Il y moins de trois décennies, on aurait eu beaucoup de mal à mettre ce confetti de territoires, à peine plus grand que la Corse sur la carte.
Vivant pratiquement sous la tutelle et dans l’ombre de l’Arabie Saoudite, et guettant avec appréhension les calculs stratégiques de son voisin iranien, le Qatar est apparu sur la carte médiatique par le fait d’un coup d’Etat d’un fils contre son père. Le Cheikh Hamad qui avait renversé son père le cheikh jouisseur Khalifa, ( plus souvent présent dans les casinos de la Côte d’Azur que sous les chaleurs caniculaires de Doha) en juin 1995 s’est trouvé fort marri de constater que les caisses étaient vides et il se tourna vers son sauveur du moment, la société Total qui régla tous les chèques en instance. Sa gratitude envers cette multinationale et l’Etat français date de cette période. S’abriter à l’ombre du hard power et prospérer grâce au soft power pour assurer le développement de l’Emirat et sa pérennité allaient constituer l’armature géo-stratégique de l’Emirat gazier, même s’il dispose également de ressources pétrolières.
Bouclier américain et jeu Qatari:
Les muscles de la puissance militaire américaine pouvaient donc se déployer dans la plus grande base militaire de la région pour contrôler puits et poudrières du Moyen-Orient. Le petit Qatar qui dispose maintenant de réserves financières inépuisables ne pouvait assurer sa survie et l’intégrité de son territoire en raison de sa faiblesse démographique ( 200.000 qataris) par le recours à la dissuasion armée, mais il allait mettre à profit, et avec brio,
toutes les dimensions du soft power: ou de la manière de convertir une puissance économique et financière en influence politique, diplomatique et médiatique.
Quelque soit nos réserves à l’égard de ce pays, nous ne pouvons qu’admettre qu’il suit une stratégie bien élaborée et bien pensée.
Les américains, à la sortie de la deuxième guerre mondiale avaient cerné que la distribution de chewing-gum, bas résille, de coca-cola, de jeans ou l’identification aux héros de hollywood étaient garants d’une attractivité, d’une ‘aimance’ par lesquelles on se posait en modèle à émuler. Ou à copier.
Le Qatar a fait avec ses moyens en boostant sa force militaire, déployé son influence religieuse et ouvert son carnet de chèques. la formule est magique et les « guignols de l’info » qui caricaturent l’Emir en visiteur arrogant ‘qui ne parle pas à toi’, jouant au jeu du monopoli pour se saisir de tout ce qu’il y a à acheter dans les capitales les plus prestigieuses du monde: hommes et femmes, palaces, clubs de football font mouche! Le dernier homme sandwich, l’avatar de la mondialisation, le spice boy Bekham sera la dernière prise.
Non l’Emir n’adore parler qu’aux puissants, aux VIP qu’il inonde de cadeaux et qu’il courtise et vice versa. Pour le reste, sous le travesti de modernité, il veillera à préserver son alliance tribale et à faire éviter des contacts trop profonds avec les expatriés. Ses chargés d’affaires, passés par les ‘best universities’ sont de redoutables négociateurs qui ne laissent rien au hasard. Nouant des contacts aussi bien avec des capitaines d’industrie que des people, ils croient à la diplomatie du carnet d’adresse. Chez nous Fakhamatou était apprécié pour la richesse de ses contacts, sa capacité à les joindre et le fait qu’il avait frayé avec les puissants du monde, du temps où la diplomatie algérienne existait! Inversement, il gardera de la tendresse pour les Qatari qui l’on choyé au cours de sa traversée du désert.
La scandaleuse Rachida Dati qui aurait entretenu une liaison avec le procureur du Qatar prenait l’avion de Doha chaque semaine et se répandait sur le nouvel eldorado. Ah Zina quand tu nous tiens!
Il aurait été également proposé à Sarkozy, l’ami intime, la direction d’un fonds d’investissement Qatari et la proximité de l’ex-président avec le cercle du pouvoir qatari passe désormais avec des liens familiaux car il est à tu et à toi avec l’influente femme de l’Emir. Elle est fascinée par Paris et rêve de faire parler français au Qatar. Son amie de cœur s’appelle Carla.
