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Les Lundis de l’Histoire: La COMMUNE MIXTE de la MEKERRA 1874 – 1962

ByKarim OULDENNEBIA

Nov 24, 2014

La « Commune Mixte » est un raccourci fort saisissant, plutôt une appellation composée mais très complexe. Toutefois, cette appellation particulièrement « heureuse » pourrait induire le profane en erreur. D’abord, une commune qui n’avait de « commune » que le nom. Un mode d’administration très original qui n’existe nulle part dans le monde. Une commune surtout dans laquelle « habitent » d’autres futures communes ! Mais pas forcément toutes puisque le « DOUAR » restera un douar durant toute l’existence de cette supposée commune ! Et Bizarrement,  le chef lieu de cette commune de la MEKERRA était bel et bien la ville de SIDI-BEL-ABBES !
L’organisation communale française en Algérie fut transposée pour la première fois, dans la zone civile, par l’ordonnance du 28 septembre 1847. La zone civile fut divisée en trois départements (Alger, Oran, Constantine) subdivisés sur le modèle français en arrondissements et communes. Mais, pour la seule population européenne à la différence de ce qui se passait en France, les maires, les conseillers municipaux étaient nommés et non élus. Les « indigènes » eux devront attendre les années fatidiques de l’après « Sénatus-Consult ». Ainsi, depuis le début, les communes en Algérie, restèrent régies par une série de textes confus pris par la puissance coloniale, avec le seul souci d’étendre et d’organiser la colonisation. D’ailleurs le nombre de cinq types de communes expérimentées prouve cette confusion ! La Commune de plein exercice, la commune subdivisionnaire (entre 1868-1874). Les deux types de communes mixtes, l’une militaire (disparue en 1874) et l’autre civil et enfin la commune indigène qui a longtemps survécu dans les territoires du sud (Elles étaient donc bien cinq).
Le système des « bureaux arabes » institué dès 1844, était un système militaire dans lequel la « circonscription locale » fut administrée directement par les officiers de l’armée d’occupation, dont la tâche était d’assurer la surveillance politique des populations, la rentrée des impôts et de faire produire aux populations les denrées nécessaires à l’alimentation de l’armée. Mais peu à peu, l’administration militaire perd du terrain. De 1844 au 5 avril 1849, un cercle militaire relevant de la subdivision d’Oran a d’abord encadré la région de Sidi Bel Abbes.  A partir de 1849, il a été érigé en une subdivision militaire. En 1856, un district de commissariat civil y fut crée, et Alfred-Villetard de Prunières fut nommé premier commissaire civil, et le 27 juillet 1875, la région fut organisée en arrondissement avec cinq C.P.E et deux communes mixtes, la Mekerra et Boukhanifis (Bouchebka) en 1878 cette dernière fut érigée en CPE, l’administration la remplaça de facto par la commune mixte de Télagh.
Parallèlement à l’expansion de la zone civile au nord de l’Algérie, le mouvement municipal se développa et donna naissance à des communes de deux sortes :
1- Communes de plein exercice (C.P.E), territoire ou la population européenne était assez nombreuse pour pouvoir gérer directement ses affaires. Cette organisation municipale « française » révélait bien le sens de l’assimilation administrative qui s’opérait en fonction et au profit de l’élément européen. La C.P.E était identique, mais pas analogue à la commune métropolitaine en France.
2- Communes mixtes (C.M) territoires ou la population européenne installée n’était pas assez compacte et dense par rapport à la population musulmane pour former une C.P.E ! Ainsi, la plus grande partie du territoire algérien était constitué par des communes mixtes, leur nombre était de 78 C/Mixtes dans toute l’Algérie du nord. Une vingtaine dans le département d’Oran dont 02 dans l’arrondissement de SIDI-BEL-ABBES .
Ainsi cette institution communale coloniale présentait une physionomie toute spéciale. Elle avait donc deux types d’administration et deux types de structures infra communales, plus réduites :
A- Les CENTRES de colonisation (Villages Européens), administrés par un adjoint spécial européen.
B- Les DOUARS qui avaient à leurs têtes un « Caïd » appelé adjoint indigène depuis 1919.
Finalement,  quelles étaient les anomalies de cette commune mixte, qui à leur tour vont nous montrer que celles-ci, étaient vraiment des communes fictives ? Voici en résumé les principales anomalies en sept points :
1°- Les communes C.P.E avaient et depuis toujours intégré d’autres DOUARS dans leurs territoires,  remplissant ainsi chaque année les caisses du budget communale.Notamment le DOUAR AMARNAS détaché à la CPE de SIDI-BEL-ABBES .Mais  alors,  où est donc la différence entre CPE et communes Mixtes ?
