assuré de la « pertinence » de l’information reçue comme une aubaine par tout rêveur pensant  parfaire la beauté et l’esthétique de sa cité en donnant à ce thème une dimension à la fois culturelle et architecturale, nous constatons avec amertume que toute velléité de changement est annihilée. En effet, la ville de Sidi-Bel-Abbès  aurait inscrit dans son budget 2013 une somme conséquente avoisinant le milliard de dinars pour la réhabilitation du vieux bâti. Or, à ce jour, pas un kopek n’a été engagé pour cette opération prétextant des avis d’appel d’offres infructueux pour cause d’inexistence de bureaux d’études qualifiés en la matière. Si les responsables concernés ont fait quelque esquisse en la matière et avancent cyniquement ce faux alibi, c’est qu’ils nous considèrent tous comme des tarés à moins qu’ils n’aient visé un nec plus ultra  qui dépasserait de loin les compétences nationales en matière d’études auquel cas ces responsables deviendraient de fait des références pour des sujets dont la banalité ne trouve son essence que dans leur cour gardée. C’est à croire que Sidi- Bel-Abbès n’a acquis aucune expérience dans l’entreprenariat tant dans le public que dans le privé depuis son édification dans la nuit coloniale à ce jour. Nous n’osons nous y arrêter  sans réagir rageusement pour clamer que la cité dispose de toutes les compétences pour prendre à bras le corps un tel projet qui pourrait bouleverser totalement la vision qu’on peut se faire du vieux bâti. Rappelons que le Ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville envisage de créer une Agence Nationale du bâti ancien en vue de prendre en charge l’opération de rénovation du vieux bâti dans le plan quinquennal 2015/2019. Il y a certaines wilaya, et entre autres, celle d’Oran qui se prépare à lancer un appel d’offres en janvier 2015 pour la réhabilitation de 60 immeubles. Cela suppose que le projet a déjà été mûri et que les options sur le choix de la manière d’opérer, soit par lots, soit par bâtiments individuels, soit en ciblant un patrimoine culturel et architectural inestimable qui a été délaissé. Si d’autres élus, sous d’autre cieux, ont perçu le bénéfice qu’on peut avantageusement tirer de ce créneau porteur à plus d’un titre, pourquoi Sidi-Bel-Abbès qui disposait d’un urbanisme moderne, reste mortellement et inexplicablement à la traîne et à la remorque ? Est-ce par manque d’initiative ou par manque de compétences ? Sommes-nous condamnés  à la résignation et à demeurer des provinciaux sans leaders entreprenants ? L’efficacité de nos entreprises est pourtant un témoignage de la vivacité de nos managers. Il suffit de les orienter convenablement vers d’autres perspectives et c’est le rôle des autorités locales de s’accrocher au bon wagon du développement moderne, en suscitant des vocations nouvelles et en  planifiant des formations spécifiques aux métiers de la rénovation du vieux bâti en coordination avec tous les acteurs,  l’université, les centres de formation, l’association des architectes, et toutes personnes pouvant faire profiter Sidi-Bel-Abbès de son expérience et de ses idées si tant est que ce soit là leur désir. C’est dire que la création d’une commission de réhabilitation du vieux bâti doit être suscitée sans plus attendre pour arrêter et fixer un plan de travail ainsi que le choix de la démarche avec les nécessités opérationnelles que cela implique. D’ores et déjà  il nous semble qu’une option se dégage à notre avis sans que cela soit limitatif où la seule démarche à envisager : c’est la réhabilitation plus personnalisée architecturalement de la place historique de la Tahtaha. Si ce choix a notre préférence, ce n’est guère le côté affectif et historique qui l’emporte, mais c’est pour en faire une opération-test d’un projet complexe faisant intervenir non seulement tous les corps de métiers, mais également un aspect juridique et social jusqu’à ce jour négligé et qui risque de plonger cette place dans le dénuement total. Il faut savoir que la majorité des bâtiments de ladite place sont à l’abandon faute d’héritiers désignés. Il ne reste plus que la procédure d’utilité publique d’urgence pour dénouer une situation à ce jour inextricable. En parallèle, il peut être envisagé sur concours d’architecture, la réalisation d’une place à l’aspect architectural qui corresponde à notre personnalité. Paris a son centre Beaubourg et les Halles (Réhabilitation), Alger son Maquam, Sidi-Bel-Abbès  aura sa Tahtaha remettant en selle toute l’architecture arabo-andalouse dont l’esthétique sera remise à l’ordre du jour. On ne peut pas continuer à construire des ensembles et des tours sans âme qui seront demain des centres psychiatriques potentiels eu égard à la promiscuité, vivier de tous les maux sociaux, que l’on semble cultiver de manière irréfléchie. Légendes, mythes et faits mystérieux jonchent l’histoire. Des faits d’armes en passant par des batailles héroïques, des hommes valeureux souvent magnifiés par la légende ont souvent égayé nos veillées familiales et les soirées de nos aïeux. C’est à nous de relayer ces bouts d’histoires à notre descendance tels que nous les avons reçus des nôtres. Notre association qui se propose de réhabiliter et redonner une nouvelle vie aux vielles bâtisses significatives de l’ère coloniale en matière d’architecture ne peut demeurer en reste et souhaiterait au demeurant participer à la conservation de ses sites en droite ligne de ce qu’envisage le projet de l’Agence Nationale de Réhabilitation du bâti ancien. Il faut savoir qu’avant même la mise en vigueur des textes juridiques de ladite Agence,  l’OPGI a déjà entamé des opérations de réhabilitation ( peut-être est-elle à leur phase études ) à Oran, Alger , Constantine , Tlemcen et pourquoi pas s’accrocher à la locomotive pour ainsi mettre notre ville au diapason de la modernité,  désir ardent de notre population à s’inscrire dans la récupération de son passé et ainsi l’ancrer à jamais dans une continuité historique comme toutes les grandes villes du monde et des pays qui tiennent à ne pas être victimes d’une amnésie combien réductrice. S’inspirer de Bourbon-Street à la Nouvelle-Orléans en Louisiane, de l’ancienne demeure d’Ernest Hemingway à Cuba ou du Mechouar de Tlemcen, c’est peut-être trop espérer. Mais ces exemples sont de nature à nous laisser entrevoir un cap possible à se fixer pour parfaire et réaliser un rêve sans quoi nous regagnerions le monde du délire, car nous aurions biffé toute notre mémoire pour faire un pas de plus vers un autre monde sans passé, un monde de médiocrité où, dans le cadre de ce qui précède, toute construction qui ne commence pas par de larges rideaux n’attire plus les regards quand bien même démontrerions-nous que Le Corbusier, Niemeyer ou Gaudi y auraient laissé leurs touches qui traduisent un génie auquel nos habitudes, nos mœurs et le crétinisme érigé en modèle nous interdisent d’y penser.

