« L’argent est gagné par tous ceux-là qui, avec patience et observation, vont derrière ceux qui le perdent. » (Benito PEREZ-GALDOS 1843-1920. In l’Aïeul).
Dans un article, paru le18 septembre 2012 sur le Quotidien d’Oran et intitulé « Algérie, au lieu de Renault, pourquoi pas Peugeot ? » est suggéré un choix pour le moins manichéen comme si la décision était aussi simple que dans un casino où il s’agit toujours de se prononcer pour le rouge ou le noir ou impair et manque.
L’avenir d’un pays aussi fragile que le nôtre malgré des discours outrageusement optimistes, se joue en bourse du moment où une crise internationale du secteur automobile se profile implacablement à l’horizon dans une incertitude totale et telle que les experts les plus ferrés eux-mêmes n’arrivent pas à dissiper. Si, naguère, et plus précisément dans les années soixante-dix, l’Algérie a opté pour Renault, tout en négociant avec les leaders mondiaux de l’époque : Volkswagen et Toyota ; ce n’était pas dû au fruit du hasard : la roulette n’a pas sa place dans un secteur aussi stratégique qui engage la survie des générations futures et la firme Peugeot n’avait pas sa place hier, encore moins aujourd’hui la crise automobile la touchant de plein fouet risquant même de l’engloutir à jamais.
Investir dans Peugeot au plus bas de sa capitalisation boursière paraît attractif de prime abord, les premiers intéressés par la situation devraient être les concurrents du secteur en cherchant les alliances et les investisseurs des pays du Golfe par exemple, sans oublier la Chine qui dispose de moyens matériels et humains extrêmement plus puissants que les nôtres.
L’histoire récente doit nous inciter à plus de prudence et les expériences de la Libye avec Fiat et de l’Arabie saoudite avec Mercedes-Benz sont autant de précédents négatifs à prendre en compte avant une prise de décision lourde de conséquences.
Le choix de l’Algérie c’est la prospective avant la Bourse et, opter pour Renault n’est pas du tout erroné ; le pays n’a pas à hésiter. En revanche, se contenter du montage sans la maîtrise des phases d’intégration est Le problème primordial à résoudre. La France qui aurait été tentée par le patriotisme économique si cela eût été possible dans l’esprit de la construction européenne, ne se hasarderait dans cette voie que si elle constituait un salut possible pour le sauvetage d’une entreprise familiale historique et c’est l’Algérie qui viendrait à la rescousse avec des moyens d’expertise inexistants à l’heure actuelle.
L’option vitale pour notre pays est un arrimage avec un constructeur présent à l’international et qui maîtrise mieux son développement dans le long terme : le véhicule de demain n’aura aucun rapport avec les projections attendues par les spécialistes. Nous devons choisir parmi ceux qui seront dans le haut du pavé dans un futur qui n’est pas aussi lointain comme on pourrait le penser. Si cela est essentiel, le dimensionnement de notre usine ne peut en aucune manière se contenter des besoins du marché local, sans quoi sa rentabilité serait aléatoire, voire impossible, eu égard à une faible économie d’échelle. C’est pourquoi le Maghreb de l’automobile peut être facteur d’accélération de l’Union politique et permettra non seulement de s’assurer un volume important du marché mais également de développer une sous-traitance complémentaire génératrice d’emplois pérennes.
La complémentarité de l’usine Renault de Tanger doit être intégrée dans les négociations avec le constructeur pour permettre au Maghreb de peser sur le destin économique de nos pays, faute de quoi, nous risquerons de rester à jamais à la traîne des restructurations industrielles dans le secteur automobile. Il va de soi qu’il s’agit là de politique industrielle et c’est précisément cet aspect qui devrait être mis à l’avant d’une construction maghrébine qui bute sur un nationalisme exacerbé qui n’est pas dans l’intérêt de nos pays respectifs, l’avenir appartenant aux ensembles régionaux. Il va sans dire qu’un secteur aussi stratégique que l’automobile ne doit pas être pris à la légère et ce n’est pas dans la Bourse ou le casino que son sort doit être réglé. Les experts les plus avertis doivent en étudier tous les aspects, politiques et économiques, à même d’assurer à nos pays la perspective d’un développement programmé et harmonieux.
Qu’y a-t-il de surprenant que la famille Peugeot ne soit pas hostile à l’arrivée de capitaux algériens dans PSA ? Mais sa survie qu’elle cherche désespérément à défendre ne lui laisse aucune autre alternative que le premier investisseur tenté par l’aventure. Or, il est utile de souligner que les investisseurs institutionnels avertis ont littéralement ignoré ce scénario et nous espérons que notre pays n’en serait, encore une fois, ni le cobaye ni le paradigme. Rebrab, PDG et Réda Hamiani, Président du FCE, suggèrent une plus grande ouverture du marché. Qu’à cela ne tienne. Ils n’ont qu’à nous indiquer le chemin par lequel leurs entreprises ont pénétré le mur de l’Union Européenne, mais avec les moyens de l’Etat, leurs conseils sont plus aisés à prodiguer. Les secteurs dont ils ont la charge sont réputés à faible valeur ajoutée et leurs activités ne concernent que les industries manufacturières et le commerce, domaines où les risques sont quasiment nuls dès lors que l’Etat couvre leurs besoins en matières premières totalement payées en devises.
Le secteur automobile, pour s’y engager demande autrement plus de réflexion qu’un bricolage à la va-vite annoncé entre deux portes.
Il y a bien longtemps que nous avons délaissé toute stratégie de développement cohérente pour nous satisfaire de schémas faits, de demi-mesures ou de pensées libérales d’un autre siècle : aller en Bourse ou placer l’épargne de l’Etat à l’Etranger alors que le pays n’entrevoit aucune solution pour résorber un chômage de masse relèvent d’un mauvaise vision de la gestion macroéconomique. Seuls les grands projets industriels dans les secteurs de la mécanique, de l’électronique ou des énergies renouvelables sont à même d’assurer au pays des réserves d’emplois appréciables doublement : par le nombre d’emplois créés et par leur durée qui, appréhendés dans cette seule vision, pourront largement contribuer à la stabilité sociale et au relèvement du niveau de vie actuellement bien mis à mal.
En conclusion, ni l’entrée au capital de PSA, ni la réalisation d’une usine « low-coast » ou de montage avec Renault ne sont de l’intérêt du pays sans la définition d’une stratégie industrielle dans laquelle le crédo de l’automobile prend une place prépondérante dans une perspective d’intégration maghrébine. Sans le Maghreb, point de salut pour nous comme pour les autres, nous le devons à nos peuples respectifs. C’est de cela qu’il s’agit. Boursicoter avec les moyens de l’Etat, c’est aller vers des aventures périlleuses que mêmes les pays rentiers évitent.
Par Abdelhamid ABDEDDAÏM.
je crois que l’automobile va vers une très grande crise que personne ne prévoit c’est celle de la saturation…Déjà les signes précurseurs commencent a se voir a bel abbes..entre 9 heures et 17 heures y’a plus de place ou garer sa voiture…
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