2°- Alors qu’il fallait un décret pour créer une C.P.E, les C.M pouvaient être créées, modifiées, ou supprimées par un simple arrêté du gouverneur .La C.M de la Mekerra fut crée par arrêté le 23 septembre 1874, elle regroupait les centres de Souly,Tenezara, Boutin et Mélliny ,(les autres centres étaient déjà érigé en CPE),ainsi que neuf Douars dont « Telmouni » premier douar constitué en Algérie (On y reviendra sur – Tiliouine, Messar, Tiffiles, Ouled Slimane, Hamiane, Ouled Mebtouch, et Boujebha).
3°- A leur tête se trouvait un administrateur (Mestatour) et non un maire. Un « Sidi-el-hakem » comme aimaient l’appeler ses fidèles assistants (les caïds chefs des douars, le khoudja traducteur, le commis, le garde champêtre (chambitt) et le chaouch… Il fut le symbole de l’ordre colonial et la répression administrative, son rôle était surtout politique ,il se prenait aussi pour un « juge » ! En effet, Puisque son pouvoir investi de pouvoirs discrétionnaires notamment disciplinaires .Rappelons nous du terrible CODE de l’INDIGENAT et la loi du 28 juin 1881 (pénalités comme l’amende pour des infractions comme la réunion sans autorisation pour zerda ,ziara ou waâda et même les mesures d’internements exécutés sous la forme de la transportation, de la détention – envoi au pénitencier de Boukhanifis depuis 1874 par exemple).
4°- La superficie de la commune mixte de la Mekerra était immense est comparable à celle d’un département français : 102577 ha en 1930, c’est à dire 13 fois la superficie de la CPE de Sidi bel-abbés, sur son territoire on y voyait, des centres de colonisation, des hameaux ,des fermes, des douars et aussi,chose bizarre, des communes plein exercice  semblables à des îlots, notamment Détrie, Palissier, Prudon et autres … tous disséminées sans aucune cohésion. Certaines C.M, en effet, ne comprenaient qu’un seul centre de colonisation et même aucun. Les limites de la C/Mixte étaient d’ailleurs déterminées assez arbitrairement, elles n’avaient aucune fixité ; les douars pouvaient être facilement transférés d’une commune à une autre.
5°- La population qui habitait les douars de la commune mixte (Neuf douars dans la CM de Mekerra ) était parfois fort importante dans d’autres C/M ;elle dépassait celle d’un canton français! En 1930, la population totale de la C.M Mekerra avait atteint le chiffre de 21428 habitants et donc 95.83% tandis que les européens représentés 2.78%.
6°- La C/Mixte avait un faux « conseil municipal » ; puisque par sa composition et ses compétences, la commission municipale était moins un conseil municipal qu’un instrument d’assujettissement de la population Algérienne, malgré la réforme de 1919 qui y introduisait les présidents élus des « djemaâs des douars ».
7°- Enfin on peut ajouter, en raison de son étendue considérable et de ses populations hétérogènes, la C.Mixte porte souvent le même nom qu’une C.P.E enclavées dans sont territoire, c’était le cas de Ain Témouchent, Mascara, Saida, Telagh…et chose bizarre, son chef lieu est dans la C.P.E! (en plein centre ville de Sidi-Bel-Abbès ! actuellement résidence de la direction des moudjahiddines ) . Et parfois elle avait deux chefs lieux : l’un d’été, l’autre d’hiver.
En conclusion, l’objectif politique, sinon idéologique colonial, était clair, c’est à dire le développement séparé et inégal de la société coloniale bipolaire. Un colonialisme qui refuse de « partager » ! Cela implique aussi l’émancipation à la liberté et à l’instruction des droits et les devoirs de la citoyenneté.
D’un autre coté. Max WEBER, le célèbre sociologue Allemand, tout en multipliant les comparaisons « Historiques » entre diverses civilisations, il ne manque pas d’insister sur l’un des points essentiels de toute sa sociologie, à savoir la mise en évidence de l’originalité unique de la civilisation européenne y compris dans sa conception de la ville ; « Seul l’occident a connu le système de la commune » disait-il, c’est-à-dire de la ville en pleine exercice .Ailleurs, on ne trouve aucune trace de ce genre de constitution urbaine sinon parfois à l’état d’ébauche. Weber explique les raisons de cette particularité de la ville occidentale. Deux, lui paraissent essentielles. D’une part, la nette séparation entre ville et campagne. D’autre part, la commune possédait une autonomie « militaire » : elle organisait elle-même sa défense puisque elle avait son propre budget. C’est à dire que le citoyen d’une ville était en même temps soldat. Un soldat contre le vandalisme, la saleté et le manque d’Hygiène, la corruption… en somme un soldat du CIVISME et son attachement pour la collectivité dans laquelle il vit.

