Décès de Nelson Mandela : Le père de la nation arc en ciel tire sa révérence

ALGER – Homme courage, symbole de résistance, un des leaders les plus engagés de son temps contre l’oppression et l’apartheid, Nelson Mandela

qui a eu 95 ans en juillet dernier est décédé jeudi soir à son domicile de Johannesburg.

Né le 18 juillet 1918, Rolihlahla Mandela, appelé affectueusement Madiba, a voué toute sa vie au combat pour une Afrique du sud multiraciale, dessinée aux couleurs de l’arc en ciel, comme rêvée par une majorité de sud-africains.

La Nation arc en ciel , formule inventée par l’évêque Desmond tutu pour désigner une Afrique du Sud, réconciliée avec elle-même est , aujourd’hui, une réalité qui a fait croiser le destin d’un homme avec les rêves de toute une nation.

Depuis 1944, le destin de Mandela se confond avec celui de son pays et de son parti, l’ANC, qui a été ce creuset qui l’a façonné, d’abord en tant qu’avocat, privilégiant la non violence, ensuite en présidant le Umkhonto we Sizwe, l’aile armée de l’ANC.

Ce dernier est né après les massacres de Sharpeville, en 1960, et la répression qui s’était abattue sur les membres de l’ANC, dans la foulée de son interdiction. La trajectoire changeant de voie et ce fut alors le choix de la lutte armée.

Ce choix amena Mandela à entreprendre nombre d’actions contre des objectifs civils et militaires, ce qui lui valut d’être arrêté en juillet 1963 et condamné aux travaux forcés à perpétuité.

Dans les ténèbres qui l’enserraient à l’intérieur des geôles glaciales du régime de l’apartheid, il a continué à insuffler et raviver la flamme du combat contre la discrimination et l’injustice jusqu’à sa libération en 1990.

Un rapport particulier à l’Algérie

L’Algérie représentait beaucoup pour Mandela. Déjà en 1961, il prenait connaissance de la résistance du peuple algérien qui allait constituer pour lui un modèle de combat.

L’African National Congress (ANC) avait, en effet, chargé Nelson Mandela de quitter clandestinement l’Afrique du Sud et de prendre contact avec des pays africains susceptibles d’aider le peuple sud-africain à s’affranchir du joug de l’apartheid.

Le premier contact de Nelson Mandela avec la révolution algérienne s’était établi, en 1961, au Maroc avec le représentant du GPRA, le docteur Chawki Mostefai qui lui permit de relever les similitudes entre la lutte du peuple algérien et le combat de la majorité sud-africaine contre l’apartheid.

Le soutien de l’armée de libération nationale (ALN) s’était, entre autres, traduit par l’intégration de nombreux combattants de l’ANC dans les camps d’entrainement aux côtés des moudjahidine de l’ALN en Algérie où Mandela s’était rendu en 1962.

A partir de 1965, plusieurs militants de l’ANC venaient secrètement en Algérie pour recevoir un entrainement militaire et rentraient en Afrique du sud pour y mener des opérations militaires.

Et pour donner plus d’écho au combat contre l’apartheid à partir de l’Algérie, l’ANC ouvrit un bureau d’informations qui a vu le passage, à sa tête, de grandes personnalités du mouvement. Tous les dirigeants de l’ANC fréquentaient Alger, qualifiée, à cette époque, par le père de l’indépendance de la Guinée Bissau, Amilcar Cabral de “Mecque des révolutionnaires”.

Le soutien de l’Algérie s’était également exprimé, au moment de sa présidence de l’assemblée générale de l’ONU en 1974, par le geste historique qui a consisté à expulser de la salle le représentant du régime de l’apartheid.

Trente-huit années après, le retour à Alger

A sa libération, le 11 février 1990, après 27 années d’incarcération, Nelson Mandela avait tenu à se rendre à Alger en reconnaissance au soutien apporté par l’Algérie à la lutte du peuple sud-africain contre l’apartheid.

C’est en hommage au peuple algérien et à sa révolution que Nelson Mandela était revenu, trente-huit années après, au pays où il avait appris les premiers rudiments sur le maniement des armes de guerre et dont il s’est inspiré pour mener son combat contre l’oppresseur.

Un combat qu’il avait poursuivi après sa libération en s’attelant, de 1991 à 1994, à démanteler les derniers piliers de l’apartheid qui a fini par plier, en perdant, une à une, ses positions jusqu’à la tenue, en 1994, des premières élections générales qui ont fait de Mandela le président élu de la République d’Afrique du Sud.

Mission achevée pour le prix Nobel de la paix avec cette profession de foi lancée dans son discours d’investiture, résumée par le fameux “at least free”, enfin libre, qui a marqué la fin d’un régime foncièrement injuste et la naissance d’une nation multiraciale.

En 1999, Mandela passe le témoin à Thabo Mbeki et bien que, s’éclipsant de la scène en quittant la présidence de la république et la direction de l’ANC, son aura morale et son poids politique ont continué, jusqu’à sa mort, d’empreindre l’action de ses successeurs, nourris par le même esprit de combat.