Merhoum. C’est le nom d’une contrée relevant de la wilaya de Sidi Bel Abbès, située au sud, à près de 100 km du chef-lieu. Cette localité suffoque sous le fardeau des vents de sable. Marquée par les grandes chaleurs, sa jeunesse « détraquée » par manque de loisirs ne sait pas à quel saint se vouer. La région est complètement menacée à plus d’un titre par le sable qui y a élu domicile.
Ce hameau perdu semble si loin de la civilisation. A l’entrée du village, en ce mois sacré, des jeunes sont adossés aux murs de vieilles bâtisses abandonnées. Comme de coutume, ces villageois sont les premiers à vous adresser le salut, malgré la pauvreté et la misère.
Cette contrée chef-lieu de daïra, qui a été constamment la cible des terroristes, a obligé bon nombre de personnes à « s’exiler ». Les conditions de vie de ces paysans sont pénibles, et la région demeure isolée, faute de développement. Aujourd’hui, le terrorisme est pratiquement vaincu. Les populations, notamment les éleveurs et les agriculteurs, commencent à reprendre goût à la vie. Le peu de projets visant à améliorer les conditions de vie et la reconstruction des maisons détruites, la réalisation d’une sûreté de daïra… n’ont pas tellement changé le village.
En effet, depuis l’indépendance, la région n’a pas su comment se frayer un chemin vers le progrès, malgré les faramineux budgets destinés à cet effet. Le silence et le mépris des autorités, conjugués au manque de civisme et à la mauvaise gouvernance… ont mis cette région dans le dernier wagon de la locomotive du développement. Les responsables de la commune doivent redoubler d’efforts visant à promouvoir le développement socioéconomique de cette entité. Ici, l’urbanisme est en piteux état. Au niveau de la voirie, c’est une véritable catastrophe dont souffrent énormément les populations. Une image peu reluisante s’offre aux yeux. Toutes les avenues sont devenues des chaussées où « s’enfoncent » chaque jour voitures et camions. Partout des nids-de-poule et des crevasses, ce qui donne au village une image désagréable d’un grand douar.
Les citoyens indiquent que rien n’a été entrepris pour faire sortir ce village de son isolement et de sa misère. Ces derniers interpellent les responsables à tous les niveaux, en rappelant le sacrifice de ses enfants pendant la révolution et les victimes du terrorisme.
Ces mômes qui n’ont jamais vu la mer
S’agissant de la saison estivale, les enfants ne connaissent pas la mer. « On n’entend parler des vagues et on ne voit la grande bleue qu’à travers le petit écran », souligne un groupe. Ces enfants optent pour les infrastructures aquifères (bassin d’eau), gueltas, petites retenues… pour s’adonner aux techniques de la natation et de la baignade. Si, ailleurs, on crie fort « A nous les vacances ! », puisqu’on dispose de moyens financiers pour l’évasion, à Merhoum, qui compte une population pauvre, les petits n’iront nulle part. Dépourvues de piscine ou d’infrastructures adéquates pour passer paisiblement leur temps, les jeunes et les moins jeunes boivent le calice jusqu’à la lie. Les citoyens espèrent plus de projets dans le cadre du quinquennat 2010-2014.
Plongée dans une torpeur quasi totale imposée par la chaleur, et faute de moyens, chacun grignote le temps à sa manière, à son rythme, selon son inspiration et son humeur, comme si la paresse a ses musiques et ses tempos. Ce village, où on respire la misère, vit un autre calvaire, surtout en ce mois de ramadan.
Il s’agit de tout un lot de moustiques et autres reptiles qui prolifèrent à la faveur de la chaleur qui bat son plein. « Les longues nuits où règnent les moustiques et les serpents en maîtres poussent les populations à rester chez elles », nous confie-t-on. En effet, la psychose est d’autant plus grande pendant les coupures électriques.
Ce qui est triste, ce sont ces enfants qui n’ont jamais vu la mer. Ils vivent dans une grande pauvreté, les parents n’ont pas de voiture et sont incapables d’organiser quelque chose qui ressemblerait à une sortie à la plage. Pourtant, ils sont là, tout près, à 180 km de cette mer. Les associations caritatives ne jouent plus leur rôle et les autorités ne pensent point à eux. Une petite attention à leur égard serait merveilleuse pour permettre à ces mômes de toucher du sable humide, pour de vrai.
Rachid Tlemçani – Reporters