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SARKOZY : PRESSÉ OU AGITÉ?

ByAbdelhamid Abdeddaim

Oct 8, 2011

A chacune des trois primaires du Parti Socialiste, Le Président français s’arrange pour être hors de son pays dans l’espoir, très certainement, de captiver l’attention de l’électorat sur des thèmes sensibles d’une part et d’éviter d’être mis dans l’accessoire d’une actualité interne où il passerait au second plan médiatiquement d’autre part. Sa stratégie de communication et son trait de caractère dominant au premier plan, constituent ce qu’on appelle « un égo surdimensionné ». Ayant utilisé les thèmes de l’Outre-mer et de la Libye dans ses précédentes sorties, la Géorgie et l’Arménie lui ont inspiré un sujet qu’il considère comme attractif  en ciblant un électorat communautaire. Cette fois-ci, comme par un fait de hasard, il choisit parmi les seuls pays arabo-musulmans  de traiter de l’histoire de l’Empire  Ottoman en se focalisant sur la Turquie qu’il avait auparavant cantonnée hors d’Europe.

Cette démarche, pour le moins manichéenne n’est pas dans la tradition diplomatique française qui a toujours eu vocation de lutter contre les communautarismes et obéit à une pulsion inconsciente qui le pousse en permanence à se rappeler de ses aïeux originaires de ces contrées qu’on désigne par le terme générique : les Balkans. Ses grands-parents maternels vivaient à Salonique, ville finalement rattachée à la Grèce suite à l’Accord de Lausanne (1920). Il nous donne l’impression, tel un « gamin » rancunier, qu’il tient là sa revanche. Mais de quelle revanche s’agit-il ? On ne peut se contenter d’une lecture simpliste, voire manichéenne de l’Histoire dans cette région très sensible où l’Empire Ottoman a vu fondre tout au long du XIXème, de crise en crise, ses possessions comme une peau de chagrin. Le Tsar Nicolas II disait à ce moment, à propos de l’Empire  Ottoman : « L’Homme malade de l’Europe ». Il n’est pas nécessaire de revenir, dans le détail, sur le dépeçage  de l’Empire. Il reste qu’il est utile de souligner qu’à la veille de la Première Guerre Mondiale, celui-ci n’est réduit qu’à sa portion congrue : Turquie actuelle ajoutée aux pays balkaniques : la Serbie, la Bosnie, le Monténégro, l’Albanie, la Roumélie, la Valachie (ces deux derniers territoires formant l’actuelle Roumanie). Ce legs des pays balkaniques n’est pas une sinécure, les Turcs affaiblis, amoindris et sous tutelle des coalisés étaient tenus de gérer toutes  les minorités disponibles avec leurs diversités ethniques et religieuses (Orthodoxes, Catholiques),

La dette turque avait atteint des montants considérables à tel point que les pays européens ont mis en place un Ministère des Finances parallèles entièrement géré par eux pour faire main basse sur les taxes que rapportent les pans entiers de l’économie du pays, y compris les droits de timbre. La Turquie était devenue, en quelque sorte, une coquille vide, les Abdülhamid et Abdullah  n’étaient là que pour la façade. Aucun pays européen ne souhaitait en prendre directement la tutelle. Les Russes ayant pris possession des rivages de la Mer Noire (régions de Kars et d’Ardahan) ont mis la pression sur la minorité prospère à savoir les Arméniens et les ont contraints à rejoindre avec la communauté arménienne issue des Balkans des régions de Trébizonde et d’Erzurum. Alors que la Turquie était dans le dénuement le plus total,  les séparatistes arméniens installés dans l’Est anatolien ont pris fait et cause pour la Russie. La bouilloire ne pouvait qu’exploser avec les conséquences qu’on sait. Il y a lieu de souligner que le feu était attisé par les Grandes Puissances et par des minorités ethniques et religieuses des Balkans. La communauté arménienne était la plus prospère de la région et disposait de quatorze députés au sein du Parlement turc nouvellement installé par le Sultan Abdülhamid.

Dans la chasse à l’Arménien, il faut bien le dire, les Turcs n’étaient pas les seuls impliqués, toutes les minorités religieuses et ethniques ont participé : Bulgares, Valaches, Grecs, Roumélie tant et si bien que pour signifier : enchevêtrement des sensibilités et haines religieuses, il suffit d’invoquer le mot « Balkans ». Ceci étant, Monsieur Sarkozy n’est pas l’homme idoine pour évoquer ce qu’il considère comme génocide eu égard à son attitude vis-à-vis de la Guerre d’Algérie qu’il continue d’occulter voire même de nier. S’étant aligné sur la politique américaine, il est en droite ligne des recommandations du lobby sioniste AIPAC dont il s’est fait l’ambassadeur obéissant et zélé. En laissant libre cours à ses états d’âme et ses ressentiments, il a privilégié « la personne » Sarkozy à la raison d’Etat. Il a même eu la maladresse de mêler un électorat  arabo-musulman, autrement plus sensible, à cette provocation.