Le soft power, la stratégie Qatari:
Ce concept théorisé par le politologue Josef Nye est l’alternative intelligente à la vieille méthode du bâton et de la carotte. Même les ânes, dit-on n’avancent plus avec la promesse de la carotte et les coups de bâton font des ennemis déterminés et jurant votre perte.
Le Qatar, en recherche de visibilité a déployé sa stratégie dans trois vecteurs:
– la prédication religieuse pour conforter le camp sunnite;
– l’investissement dans les secteurs du sport;
– l’apport financier ou la promesse de ce dernier à ceux qui entraient dans la stratégie globale.
Le Qatar a compris qu’il lui fallait beaucoup se montrer pour exister. Sa vitrine et son arme stratégique et médiatique sera la chaîne El Djazira. A sa création , cette chaîne, au delà des réserves sur son rôle qui viendront plus tard, a gonflé d’orgueil le téléspectateur arabe qui a pu en admirer la liberté de ton et le professionnalisme de ses journalistes. Encore une fois, l’Emir aura joué de chance en récupérant à cette date le projet d’une chaîne BBC-Arabie Saoudite destinée au monde arabe et qui avait capoté. Des journalistes sur la place de Londres m’ont dit qu’ils avaient été contactés à cette date et beaucoup seront de l’aventure. Avant de déchanter.
Je crois personnellement que le succès des premiers temps de cette méga-vitrine médiatique tenait au fait qu’elle accueillait dans ses studios tous les oppositions du monde arabe, interdites d’expression chez elles. Elle avait des accents de modernité quand les dictateurs continuaient à soumettre leurs opinions publiques à des discours indigestes et infantilisants. Ils se feront ainsi des amis des nouveaux dirigeants portés par ‘le printemps arabe’ d’Egypte à la
Tunisie. Si l’Emir n’intervient pas directement, la ligne éditoriale,celle-ci reste facile décrypter:
– éviter les sujets sur le Qatar et la misère de ses travailleurs immigrés qui confine à l’esclavage;
– ne pas couvrir les émeutes chiites de Bahrein et éviter d’irriter
l’Iran et l’Arabie Saoudite.
– s’adresser à la rue arabe au delà de ses dirigeants;
Finalité de la politique d’influence:
Depuis l’affaiblissement de l’Egypte et les problèmes internes du royaume saoudite, le petit Qatar, désormais au centre de toutes les conversations…et questionnements rêve de s’introniser centre de gravité du monde arabe. Il aurait ainsi, avec moins de 200.000 habitants du cru, une influence plus grande que celle des millions d’habitants des pays arabes majeurs. Qatar 1-Egypte 0!!!
Le Qatar qui a eu le bonheur de découvrir de nouveaux gisements de gaz dont l’exploitation peut couvrir 175 ans veut sortir du pétrolisme et de la redistribution classique de la rente. Convaincu de la fin programmée des sources d’énergie fossibles, il met en scène une stratégie alternative pour gérer l’avenir à long terme afin d’éviter que les pays importateurs ne mettent au point des techniques trop efficaces pour réduire la dépendance énergétique.
En attirant des universités prestigieuses, des chercheurs, des succursales du Louvre, en visant à intégrer le club de la francophonie, il vise un saut qualitatif et la conversion vers une économie durable, allant au delà de l’horizon gazier.
Ce Brain Trust qui attire les talents de l’économie globalisée ,prépare une ÉCONOMIE DU SAVOIR , dispensée en anglais et en français.
L’étape suivante, sera de faire breveter toutes les découvertes d’une nouvelle élite intellectuelle.