Abdelhamid Abdeddaïm : Association pour la Sauvegarde du Patrimoine Architectural de la Wilaya de Sidi-Bel-Abbès.

 

 

 

2 thoughts on “Sidi Bel Abbès : Réhabilitation du vieux bâti : Qui n’est pas occupé à naître est occupé à mourir.

  1. @El Mecherfi.

    Pour la compréhension du texte j’ai signalé, à toutes fins utiles, que dans le budget 2013 de la Wilaya figurait un intitulé relatif à la Réhabilitation du vieux bâti pour une somme avoisinant le milliard de dinars et, qu’à ce jour, aucune initiative n’a été engagée à cet effet. Nous avons précisé qu’entre temps une agence, pour ce faire, est en voie de création. En apprécier l’opportunité c’est admettre que la déshérence est totale ce qui ne valorise ni le cumul des « expériences » ni celle du déversoir que ce veut être l’Université. La démarche que nous proposons n’a pas besoin, à ce stade du moins, de statistiques ni d’analyse mathématique pour avancer. L’objet dont il s’agit concerne à la fois l’Histoire, la mémoire, l’architecture du vieux bâti qu’on suggère de réhabiliter dans le respect de nos valeurs ancestrales. En foi de quoi, il nous a semblé utile de proposer la création d’une commission qui sera chargée de fixer un CAP ou de dresser une FEUILLE de ROUTE pour matérialiser l’opération. L’Histoire parfois, et en fonction de certaines contingences, se fait au présent et c’est en réhabilitant l’artisanat dans son contexte originel qu’on redonne un sens à la vie de notre cité et surtout que cela nous permet d’enclencher une dynamique irréversiblement positive celle-ci nous absolvant du sempiternel « on efface tout et on recommence ». L’Architecture de la colonisation obéissait à ses préoccupations, La NÔTRE doit RÉHABILITER celle de notre civilisation à son apogée ou à tout le moins considérer celui-ci comme point de départ. Aucune initiative n’a été engagée à cet effet.

  2. Absolument, je trouve cette initiative de la part de l’association pour la Sauvegarde du Patrimoine Architectural de la Wilaya de Sidi-Bel-Abbès une action très courageuse. Faire des propositions c’est déjà un point de départ. En effet, pourquoi pas Sidi-Bel-Abbès !
    A mon avis il faudrait commencer par récolter des chiffres ! Oui. Des Statistiques ! Un procédé souvent négligé. Ce qui veut dire faire des « expertises », c’est-à-dire de l’argent. Donc ce n’est pas facile ou plutôt ce n’est pas prioritaire nous dira l’ETAT. Vous voulez que l’Etat remette en état le vieux bâti au quartier El-Graba ? Et quelle sera la réaction des « autres » qui rêvent d’un logement social ? Mieux vaut dépenser cette argent dans le logement social. C’est ce qu’il dira sûrement.

    Toutefois, je dis bravo. C’est vrai le quartier Graba mérite aussi une attention particulière. Le mérite consiste à bien proposer en contre-balancant certaines mauvaises inclinations et surtout à bien agir. Courageusement votre.

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