Hamid Djili, violoniste et meddah De la musique andalouse au conte chanté Natif des bords dela Mekerra, Hamid Djili musicien jusqu’au bout des ongles semble connaître un «état de grâce» et sentir que son art a mûri. Et pour cause sa nouvelle expérience de scène lui procure cette joie que l’artiste du terroir reçoit comme des odeurs de son «trab» lyrique et parsemé d’une poésie du paysage cher aux Oueled Slimane de Boudjebha à Mlata. Bien sûr avec ses figues de barbarie, ses champs labourés et ses pluies et ses soleils des saisons. Son spectacle actuel, intitulé «Mémoire», est placé sous le signe des évocations des grands «chioukhs» de la rime et du Melhoun et muni de son violon qui devient pour un instant un rbab. Cet artiste va nous raconter en une heure les emphases, les complaintes ou encore les élans de ghazal autant de Ben Msaïb, de Benguitoun que de Mestpha Benbrahim. En quelque sorte une odyssée à la fois géographique de l’ouest mythique, de Maghnia à Tlemcen, Mostaganem, Sidi Bel-Abbès et d’autres bourgades où les vers ont traversé les âges et demeurent vivaces dans les esprits. C’est cette ambiance que Hamid Djili rend avec son spectacle «Mémoire», tout son parcours et marque pour Hamid Djili une grande étape qui le mène déjà vers un espace du théâtre populaire et de la halqua. Il confiera que «la musique et la poésie ont besoin de se rencontrer et il n’y a pas mieux endroit que le théâtre et c’est cette alchimie qui rend au souffle du jeu sa force. Il y a l’écoute et les yeux, maintenant aux gens d’apprécier». Rappelons que Hamid a fait ses débuts dans les années 80, il a suivi des cours de solfège au Conservatoire de Sidi Bel-Abbès. A travers ce cursus, il «accorde ses violons» et apprend les rudiments de la gamme musicale. Il se retrouve deux années plus tard dans le groupe «Amel andaloussi» dirigé par Abdelkader Bedjaoui. A l’époque, la troupe de Mohamed Bedjaoui sillonnait le pays de scène en scène. Quand on sait que Bedjaoui son maître fait partie de ces grands artistes qui passent et qui restent dans l’anonymat. A titre indicatif, ce maître modeste a eu à former une pléiade de chanteurs dans le genre andalou. L’apothéose de Hamid Djili s’est accompli en 1987 lors du festival de malouf à
Constantine et le Festival du printemps musical d’Alger. Là, Hamid a compris que sa vie était toute tracée. Dans les années 90, il rejoint l’orchestre «El watar el arabi» sous la conduite de Hakim Haddidi. Comme tout artiste intégral, Hamid partage avec d’autres l’aventure avec ses hauts et ses bas. Il aura à se produire hors des frontières, grand moment et grande émotion. Hamid, peu à peu, cherche du solo, cherche une forme à lui, une
racine qu’il doit exprimer, son terroir, son «trab». Avec Mahi Meslem, il se lance dans le conte. Les deux compagnons créent la coopérative «Machaho», les deux munis de leurs sacs iront de place publique en place publique, narrer des récits fantastiques de nos légendes entre autres les contes adaptés des œuvres de Mouloud Mammeri. Hamid accompagnant Meslem au violon. Grand succès surtout au niveau des établissements scolaires. De ce passage, il gardera un beau souvenir mais aussi une expérience. Il décide de devenir lui-même son propre metteur en scène et il interprète au son du violon d’abord, des textes de poèmes célèbres. A titre d’exemple, voici des extraits des poèmes prévus dans son spectacle, un peu pour en avoir l’avant goût. De Ben Msaïb: «Les paupières meurtrières/ sabre tranchant ciblant face à l’assemblée/ O tendre père, mon cœur est rompu à force de dire non/ Puisque tous m’ont conseillé de refuser mon élan/ Puisque je l’ai liée à mon acte de justice». Avec Mestpha Benbrahim, il s’écrie: «Je chasse le fauve et la gazelle/Je mange de ce que ma force me ramène/ O
celle qui scintille, toi qui appartient à l’étoffe riche et aux cafetans/ Depuis jadis il monte le coursier, altier et ne jure par la tête de son cheval». D’autres grands ferment la
marche pour agrandir le cercle». Hamid Djili continue son chemin, un violon à la main, le regard plein de ces «kalams» inspirés et nous narre des destinées autant tristes qu’imaginaires.Notons au passage pour l’Histoire que Hamid est le petit fils de Sadek Djili poéte et musicien qui on s’en souvient a figuré dans un film « Un de la légion » avec Fernandel et qui a immortalisé le grand père comme document vivant pour la mémoire. Sur ses traces Hamid continue son théâtre cette fois un spectacle intitulé « La Séance » toujours s’inscrivant dans la restitution du patrimoine populaire. Ce Ould Slimane continue à narrer le sens du melhoun pour les nouvelles générations et sait qu’on l’écoute. Il s’agit de l’aider et de soutenir concrètement sa coopérative Rahba qui a besoin des autres pour offrir de beaux contes et de belles légendes.