UMC DU CHU DR HASSANI:13 mars 2023
Il est 18h quand on pénètre aux urgences du Dr Hassani AEK avec notre malade , un septuagénaire qui a glissé sur les marches d’escalier, des douleurs atroces se font sentir au niveau de ses hanches. Les UMC à cette heure précise, sont bondées d’une multitude de blessés et d’accompagnateurs. Parmi les patients on remarque des enfants, des femmes jeunes et moins jeunes , des hommes , de tout age et même quelques-uns qui arrivent mains menottées derrière sous protection par les services de sécurité soit toute une panoplie de personnes en quête de soins urgents des suites d’un accident.Les enfants blessés portés sur les bras de leur mère ou père sont orientés vers le service pédiatrie qui se trouve juste à droite après le SAS d’entrée.
Mille adjectifs ne suffisent pas pour décrire la scène et le brouhaha qui s’entremêlent avec les cris de douleurs dégagés par les blessés. Des agents de service, des infirmiers, des internes, des résidents vont et viennent en continue, la salle de consultation chirurgicale qui se trouve dans le couloir de gauche est trop petite pour contenir tous les blessés qui arrivent au même moment poussant quelqu’uns d’entre-eux d’attendre leur tour alors que d’autres juste à côté de la porte s’impatientent pour se voir signifier une décision/orientation qui semble tarder à venir, les mettant à bout de leurs nerfs.
Il n’y a aucun doute l’endroit devient trop exiguë devant tout ce monde, faut-il le souligner et il devient urgent que les pouvoirs publics songent à une extension de cette zone ou une délocalisation des UMC vers un espace plus large et plus adaptée à la population actuelle qui est en constante croissance. Il devient aussi illogique que cette superficie des UMC construite, il y a plus de 20 ans pour une population connue de l’époque arrive à contenir tous les blessés en détresse de la wilaya d’aujourd’hui. Et puisque on y songe pourquoi pas cibler l’espace de plus de 5 ha qui se trouve derrière le CHU ici à l’image (de google earth). L’espace en question est tout désigné pour abriter plus que des UMC.
Entre-temps, notre malade qui hurle de douleur est orienté vers le service de radiologie qui se trouve à une vingtaine de mètres à gauche sur le même couloir , ici aussi, une attente de quelques minutes est ressentie comme une journée pour le fracturé au niveau du bassin. La prise aux rayons X exécutée, on nous fit signe de le mettre dans la salle de « déchocage(1) » qui est la première salle à gauche après le SAS d’entrée, juste avant le bureau réservé aux services de police. Ici, l’attente semble interminable devant les cris intenses de notre patient, une heure est déjà passée depuis notre arrivée aux UMC. Les résidents deux, trois personnes se concertent entre-eux pour une décision à prendre : Faut-il l’opérer ou lui mettre des contre-poids et/ou des broches pour la traction de la jambe ? mais avant cela, il faut être fixé et s’assurer de son rythme cardiaque, lui qui a un diabète. Décision est prise alors, l’évacuer vers le service de cardiologie à l’intérieur du CHU pour un ECG, l’ambulance de service est juste devant l’entrée d’où on retire un brancard qui ne peut se rabaisser au niveau du corps du malade donc il va falloir soulever le malade pour le remettre sur le brancard surélevé en dépit des douleurs et les cris du pauvre septuagénaire « Tuez-moi svp, je ne peux plus » murmure-t-il.
On emmene le malade vers le service cardio. En cours de ces 200 metres de chemin, l’ambulance s’arrête pour une minute, on ne sait pourquoi. Bref, on arrive à l’entrée du service de cardiologie situé au rez-de-chaussée, on nous fit signe d’entrer puis on change d’avis: ‘faites-le rentrer par derrière ». Apparemment, la porte était obstruée par d’autres patients.
Après un bon quart d’heure , L’ECG est établi, son cœur est bon, disent-ils, il pourrait supporter ce qui est prévu c’est à dire soit une opération d’implantation ou autres, nous dit-on. Et on retourne avec notre patient vers les UMC , on le réinstalle dans la même salle de déchocage après une gymnastique de manipulations par quatre personnes juste pour lui éviter les douleurs qui ne se sont pas arrêtées depuis. Il est déjà 22h00, un résident arrive et nous ordonne de refaire les rayons X du bassin pour mieux localiser la fracture , le premier cliché n’était sûrement pas claire?. Après une attente de quelques minutes dans la salle suscitée, on refait la radiographie . À ce niveau, le nombre de blessés en traumato qui y affluent semble important, il faut dire que ce service ne chôme pas du tout . Ensuite on revient avec notre malade à la salle de déchocage et là, la longue attente continue sous la douleur et gémissements du malade. On prie un résident de lui faire une injection ou lui administrer un calmant de sa douleur , rien n’y est fait. Pour eux, ils savent ce qu’ils font.
