LE MONDE DU TRAVAIL ET L’IMPOSSIBLE REFORME

Les lois qui régissent le monde du travail datent, pour l’essentiel, de l’année 1991, avec quelques amendements opérés 5 années plus tard. Depuis, elles stagnent alors que l’environnement général évolue sans cesse.

Tous les codes et toutes les lois fondamentales touchant à la vie civile, économique, financière et politique ont été sensibles à cette évolution. C’est le cas du code civil, du code du commerce, du code pénal, du code de procédure pénale, du code de procédure civile complètement abrogé, du code des marchés publics, des lois électorales…etc. Sauf les lois sociales sont restées en l’état.

Quels sont les obstacles à ces réformes si nécessaires, si souvent promises, mais toujours restées lettres mortes? Serait-ce la sensibilité du sujet et l’inflammabilité du monde du travail?

Tout praticien du droit averti sait que les lois de 91 étaient, dans leur lettre et dans leur esprit, assez favorables aux travailleurs. Elles étaient porteuses d’un ordre public social protecteur pour la classe laborieuse. Car au même moment de leur promulgation, d’autres lois concomitantes consacraient l’économie de marché, et, de ce fait, permettaient l’émergence d’un patronat privé forcément vorace et peu respectueux des droits de son personnel.

Reformer les lois sociales, ne peut donc signifier que la remise en cause des acquis sociaux hérités des lois Chadli Bendjedid. Autrement dit toute réforme apparaîtrait comme régressive et donc conçue par le monde du travail comme un casus belli. On voit cette politique se manifester dans le domaine du droit syndical et celui sous jacent du droit de grève, et on sent en même temps la montée en puissance de la réaction furieuse des travailleurs et de leurs syndicats.

D’où l’hésitation de la part du pouvoir exécutif à faire fonctionner sa machine. Il sait qu’il peut faire confiance aux députés qui voteraient ses lois sans peine, mais il appréhendé la réaction de la rue.

Faute d’intervenir législativement, on observe sur le terrain qu’il délègue la tâche difficile à la jurisprudence, surtout celle de la cour suprême. Durant la période de gel, celle-ci a en effet produit des normes que les lois n’édictent pas et qui ne sont pas l’émanation de la volonté souveraine exprimée indirectement en 1991. Ce faisant, elle a violé une règle sacrément observée dans les autres domaines de sa compétence. Cette règle est la séparation des pouvoir qui interdit au juge de légiférer.