Aujourd’hui si la chaîne El Djazira fait apparaître plus de suspicion que d’éloges, c’est qu’elle a été normalisé et que son agenda médiatique est lisible, du moins pour certains. Par exemple, elle n’aura jamais rapporté la tentative de coup d’Etat sur l’Emir en 2011, ni la dotation en armes au profits de mouvements djihadistes en Libye et au Mali. En Occident, l’humeur est en train de changer et beaucoup s’interrogent sur le double-jeu Qatari qui ne fait plus rire personne!
Le vecteur du sport:
La politique d’accueil de tous les évènements sportifs majeurs dans le tennis, le sport automobile, l’organisation de la coupe du monde de hand-ball en 2015 et de foot en 2022 signalent un changement d’échelle et toujours la même stratégie. Plus le pays est connu, plus il peut résister aux appétits de ses voisins. L’achat du Paris Saint Germain ne fait pas que des heureux et fait grincer les dents des nationalistes français. Le fan lui cautionne la politique de visibilité du Qatar car il veut voir plus de vedettes et ‘zlataner’ fait désormais partie du lexique français , comme « strompfer » à une autre période.
Le continent inconnu:
Dans cet Émirat, il existe un véritable marché des esclaves, ces innombrables travailleurs immigrés ne jouissant d’aucun droit syndical et que l’on cache à la vue des VIP. Cachez moi ce gueux que je ne saurai voir, même s’il nettoie mes latrines et construits les gratte-ciel. Le contrat de travail à la Qatari, esclavage humain moderne atteint son point culminant avec plus de un million cinq mille travailleurs, exploités, sous-payés et relégués dans des bases de vie qui évoquent l’univers concentrationnaire. Le système du sponsorat, basé sur la précarité et la toute puissance du sponsor est un véritable déni à la dignité du travail. La pratique de ‘séquestrer’ les travailleurs en leur confisquant leurs passeports à l’arrivée et d’exiger un visa de sortie font vivre aux travailleurs immigrés des situations cauchemardesques.. Le viol et les sévices contre les femmes philippines sont trop nombreux pour être tous évoqués et enfin, « Human Right Watch » que nous avons harcelé de demandes pour se saisir de cette question fait mine de s’en préoccuper. Si peu et si tard!
Le Qatar, paradis ou mirage?
Chacun se fera sa religion!
Paradoxe des paradoxes, il n’y a pas de librairies au Qatar. On aurait aimé que l’Iman Qaradoui s’en offusque et leur rappelle: Lis au Nom de Ton Dieu. Iqra!
Salam à tous!
Pour Karim , vu votre intérêt pour la question des fonctionnements des régimes totalitaires et leur rapport à l’Islam politique, je vous recommande la lecture d’une thèse présentée en 2009 par un jeune chercheur Pierret Thomas sous la direction de Gilles Keppel.
L’intitulé en est:
Les oulémas syriens au XXème et XXIè siècles. La tradition comme ressource face aux défis du changement social et de l’autoritarisme.
Cet éclairage objectif permettrait de mieux appréhender le rôle messianique du Qatar et le conflit syrien (notre frère jumeau, la communauté chrétienne en moins)
L’action des etats-post coloniaux, avec création d’un clergé religieux et instrumentalisation du fait religieux peuvent contribuer à expliquer les remous du monde arabe.
Et le rôle de la tradition comme outil de résistance face à une globalisation confrontée à l’ancrage sociologique et les tensions liées au processus de libéralisation économique qui demandent des analyses profanes.
Amicalement
Bonsoir,
Il faudrait peut être aussi insisté que : Doha joue un rôle « partout » où il y a des « mouvements islamistes ». Tout comme c’était le cas en Egypte,Tunisie,Libye et que c’est le cas en Syrie. Le Qatar a en effet, a reconnu cette « vérité-réalité ». Alors Il faudrait ajouter peut être et faire le lien « analogiquement » avec le MALI oui LE MALI .Le Qatar a-t-il des visés stratégique sur le Mali ? En effet ! Selon un chercheur en géopolitique : « Le Mali dispose d’un potentiel gazier et a besoin d’infrastructures pour le développer. Or, le Qatar maîtrise ces techniques ». Il pourrait ainsi, en cas d’un État islamique au nord du Mali, exploiter le sous-sol qui est riche en or et en uranium et le potentiel gazier. (Le potentiel pétrolier sera laissé aux gp français Total).
