Un des lieux de la mémoire collective oublié:Si Kahwate Erroumana m’était contée
Café ERROUMANA, située en plein cœur de derb sidi Hamed, est devenu depuis la mort de son propriétaire Ammi ZOUBIR , un lieu triste ,ou seul le vieux grenadier meurt tout seul. Ce lieu à la fois économique et culturel, remonte à plus de 500 ans. « Kahwate erroumana, reste de nos jours un lieu dans la mémoire collective. A l’intérieur, chaque arpente, chaque coin, évoquent des souvenirs. Plusieurs personnalités ont marqué leurs passages, dont notamment Mohamed Dib, Ahmed Benbella etc.…Durant la guerre de libération, les moudjahiddines l’avaient pris pour un lieu favori pour aborder les stratégies de l’armée de libération nationale. De nos jours les vieux se souviennent encore de cet artisanat de babouches et qui étaient un élément constitutif. Même le son des babouches dans les ruelles silencieuses durant les années cinquante à l’heure de la sieste est unique et caractéristique. A coté existait un autre artisan spécialiste dans la confection des chapeaux en paille que les visiteurs n’hésitaient pas d’en acheter un. Aujourd’hui ce lieu, qui nécessite une attention particulière pour son classement, fait pleurer plus d’un dès qu’on évoque les souvenirs d’antan, au point que ceux qui ont eu la chance de prendre un thé, ne pourront jamais oublié son délice. Au milieu du café erroumana de Tlemcen, l’unique témoin âgée actuellement de plus de d’un siècle étant cet arbre de grenadier devenu par le temps sacré car il témoigne d’un syncrétisme, et le passage de plusieurs personnalités et savants. Rien qu’a le voir mourir dans la solitude, tout en entendant l’histoire de ce lieu qui remonte au début du quatorzième siècle, l’on comprend que le vieil arbre voulait révélé des secrets, depuis qu’il était si beau, heureux le soir venu, en compagnie des oiseaux qui nichaient dans son feuillage. Jadis impétueux et plein de vie, ces racines étaient bien arrosées d’amitié, d’amour, de bonheur partagé par les hommes venus passer leur temps assis à même le sol a jouer aux cartes, où aborder les actualités de la guerre. Chaque personne qui passait devant lui, s’arrêtait, partageait des moments de fraternité et félicité. Des rires s’envolaient vers le ciel nourris par la sérénité à l’abri de ses feuilles.

Aujourd’hui, cet arbre gémit à voix basse, car ammi zoubir n’est plus, et cette ambiance qui y régnait a complètement disparu laissant place à un vide total. Plus triste de jour en jour, le grenadier arrosait tant de ses larmes les quelques racines qui lui restaient, car depuis que kahwat erroumana et délaissée, aucun ne vide son verre d’eau au tronc de cet vieil arbre qui a vécu beaucoup d’années ,des printemps, des étés, des automnes et des hivers, les uns après les autres. Lors de notre passage à ce lieu, ‘l’unique où les des retraités tuaient leurs temps, régnait, un silence étrange, et avec l’évocation de souvenirs par certains témoins, un élan de tristesse se fit sentir, inexplicable, lourd.

Interpellé, le vieux grenadier voulait interroger l’assistance, de ce pourquoi on délaisse un site pareil, dans de telles conditions, alors que l’Etat dispose de moyens pour le rénover.

l’arbre a beaucoup à dire, tendez lui l’oreille, comme il peut expliquer les mémoires collectives, car la réminiscence introduit le jeu du souvenir et de l’oubli avec des points de repères que sont les événements vécus qui nous permettent de nous positionner dans le temps. C’est en replaçant les images souvenirs dans des lieux, des points de vue de personnes et des objets, autrement dit, en utilisant les notions collectives des groupes auxquels on appartient, que, par raisonnement se reconstruit le souvenir. Les mémoires individuelles sont donc transformées par une ou des mémoires collectives…et réciproquement. Les coins de kahwate erroumana, « fabriquent » les souvenirs. C’est l’histoire d’un passé vécu qui favorise le sentiment d’appartenance au groupe et par là contribue à façonner l’identité de ce groupe. Elle est donc un enjeu social et politique, qu’il faut absolument réaménager.

Pendant ce temps, l’arbre réfléchissait sans cesse à la solution. Son désespoir lui fit perdre ses feuilles. Avec le temps, il se dégarnissait sous le poids de sa souffrance. Quelques feuilles sèches restaient accrochées tristement à ses branches. Aucune autre ne poussait, ni feuilles, ni fleurs. Il commence déjà à se rabougrir tel et ses racines à mourir. Tremblant dans son écorce grise, le Grenadier, veut rencontrer ammi zoubir, et toute la famille Khellil qui a pris en main kahwate erroumana de père en fils….depuis des générations.

M.M