AL-MECHERFI.

By Karim OULDENNEBIA

Nom & Prénom : KARIM OULDENNEBIA Nationalité Algérienne - Situation familiale : Marié, père de quatre enfants Adresse professionnelle : Fac- Sciences Humaines et Sociales – BP 89 : Université Djilali Liabes/ 22000 - ALGERIE Domaines de recherches : Sciences Humaines –HISTOIRE. Faculté des Sciences Humaines et Sociales - Djilali Liabes University of Sidi Bel-Abbes, Algeria

2 thoughts on “Les Lundis de l’Histoire: La COMMUNE MIXTE de la MEKERRA 1874 – 1962”
  1. Ici elmecherfi a peu glissé en melangeant l’histoire avec la sociologies. Je l,avous je n’ai pas trouvé la chronolgie. L’histoire c’est  »l’espace » en premier ensuite viendra la chronologie des mouveme’ts au sein de cet espace. Le colonisateur est venue ici en remplaçant son predecesseur les othomons. On dit que devant la manne d’impots les Bandits font la queue. A chaque periode un toure a une bande de bandit. En 1830 les othomons ont chuté….le role des kaids etaient la collecte de
    Zakate et l’envoyer vers la turquie. Les français ont gardé cette structure jusqu’a l’apparition de la monnaie papier. Justement ibn khaldoun n’aurait jamais pensé qu’un jour il y aurait une monnaie papier qui remplacerait l’or. Sinon son analyse serait autre. La monnaie avait permis au français plutot a la campagnie coloniale de se défaire des kaids et bachagha..Ces familles et leurs enfants n’avaient aucun role a jouer ils etaient délaissé. Les terres qui étaient jadis exploité par les douars seraient plus tards exploités par les machine agricole. Les douars ont subit a leur tours le retour de la mécanique, n’ayant aucun role dans la production, ils ont rejoint les bidonville ensuite leurs démenagement. La aussi ibn khaldoun n’aurait jamais penser venir. Et ça continu on ne sait pas comment vont évoluer les choses.
    Merci el mecherfi pour ce sujet sauf que tu nous a peu brouiller

  2. Est-il sûr ce Weber….???? Tiens, ça me fait étrangement rappeler Ibn Khaldoun et sa Mouqqadima, surtout en ce qui concerne la polarité ville-campagne…!!!

    Selon Ibn Khaldoun -( un homme dont les travaux étaient tellement en avance sur son époque qu’ils n’ont commencé à susciter de l’intérêt chez les Arabes que quatre siècles après sa mort, et encore….!!!)- : « L’homme ne peut trouver son plein épanouissement que dans une forme de vie supérieure : la vie sédentaire qui est au fondement de ces espaces collectifs que sont les villes. Néanmoins, le passage de la vie bédouine à la vie citadine requiert des conditions car il porte la marque d’un progrès « civilisationnel » qui doit répondre, à deux exigences :

    La première affirme que pour qu’une ville devienne telle, il faut que la vie sédentaire puisse s’installer de façon durable, afin d’éviter tout retour au nomadisme. Cela signifie que le passage d’un mode de vie à l’autre n’est pas irréversible. Il peut se réaliser dans les deux sens. Pour éviter le retour à la vie nomade, qui représente un degré moindre de perfection pour la forme de vie collective, il faut l’émergence d’une véritable culture citadine qui se distingue du bédouinisme. Pour le dire autrement, les usages ( les modes de comportements, les techniques diverses et variées, etc.. ), les représentations collectives ( connaissances en tous genres, opinions, croyances ) et les valeurs ( ce qui mérite d’être poursuivi et ce qui doit être banni , le bien , le mal ) qui caractérisent toute culture humaine changent du tout au tout quand les hommes passent d’une vie mouvementée, bédouine à une vie stable, citadine.

    La seconde condition selon Ibn Khaldoun, qui permet de dégager à coup sûr l’émergence d’une véritable vie citadine, réside dans l’accession de la ville au statut de cité. Le vivre en commun dans une ville n’est pas un simple espace partagé par une agrégation d’individus. En effet, ce qui caractérise le vivre en commun dans une cité ce n’est pas, pour Ibn Khaldoun, la simple satisfaction des besoins comme c’est le cas pour la vie bédouine. Dans les villes, les hommes vivent aussi pour autre chose. Quoi ? Ibn Khaldoun soutient que les hommes à travers la vie citadine peuvent accéder au «bien-être ». C’est cette dernière notion qui donne à la ville sa vraie finalité. »

    Alors qui a été le premier et le plus moderne….???

    Merci Mr Al MECHERFI pour cet article, qui ne fait que conforter les thèses et les constats sur les principes colonialistes esclavagistes, discriminatoires et ségrégationnistes de la « civilisation » de la France coloniale……!!!! L’équation race supérieure/inférieure oblige….!!! Quelle hypocrisie, quelle arrogance…!!! Sachant que c’est grâce à la civilisation arabo-musulmane que les occidentaux sont sortis des ténèbres….!!!! Chah Fina….!!! On devrait avoir honte d’avoir trahi nos aïeuls, Nous Minus Créatus au sens large du mot…!!!!! Pfffffffffffffffffffffffffffffffffffffffff….!!!!!

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