DES PASSEPORTS DU HADJ EN VENTE: Bientôt on proposera des billets pour… l’Eden?

La nausée ne cesse de monter et la gangrène ne cesse d’avancer dans un pays où plus rien n’arrête rien, ni personne. L’indécence, la triche, le mensonge, la corruption, le vol et tous les maux du monde envahissent les secteurs de la vie sans exclusive. Plus rien ne les arrête. Plus rien ne les empêche de poursuivre leur avancée répugnante du moment que la seule chose qui compte c’est de se faire de l’argent. Encore de l’argent.
L’un des derniers remparts contre les pratiques honteuses a été la religion. Du moins, on le pensait naïvement car on partait du principe que, avec Dieu, les hommes éviteraient de jouer aux malins, mais que na!

Les grands apôtres
Cela fait longtemps que la religion, chez nous s’entend, est devenue un fonds de commerce assez payant. Il suffit d’une barbe, d’un kamis, pas très long de préférence et, pour qui veut faire meilleure impression, un pantalon coupé au niveau des mollets et le tour est joué. Des analphabètes deviennent ainsi, par le miracle de la vie, érudits. Les ignorants se transforment en cheikhs débordant de sagesse et les voyous se voient attribuer des «Si Flen» et des «barakallahou fika». Inutile d’ajouter que ceux qui peuvent afficher leur siwak avant les prières se voient vite «emburnoussés» d’un charisme digne des grands apôtres!
La religion? Cela fait longtemps que d’aucuns s’en servent, chez nous, pour se faire une nouvelle place dans la société. Il y en a qui en usent pour s’ériger dans le statut social, il y en a qui en abusent pour gonfler leurs caisses de commerçants sans scrupules. Il y en a qui y recourent pour se venger d’un société qui n’écoute pas les muets et il y en a même qui y puisent pour aveugler les prétentieux et les malades de pouvoir, d’argent et de tous les brillants d’une vie qui, cela fait longtemps quand même, a perdu de son goût.
Malgré cela, du fond de notre naïveté, nous refusions de croire que cela pût aller plus loin car, la religion, nous disions-nous, c’est la religion et les hommes n’oseraient tout de même pas… Eh bien, nous nous sommes trompés. Il fallait inverser le schéma de la réflexion et dire que les hommes demeurent des hommes et ce n’est tout de même pas de religion qu’ils vont s’embarrasser lorsqu’il s’agit d’atteindre leurs objectifs! C’est ce qui nous a été donné de constater, ce week-end, en apprenant que des passeports du Hadj se vendent dans des agences de voyages. L’information diffusée par Ennahar et reprise par la presse nationale a choqué plus d’un. Elle a choqué parce que le trafic dans le domaine religieux étonne toujours. Elle a choqué aussi parce que, lorsqu’on est sexagénaire, on essaie de se réconcilier avec Dieu et pas l’inverse. Du moins c’est ce que dit notre culture. Elle a choqué aussi parce que ces passeports se vendent à un prix exorbitant et elle a choqué, enfin, parce qu’une partie de la tromperie se trouve être, selon les dires de l’agence de voyage, un haut personnage ou se revendiquant comme tel. Bienheureux qui saurait recevoir tous ces coups sur la tête sans sourciller!
D’où peuvent bien provenir ces passeports?
Rien ne dit qu’il y a une seule agence de voyage qui effectue ce genre d’opération. Il se peut que d’autres, à travers le territoire national, s’essaient au même exercice. Et il est à craindre que le nombre de passeports ne soit autrement plus élevé qu’il en a l’air. La question qui se pose, dans tous les cas, est celle de savoir d’où proviennent tous ces passeports. Il y a plusieurs possibilités. La première c’est qu’il s’agit de passeports authentiques et, dans ce cas, il va falloir que l’on explique au citoyen comment des quantités de passeports qui sont des documents officiels rappelons-le, tombent, comme ça, entre les mains de voyous sans foi ni loi qui en font ce qu’ils veulent et qui n’hésitent pas à dépouiller de pauvres gens dont le seul tort est d’accomplir un rite qui leur est cher. Cette éventualité, si elle venait à être confirmée voudrait que le ver serait dans le fruit! Et qu’il faut le dénicher.
La seconde possibilité est que les passeports en question sont des faux et là, il va falloir débusquer les complicités car, sans complices, il est pratiquement impossible de faire passer autant de gens avec de faux papiers aux points de frontières.
Que ce soit à l’aéroport Houari Boumediene d’Alger ou à celui Mohamed Boudiaf de Constantine ou tout autre aéroport, nos policiers de la PAF ont assez d’expérience pour sentir de loin les faux papiers, surtout lorsqu’il s’agit de passeport, à un moment aussi difficile car un faux passeport, lorsqu’il n’est pas détecté pourrait servir à faire passer des jeunes pour gonfler les rangs des terroristes en Syrie, en Irak ou ailleurs.
La troisième possibilité c’est qu’il n’y a ni «haut responsable», ni passeport de Hadj mais d’autres moyens pour faire passer les futurs pèlerins au travers des frontières. Là aussi, et pour les mêmes raisons, il faudrait chercher les complicités.

Dieu nous en garde!
Pourquoi ne pas prendre des raccourcis?
Reste la quatrième éventualité, celle qui demeure la plus probable, c’est que les gens de l’agence essaient d’extorquer de l’argent aux citoyens en usant de mensonges et d’escroquerie mais, une fois l’argent réuni, ils disparaîtront dans la nature. Ce ne sera pas la première escroquerie malheureusement, chez nous, ni la première au monde.
En attendant de connaître les «comment» et les «pourquoi» de cette affaire dont, semble-t-il se serait occupé le ministère de la Défense nationale, on ne peut que dire notre consternation de voir que la vénération de l’argent n’a pas d’âge, qu’elle peut être plus forte chez certains, que leur religion. Dieu nous en garde! 
Les malades et les esclaves des passions ont frappé à toutes les portes du vice et de la triche pour se faire de l’argent en roulant les pauvres crédules qui donneraient tout pour plaire à Dieu et s’en rapprocher. Mais comment se fait-il qu’ils n’aient pas pensé, jusqu’à présent, à leur procurer un raccourci en leur vendant carrément des tickets… pour l’Eden?
Dieu, ce que l’ignorance fait des hommes! Et ce que les hommes font des hommes!

Par