Chronique du jeudi: LES FLEURS SE SONT FANÉES, LE BOTULISME PROSPÈRE

Il y a quelques temps, deux à trois semaines, je ralliais notre belle Cité par l’autoroute Est-Ouest. Au niveau du premier rond-point de la bretelle, celui donnant sur Ain-Témouchent et Tessala, je fus accueilli par une fresque de fleurs achalandées de manière magistrale, suivant une géométrie fortement attractive, sur un superbe gazon qui ferait pâlir de jalousie la pelouse de l’Emirates Stadium, le tout orné de majestueux palmiers, pourtant encore à l’âge de l’adolescence. Le parterre fleuri du rond-point qui mêle le rouge-rose des géraniums, le jaune des marguerites, mais aussi le blanc, le bleu, d’autres fleurs que mes connaissances rudimentaires de botanique ne me permettent de nommer, s’avère un antidote radicalement efficace contre le stress cumulé une journée durant, fait oublier toute la pression générée par les vaines tentatives d’achat en cours de route de pastèques, melons et autre raisin, en raison des prix dépassant les capacités d’un portefeuille désormais assimilable à une peau de chagrin. Le voyageur qui rallie Sidi-Bel-Abbès, ne peut s’empêcher d’être ébahi par le paysage que lui offre ce petit rond-point exaltant la joie de vivre, le bonheur qui nous fait surement aimer la ville qu’on s’apprête à visiter. Il faut dire que je ressentais une grande fierté, de constater que l’on était capable d’enjoliver notre environnement autant que les villes des autres Pays. Je me suis souvent dis que probablement les fleurs ne pouvaient pas pousser chez nous, à force de ne voir que des sachets plastiques à la place; mais ce rond-point m’a, pour un temps, contrarié pour me séduire, me réconcilier avec ma ville et peut-être même avec mes gouvernants. Il me poussait à conclure que finalement il est simple et facile de faire beau. En l’espace de quelques jours, cet espace géographique est passé du désert repoussant à un petit jardin fleuri égayant et tout à fait vert. Ce jour, il était encore entouré de jardiniers – probablement relevant de la société prestataire qu’ont choisi nos gouvernants – en train d’apporter les dernières retouches et d’arroser. Je me suis alors dit qu’on avait tort de critiquer à la tout-va. Après la Macta 1 et 2 et en l’attente du 3, du Lac de Sidi-M’Hammed Benali 1, 2 etc… du jardin public 1, 2 également etc…, l’embellissement de la Cité, touche désormais l’ensemble de l’environnement : Rond-point, espaces verts, trottoirs… Et je me mis à rêver de pouvoir un jour m’asseoir au bord de la Mekerra et jouir de la limpidité de son eau qui traverse ma ville, sur un gazon orné de marguerites aussi belles que celles de «mon» rond-point, du moins c’est ce que promet le méga projet prévu à l’image de celui de Oued El Harrach qui, semble-t-il, a constitué la muse inspiratrice. Mon rêve ne dura pas longtemps. Comme je prends régulièrement l’autoroute, j’ai hâte de rallier «mon» petit rond-point pour admirer les fleurs et m’enorgueillir de la beauté ressuscitée de ma ville. Mais quelle déception! Le bonheur n’aura duré que l’espace d’un rêve. A peine deux à trois semaines. Où sont passées «mes» marguerites? Où sont passées mes autres fleurs? Rendez-moi mes couleurs. Je n’ai plus envie de revoir un sol jauni jonché de sachets plastiques. Je n’aime plus ce bleu clair qui les caractérise après le noir. Au niveau de «mon» rond-point, les fleurs ont complètement disparu après avoir été asséchées, le gazon commence à jaunir ; et ce n’est pas faute d’arrosage, puisque je vois régulièrement les agents de l’APC avec leur tracteur-citerne, les arroser copieusement. Je crois que c’est beaucoup plus un problème d’entretien, de semis, de variété et de suivi. Le jardinage est un métier. On ne peut créer un paysage avec des fleurs, des plantes et des arbres ornementaux et partir pour les laisser se débrouiller avec la sélection naturelle. Les fleurs sont parties aussi vite qu’elles sont venues. La frustration est d’autant plus pénible que j’aurais préféré ne pas l’avoir constaté du tout pour éviter la désillusion. J’aurai aimé rester dans ma critique acerbe, voire dénigrante, pour me soulager de tout ce fatras fait de dilapidation, reste à savoir combien a couté, l’aménagement de ce rond-point pour finalement rester dans sa configuration initiale, sinon pire. La règle chez nous, c’est de réfléchir concevoir et réaliser des projets pour les laisser ensuite à l’abandon. L’ensemble des pelouses naturelles de l’ensemble des stades d’Algérie réalisées avec des montants astronomiques ont été abandonnées faute d’entretien pour être plus simplement remplacées par du synthétique qui ne demande aucun suivi. Les trottoirs de toutes les villes du Pays sont refaits chaque année faute d’entretien et de discipline civique des citoyens. Les routes sont bitumées chaque année… Cette négligence dans le travail générée par une politique de rente séculaire ne saurait s’accommoder d’un développement pourtant bien initié dans les années 70. L’exemple de la santé est édifiant. Le développement d’un Pays se mesure aussi à son comportement vis-à-vis de certaines maladies. Après l’indépendance, la tuberculose figurait parmi les maladies qui causaient le plus fort taux de mortalité. La politique de santé développée, par la création de DAT (dispensaire antituberculeux) dans chaque Wilaya. Ils assuraient le dépistage, le traitement gratuitement, la prévention et la déclaration obligatoire. Le malade qui échappe à son traitement faisait l’objet d’un mandat d’emmener, hospitalisé et traité gratuitement. A la fin des années 70, cette maladie fut totalement éradiquée. Il en est de même pour la rage, les poux etc… Or, force est de constater que toutes ces maladies du sous-développement et que l’on qualifie scandaleusement «maladies du pauvre» reviennent en Algérie, mettant en évidence une paupérisation alarmante et dangereuse, du fait du fossé qui se creuse entre une frange minime de la population constituée des rentiers et celle, beaucoup plus nombreuse, constituée du reste. Si la tuberculose sévit de nouveau en Algérie, il ne faut plus s’étonner de voir que la rage tue des citoyens à Ain Témouchent et que le botulisme est à plus d’une dizaine de victimes à Batna avant d’enregistrer une nouvelle victime à M’Sila. Alors, si le botulisme, la tuberculose, la rage font de victimes aujourd’hui, ce n’est là que le reflet d’un comportement inique tant de nos gouvernants que de nous-mêmes, comportement similaire à celui qui fait que «mes» fleurs se fanent au niveau de «mon» rond-point. Que Dieu nous préserve du Typhus,de la Peste….

