27 SEPTEMBRE: TÉMOIGNAGE POIGNANT SUR L’ASSASSINAT DES ENSEIGNANTES

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DAR ESSABA’ Abdelkader est un chauffeur de transport qui s’est converti à l’agriculture. Il est âgé de 41 ans. Pourtant sa vocation était beaucoup plus le transport de personnes. À l’âge de 21 ans, en 1996, après plusieurs années d’économies et de privation, il put réunir la somme nécessaire à l’achat  d’un Fiat Fourgon qui lui permit d’assurer la ligne Sfisef-Aïn Adden en aller-retour.  Il assure le transport des travailleurs dont près de 35 enseignants(es) qui ont pris l’habitude de voyager avec lui, matin et soir. “Je n’ai jamais un instant imaginé ce qui m’est arrivé ce jour où j’ai failli perdre la raison, devenir amnésique et vivre en névrosé“, ne cesse-t-il de seriner, tout au long de son discours. De temps en temps, il devenait absent. Quelques fois, il était figé comme s’il lisait un prompteur. Finalement, les séquelles ne semblent pas avoir toutes disparues.

Ce samedi, alors que le temps était ensoleillé et le ciel dégagé, j’ai pris le départ d’Ain Adden en direction de Sfisef à 15 h avec à bord six (6) enseignantes et un enseignant, soit 7 au total.”C’est ainsi que Abdelkader, entama son témoignage, sur la tuerie la plus tristement célèbre qu’à connue l’Algérie durant la décennie noire.  “Je roulais tranquillement, dans la routine habituelle. Arrivant au sommet d’une pente, à près de 7 kilomètres d’Ain Adden, dans un lieu enclavé entre deux forêts, je tombe sur un faux barrage dressé par des terroristes, où étaient déjà arrêtées 4 voitures de transport clandestin, dont une transportait  5 enseignantes.”

Un terroriste courut vers moi pointant sa “Mahchoucha” et me cria de garer à droite. Il m’ordonna de descendre du véhicule, de lui remettre les clefs et d’aller rejoindre le groupe de personnes qui était regroupé de l’autre côté.  Ensuite, les autres terroristes firent descendre les 5 enseignantes qui étaient dans l’autre véhicule pour les mettre avec celles qui étaient dans le mien, non sans les avoir dépouillées de leurs, sacs et bijoux. Edhib Eji3ane et ses acolytes décidèrent dans un premier temps de les immoler avec le feu après les avoir aspergées d’essence. Alors que quelques uns s’apprêtaient à préparer le carburant, le sanguinaire se ravisa et décida de les égorger. C’est le moment du conciliabule que choisit Sabeur pour tenter une évasion, en sautant du véhicule et se dirigeant vers la forêt. Malheureusement, il fut  touché par une rafale. Rejoint, il sera égorgé plus tard.  Les autres assassins égorgèrent les 11 enseignantes impitoyablement.À ce moment-là, je n’entendais plus les cris et les pleurs. J’étais parti. Toute l’opération, a pris près de dix minutes, pour que tout l’espace soit transformé en une mare de sang. 

Dib Eji3ane et ses 5 acolytes, avant de nous libérer, nous gratifièrent de leur prêche où il insistaient sur le fait que l’on en devait  absolument pas parler de cette tuerie et surtout de ne plus aller voter.  Je pris la route, comme un automate, absent, détruit mentalement et physiquement me demandant si c’est juste un cauchemar et que j’allais me réveiller, ou une triste réalité!”

Je roulais vers Sfisef, alors que le Ciel a  déjà commencé à se fâcher……..

Ed dib Eji3ane fut capturé du côté de Zahana errant comme un hère, nauséabond, obligeant les Darkis à mettre des masques pour l’appréhender. Il fut condamné à la peine capitale. Il doit être dans une prison quelconque, faisant probablement des prêches pour les détenus.

Le Président: “Pourquoi avez-vous tué tous ces gens?”  “3afa Allahou 3amma salaf” (1) Répondit Edib Ejji3ane avec un rictus jaune. C’était lors de son procès au tribunal de Sidi-Bel-Abbès

djillali@bel-abbes.info

 

(1)  Traduction approximative:  Dieu pardonne ce qui précède

Ci-dessous une vidéo indiquant l’itinéraire emprunté par les enseignantes avant leur interception par les sanguinaires. On érigea une stèle commémorative à l’endroit même où elles furent  sauvagement égorgées.

2 Replies to “27 SEPTEMBRE: TÉMOIGNAGE POIGNANT SUR L’ASSASSINAT DES ENSEIGNANTES”

  1. Cher Mr Djillali C.,

    Chaque année, à cette date et en ce lieu fatidiques, je ne peux me remémorer ces instants effroyables – qui vous touchent directement et si cruellement- sans éprouver de peine et de consternation à la pensée du supplice inhumain enduré par ces belles et si braves jeunes femmes !

    C’est un des crimes des plus ignobles et des plus douloureux pour notre mémoire collective qu’il nous a été donné de subir, tant par sa sauvagerie que par sa lâcheté, durant cette lugubre période , noire d’incertitudes et rouge de violences.

    Merci d’entretenir la mémoire de ce martyre, en nous rappelant régulièrement comme vous le faites, cet odieux massacre, fruit abject de l’ignominie et de la folie humaine, commis il y a dix neuf ans par un monstre et ses acolytes sur d’innocentes victimes.
    Merci aussi de refuser aux alchimistes de l’Histoire leurs velléités de transformer l’or de ces martyrs du devoir en plomb de l’oubli…

    Reposez en paix très chères sœurs !
    Le souvenir vivace et attristé de votre bouleversant calvaire est enraciné à jamais dans nos cœurs, avec l’ardent souhait que – plus jamais – ne se répèteront de telles tragédies dans notre chère Patrie !
    Allah yerhamkom birahmatihi elwassi3a..

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