Le Qatar est aussi motivé par une forme « SIMPLE » d’idéologie islamiste sunnite en Afrique de l’Ouest et dans la bande sahélienne. Le Qatar jouet-il double jeu ??? Ce pays à surement développer des « thinktanks » ou (laboratoire d’idées ) sur le modèle américain et établis des stratégies de conquêtes par l’influence médiatique, économique et politique ET Sportives bien évidement à la DAVID BECKHAM.. seul la puissance militaire manque à l’appel. Mais les « mercenaires » ça existe, il n’est pas impossible que le Qatar utilise des mercenaires pour mener à bien ses projets. Alors vigilance.ATTENTION !Un petit pays peut en cacher un autre petit pays Mr AL-Hanif au sud de nos frontières. Merci d’être vigilants.
Avé fratello subridère Al Hanif,
Je dirai de toi Conjux qui veut dire tout simplement ( fait ce qui te rend heureux,sois avec ceux qui te font sourie ,risautant que tu respire et aime aussi longtemps que tu vivras.
Je me permet d’intervenir sur cette colonne non pas pour commenter l’article sur le Quatar mais tout simplement pour saluer des amis que j’ai rencontrer par l’intermédiaire de mon ami Beldjillali (Salim A, Djillali C, Djillali T et Benkhellouf K )
Je n’oublie pas mon p’tit frère Boubakar qui s’est joint à ce journal .
Toutes mes salutations —–Salvete a tutti.…Adil
salut à toi grand frere,si je me suis integrè avec mes freres et soeurs ici,c’est qu’il y’a de la place pour tout le monde! pour ce qui est du QATAR,un jour viendra où le jeu que joue les qataris deviendra surement un cauchemar pour eux!!! ce n’est pas à cause des yeux des èmirs que les fèdèrations internationnales soutiennent les differentes competitions surtout sportives! nèaumoins ce que je sait! cordialement
grand frere,vous avez oubliè de citer nos amis NOUR, GHALOUNI, NASRI d’ORAN!!!
Très bel article Sourire…et judicieuse analyse qui ne m’étonne guère, quand elle vient de vous… !
Un pays minuscule jadis qui est devenu grand, quoique l’on puisse dire…..et qui désormais, joue dans la cour des grands…!!! Pourquoi…. ??!!
Je n’ai rien à ajouter sauf peut être quelques mots. A force de côtoyer les sionistes de tous bords, y compris ceux de la Palestine occupée, l’Emir et son noyau ont pigé qu’il fallait avoir trois choses pour rentrer dans la catégorie des « Great Country »….
1- Un Médias puissant comme El-Djazira pour manier l’information …..Les politiques et les possesseurs du pouvoir n’ont plus alors qu’à étudier les comportements du public pour opérer aux choix tactiques qui leur permettront d’obtenir la réplique qu’ils espèrent de l’opinion publique.
2- Beaucoup De Blé…je parle bien sûr de l’Oseille, qu’ils investissent un peu partout et dans tous les domaines, parce qu’ils ont compris le jeu,….pas uniquement aux paradis fiscaux comme certains manchots…. !
3-La force, puisqu’ils ne l’ont pas, alors ils naviguent M3a El Wagaf, en essayant de ne pas se noyer ou rentrer dans un tunnel sans bout…. Aussi petit soit il, il tient les grands, qui savent qu’ils ont besoin de lui pour le Fric et pour faire la pluie et le beau temps….!!!!
Au fait, Sourire le mirage n’est il pas une sorte de paradis à première vue…..ou peut être que c’est le paradis sur terre qui est un mirage…!!!!
Puisque nous sommes unanimes que le Qatar est entrain de jouer… Bien ou mal…?? Ça c’est une autre paire de manche…Le temps nous le dira….!!!! Mais la question que je me pose, joue-t-il avec ou comme les sionistes……????
Mes Respects Grand Frère..!