djillali@bel-abbes.info

One thought on “Chronique du jeudi: LES FLEURS SE SONT FANÉES, LE BOTULISME PROSPÈRE

  1. Si Djillali

    Ce que vous avez écrit m’a fait rappeler une histoire que j’aimais bien mais comme elle est trop longue et pour ne pas lasser les lecteurs , j’ai choisi ( en ctrl+C) quelques paragraphes du début et de la fin de ce conte dont le titre est : LE PAYS SANS FLEURS
    “………Un grand malheur s’abattit sur la nature ; toutes les fleurs, celles des bois, celles des prairies, celles des collines, celles des bords de mer, celles des berges des rivières et celles des lacs moururent instantanément. Pas une seule ne survécut, ce qui fit fuir tous les animaux, les oiseaux, les papillons et les insectes. Après leur mort, le pays, jadis si beau et si fleuri, devint rapidement un désert, ne laissant aux habitants que leur imagination pour voir des fleurs. Mais les enfants, qui n’avaient jamais connu ces merveilles, ne voulaient pas croire les anciens.
    « Vous ne racontez que des histoires » leur disaient-ils. Et ils s’en allaient tristes, dans les étendues grises d’un pays sans fleurs.
    Parmi tous ces enfants, il en était un qui ne pouvait imaginer que tout eût disparu pour toujours. Lorsque sa mère, lassée de raconter l’ancien temps, se taisait, il réclamait encore et encore d’autres histoires, car il aimait entendre parler de la beauté des fleurs.
    Il pensait que, lorsqu’il serait un homme, il partirait à la recherche du grand sorcier et lui demanderait de redonner de la couleur au pays……..
    Les années passèrent Un jour, il fut grand. Son amour des fleurs avait grandi avec lui.Il s’en alla donc trouver sa mère et lui dit : « Mère, je vais m’en aller à la recherche du grand sorcier et lui demander de nous rendre les fleurs»………………Après un long voyage ………… Tout à coup, derrière lui, l’enfant entendit une voix qui lui demanda ce qu’il était venu chercher sur la plus haute des hautes montagnes.
    « Je suis venu, dit-il, pour rencontrer le grand sorcier et lui demander de nous rendre les fleurs et les insectes. Un pays sans fleurs, sans oiseaux et sans abeilles est triste à mourir. Seule la beauté peut rendre les gens bons, et je suis certain que ceux de mon pays cesseraient d’être méchants si le sorcier leur redonnait les fleurs. »……………

    C’est vrai que ça fait une belle lurette que je n’ai pas vu de papillons à SBA et Dieu sait que, tout petit , j’en faisais la collection …….POURQUOI ????????

    Merci khayi Djillali , j’espère que vos fleurs fleurissent un jour !

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