 

 

One thought on “SARKOZY : PRESSÉ OU AGITÉ?”
  1. Cher Saddik, bonjour.
    Je voulais faire un commentaire sur ton article, mais en parcourant la presse ce matin, j’ai trouvé ce superbe article qui résume toute ma pensée et est complémentaire au tien.

    Quand Erdogan fait
    de l’ombre à Sarkozy
    La Turquie devra un jour ou l’autre assumer la page noire de son histoire que fut le massacre à grande échelle des Arméniens en 1917. Mais ce n’est certainement pas à la France de lui en faire l’exigence, elle qui persiste dans la glorification de son passé colonial et le refus de reconnaître la réalité des crimes contre l’humanité commis par son Etat durant cette période. Avant de se piquer de faire la morale à la Turquie, le pays de Sarkozy aurait dû balayer chez lui en faisant ce qu’il demande à ce pays. L’Etat français a plus de cadavres dans l’armoire de son passé colonial que la Turquie. Il doit répondre, entre autres forfaits, des massacres de Sétif et de Madagascar, de la répression au Cameroun, des fusillés du camp de Chiaroye, des gazés de la guerre du Rif, pour n’en citer que quelques-uns de la longue et tragique liste qui lui est opposable en la matière. Le président français a été mal inspiré et pour tout dire indécent en interpellant la Turquie sur l’obligation pour elle de reconnaître la réalité du massacre des Arméniens en 1917, à la veille de la commémoration par les Algériens du 51e anniversaire des tueries en Octobre 1961 dans l’Hexagone de centaines de leurs compatriotes. Les crimes commis par l’Etat français en Algérie et dans ses autres ex-colonies sont aussi imprescriptibles que l’est le massacre des Arméniens en 1917 par les Turcs. La France «donneuse de leçon» est dans la même situation de déni d’un pan de son passé que la Turquie. Pourquoi donc Sarkozy veut obtenir d’Ergodan ce que lui refuse de reconnaître pour la France ? Nous ne ferons pas insulte à l’intelligence du Président français de ne pas être conscient que le pays qu’il dirige n’a pas le magister moral qu’il faut pour poser à l’Etat turc l’exigence de reconnaissance. Ce n’est pas de lui que le Premier ministre turc acceptera la leçon. Sarkozy le sait et ce n’est pas dans ce but qu’il a fait sa sortie. En instrumentalisant le problème de la reconnaissance du massacre des Arméniens en 1917, le Président français a visé un objectif électoral, celui de rallier à sa candidature pour 2012 les nombreux Français d’origine arménienne.
    Sarkozy, dont la cote de popularité est au plus bas dans les sondages à quelques mois de l’élection présidentielle, ne recule devant aucun stratagème pour tenter d’inverser la tendance. La situation intérieure française, telle qu’elle se présente après quatre années de sa présidence, le contraint, pour essayer de redorer son blason, de se montrer «hyperactif» sur la scène internationale. A ce titre, la Turquie, dont l’entrée à l’Union européenne fait débat en France particulièrement et qui est train de jouer avec succès au compétiteur de l’Occident dans des zones que la France et d’autres puissances occidentales estiment être leur pré carré, lui a paru le pays sur le dos duquel il pourrait se tailler le costume d’homme d’Etat de grande dimension qu’il n’est pas dans la gestion intérieure de la France. L’épisode du massacre arménien est certes un point noir pour la Turquie, mais ce pays avec Erdogan a tout de même noué des contacts et un dialogue avec l’Arménie pour dépasser sans passion ce sombre épisode de leur histoire commune. Il donne par ailleurs l’exemple d’un pays en train de devenir une «république vertueuse» à tous points de vue, alors que la France de Sarkozy est devenue celle des coquins et des copains.
    Kharroubi Habib in Le Quotidien d’Oran.

    J’ajouterai simplement qu’en plus de ce qui a été fait par l’Etat Français comme crimes dans les ex-colonies, Il n’a pas épargné ses propres enfants et notamment les Harkis et les Pied-Noirs à leur retour en France qui se sont vus traités presque en sous-hommes!!!

    Mais comme dit un adage de chez nous: « Il chasse le vent avec un bâton »

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