Un autre résident arrive, celui-là paraît plus abordable et modeste, il nous informe qu’ils vont le transposer vers le bloc de traumato (ancien bloc d’analyses) qui est juste mitoyen aux UMC, l’ancien bloc à l’intérieur du CHU étant en rénovation, nous dit-on.
Les mêmes gestes et manipulations sont exécutés en douceur pour son transfert vers l’ambulance de service puis au bloc de traumato.
Il est presque minuit, on y pénètre, le rez-de-chaussée est plein à craquer, beaucoup de femmes, on nous oriente vers l’ascenseur vers le premier étage où tout est calme dans cette partie « homme », mais de visu il est archicomble de patients,toutes les salles sont pleines, on nous fit signe de se diriger vers un semblant de hall où on remarque un lit vide et sans matelas, l’agent de sécurité, le seul en vue à cette heure tardive, descend en bas pour nous débrouiller un matelas, on y Installe notre patient. Je sens la fatigue, ça devient lassant mais je ne quitte pas des yeux notre malade, je devine le mal et la douleur qui le terrassent depuis bientot plus de six heures c’est à dire depuis sa chute à la maison. On nous informe que les résidents vont rappliquer d’un instant à l’autre pour lui appliquer une traction du fémur (genou) ce qui va sûrement le soulager mais cela nécessite une broche qu’on insère juste sous le genou pour la traction vers l’avant. Ça va faire encore plus mal mais ils vont sûrement l’endormir avec des calmants.
Il est minuit et 45 mn, la fatigue m’envahit après plus plus de sept heures debout , je décide de rentrer chez moi tout en laissant le malade entouré de ses enfants qui le prennent en charge en attendant l’arrivée des résidents et de l’opération sur kit de traction en question.
Le lendemain, je reviens au bloc de traumato et là, je découvre le malade avec son genou droit suspendu sur le kit de traction et des bouteilles remplies d’eau qui servent de contre-poids pour la traction, on lui a installé ce kit, hier juste après mon départ, me dit-il. Il va bien et semble soulagé de toutes les douleurs de la veille. En ce deuxième jour, on m’informe que le médecin l’a consulté aux environs de 10h et a ordonné une autre (3ème) radiographie (de confirmation me dit-il), une « fracture cervicale vraie de classe IV » est confirmée par un appareil mobile de radiographie. Bref, cette 2ème journée semble moins tumultueuse par rapport à la première journée car il est soulagé en raison de cette traction de la jambe qui semble faire éloigner le col du femur de l’os iliaque c’est à dire de l’endroit où ça lui fait atrocement mal.
Au troisième jour, je suis à ses chevets aux environs de 10h30,les contre-poids ont été retirés , le médecin en charge de son dossier, m’expliqua au détail près, sa situation.En effet, sa fracture s’est déplacée et nécessite un repos prolongé jusqu’à « assèchement » d’une plaie qu’il traitait déjà auparavant et qui l’a alité pendant une vingtaine de jours dans ces mêmes UMC.
On lui prescrit un « botte de dérotation » et quelques médicaments. On se prépare à le faire sortir du bloc de traumato et qu’il regagne son domicile. Je sais que ça va faire un peu mal au cours de ce transfert de son lit d’hôpital vers un véhicule qui le transportera à la maison, mais que faire , il doit le supporter momentanément. On s’en débrouille quand même avec des mouvements d’une extrême douceur pour lui atténuer tout mal ou douleur.
(1) Salle de Déchocage : Endroit où on débarrasse le blessé « choqué » de tout traumatisme subi.
(*) Ce reportage se veut tout d’abord un appel de détresse aux élus APW pour se pencher sur les UMC du CHU Dr Hassani de Sidi Bel Abbès pour une étude de leur délocalisation vers un nouvel édifice qui pourrait voir le jour aux environs immédiats du CHU et dont l’espace est tout indiqué ou ailleurs.