Le fou ne perd tout sauf la raison d’être libre…

Quelle bonheur quand je vois au petit matin en taxi ou en marchant,  ces hommes et ces femmes  heureux de vivre ,  tous  heureux d’être bien logés , chacun ayant sa chambre avec tout ce qu’il faut , tous heureux d’avoir un très bon salaire , des enfants qui passent leurs vacances d’Eté au bord de la mer dans des bungalows , heureux de vivre l’indépendance grâce à des braves qui ont donné leur vie pour recouvrer  sa terre , sa fierté et sa dignité ..C’aurait été vrai si je n’étais allé  cette « petite « khahoua » du centre ville. Un jeune homme imberbe qui parle à un autre «  Moi je ne reste pas dans ce bled ! Baghi nehrag !  L’autre de lui dire «  Ecoute je préfère me brûler la cervelle que d’aller me perdre chez les kouffar.. » Je tourne la tête vers une autre table. Le premier dit à un autre «  Mhaynek, tu sais l’affaire est dans le sac, çà y est  le container arrive demain matin  mais qu’est-ce j’ai pu donner de la chipa ! »  Et j’entends, et j’entends puis entre un brun costumé, chauve par ailleurs, cartable sous les aisselles ; c’est  un « kari ». Il m’observe froidement en coin, s’assoit, au même moment un autre le rejoint. Ils disent ceci «  Alors, la promotion tu l’as eu ? » «  Et comment ! Avec « el mâarifa » c’est le meilleur des mondes …Et encore un autre s’écrie «  Elyoum,  si tu veux ta chose embrasse le museau d’un chien » Et j’entends et j’entends.Puis arrive un mendiant  d’apparence, il fait les tables en répétant « Fi Sabil lilah ! Fi Sabil lilah ! » Tous sont pris dans le brouhaha, un bruit d’enfer. Soudain le mendiant se met au milieu et hurle «  Maintenant, çà suffit vous allez écoutez ! » Et d’un coup le silence s’impose, on lève les têtes vers lui… «  Hein ? Quand j’ai répété fi Sabi lilah ya el Moumnine personne n’a porté attention à  ma douleur, et maintenant que j’élève le ton vous  savez que je suis là ! Moi je suis Ali la pointe et je suis venu pour vous dire «  Alors nous on est morts pour des prunes ?  C’est çà le serment des chouhadas ?  C’est çà notre testament ?  Mais sachez  que tant qu’il y a des « Rjals »  El bled  reste debout ! » . Un serveur accourt  pour tenter l’attirer vers la sortie quand deux infirmiers  entrent au café, « C’est un malade mental, on l’emmène à Sidi Chami  ,il y a une semaine qu’on le cherche ! »Ils s’approchent  de lui et lui disent  «  Ali  allez , le fourgon t’attend ,  on rentre à l’hôpital ! » Ali  regarde une dernière fois tout le monde et déclare avec force «  Ne vous en faites pas je reviendrai !  » Les deux hommes disparurent comme une étrange apparition. Le choc passé,   tous  ont marmonné «  Yakhi mahboul ! »  . Si le hasard veut que vous rencontriez  Ali, il dit vrai, écoutez le ! il m’a rapellé le personnage de Ali dans ” L’opium et la bâton” et la fameuse tirade de Rais ” Ali mout wagaf !” …Et je finit ma petite gorgée de café tinté et me dirigeais vers mon café littéraire de chez Taliani…