Qui peut oublier Omar, Aini , Commandar , Hamid Serraj , Meriem et tant d’autres personnages du roman phare de la littérature algérienne « la grande maison » de Mohamed Dib et cela nous renvoie à ces questions durant l’ère coloniale formulées par le jeune Omar derrière lequel on reconnait l’enfant Dib , un retour vers un âge où l’on découvre , l’on observe , l’on mémorise tout en ayant la curiosité de comprendre le monde des adultes et à travers le périple de Omar peu à peu Dib nous reconfigure ,
témoigne de l’Algérie de l’entre guerres avec la sale guerre des occidentaux » et la montée en puissance de la voix de « l’ISTIQLAL » et de voir dans ce haouch toute la composante en miniature de la société algérienne et surtout ce chant profond du peuple émouvant , lyrique , vrai fresque , une malhama d’un pays sous occupation , colonisé à plusieurs niveaux autant territorial que culturel que religieux au point où les européens ou les pieds noirs disons le objectivement ont pratiqué une véritable politique de l’apartheid , il n’ y a qu’ à suivre le récit de Kommandar et son réquisitoire contre la guerre 14/18 et qu’Omar frappé par la cruauté des hommes commence à s’éveiller aux
horreurs de l’existence ou quand il fréquente Hamid serraj et que jeune conscience national perçoit déjà la prison coloniale et pourquoi il faut la détruire , il découvre que les hommes meurt pour être libre et dans le regard d’un enfant cela reste gravé pour longtemps . Pourtant Omar ne comprend pas tout même s’il ressent que ce que lui enseigne l’école des français n’est pas vrai dans la réalité. Et le plus grand drame qu’il subi, c’est la faim. Voici un extrait du roman qui certainement nous interpelle plus d’une soixantaine d’années : « En attendant, Omar prenait le jeu au sérieux. Sa joie d’exister était si forte et il s’y donnait si entièrement qu’il était de la sorte suffisamment occupé. Il
vivait pour ainsi dire impunément, et tout à son plaisir. Il s’abandonnait à
l’insouciance, protégé qu’il était par son enfance. Il avait terriblement faim, toujours, et il n’y avait presque jamais à manger à la maison ; il avait faim au point que certaines fois l’écume de sa salive se durcissait dans sa bouche. Subsister, par conséquent, était pour lui l’unique préoccupation. Il était cependant habitué à n’être jamais rassasié ; il avait apprivoisé sa faim. A la longue, il put la traiter avec l’amitié due à un être cher ; et il se permit tout avec elle. Leurs rapports s’établirent sur la base d’une courtoisie réciproque, attentive et pleine de délicatesse, comme seule une ample compréhension saurait en faire
naître entre gens qui se jugent d’abord sans la moindre complaisance et se reconnaissent dignes l’un e l’autre. Grâce à cette entente, Omar reversa toutes les indifférences, filles de la peur et de la paresse. Et s’il avait songé à donner voix à ce qui était profondément enfoui en lui, il se serait à n’en pas douter exprimé en ces termes : « Mère bien-aimée, Mère faim, je t’ai renversé les mots les plus tendres… »
– Que de soirs il s’agenouilla à ses pieds, l’âme et les yeux absorbés dans le plus vaste amour, tandis qu’elle souriait, souriait… et s’approchait de lui, l’environnait de sa
douce et indulgente présence. Et lui s’assoupissait d’un sommeil vigilant sous le mouvement de ses mains légères, trop légères. Il voyait le combat de sa mère Aini pour la survie , son travail de forçat pour gagner une miche de pain pour ses enfants , il
voyait que dans la grande maison , les locataires n’étaient pas riches mais malgré cette misère , chacun éprouvait pour l’autre un élan fraternel , une identité partagé , d’une oppression commune , d’un rêve commun , et ces « petits gens » en leur for intérieur priait Dieu de les libérer de ce monstre européens , de le rejeter à la main et un militant comme Hamid Serraj organisait , structurait ce mouvement révolutionnaire , cette
idée de l’Algérie indépendante . La poésie de Mohamed Dib n’est pas seulement dans les mots, bien plus elle émane de l’intérieur des personnages aussi tragique, que pleine de cette humour populaire, une foi silencieuse et baigné d’une douceur qui nous manque aujourd’hui, qui peu à peu s’étiole des cœurs. Pourtant quand Mustapha Badie à adapté l’œuvre à la télévision beaucoup se souviennent encore de l’émotion que provoqua le feuilleton dans les grandes maisons algériennes même aujourd’hui quand il nous
arrive d’écouter la voix off du commentateur , des larmes tremblent dans les yeux pour dire que quand un écrivain creuse dans ses entrailles pour écrire ce qu’il y a de plus profond , il nous lègue le beau poème d’un peuple , et le roman « la grande maison » est celui-là…. Mohamed Dib a eu cette lumineuse réflexion sur la condition humaine « : C’est vrai qu’on a des problèmes, qu’on souffre, et qu’on sent que tous s’écroule au
tour de nous mais il ne faut jamais oublier qu’il y quelque part dans cette terre des êtres qui souffrent bien plus que nous il y a même ceux qui n’ont rien à manger, ceux qui n’ont ou passer la nuit,… Cette petite évocation du roman « La grande maison » est une sorte de mémoire de ceux qui tout écrivant en langue française ont peut-être les plus exprimés « l’âme algérienne » et ceci est une preuve que l’amour de la patrie
est d’amour un acte d’amour.